Le martyre des moines de Tibhirine

En mai 1996, sept moines trappistes, les moines du monastère de Tibhirine, sont assassinés en Algérie. Ils vivent dans les montagnes de l’Atlas et sont enlevés, potentiellement par le Groupe Islamique Armé, dans la nuit du 26 au 27 mars. Les têtes des moines sont retrouvées le 30 mai. Les moines sont considérés comme des martyrs et ont été béatifiés le 8 décembre 2018,  à Oran, en Algérie, par le pape François.

 

Le monastère de Tibhirine

Le monastère trappiste de Tibhirine a été fondé en 1938, près de Médéa, à 90km au sud d’Alger, dans les montagnes de l’Atlas. Les moines trappistes de l’abbaye de Notre-Dame de l’Atlas consacrent leur vie à la prière et au travail de la terre, qui les fait vivre. 

 

Les premiers signes de tension

Le 14 décembre 1993, douze ouvriers croates catholiques sont égorgés à quelques kilomètres du monastère. Les moines en témoignent dans une lettre écrite au journal La Croix le 22 janvier 1994, publiée le 24 février suivant.

Le 24 décembre 1993, un groupé armé de l’Armée Islamique du Salut fait irruption dans le monastère et exige un impôt révolutionnaire pour leur cause. Ils veulent également emmener le médecin de la communauté, frère Luc. Le Père Christian reste calme et ferme et refuse cette exigence, tout en rappelant que frère Luc soignera tous les malades se présentant au monastère. Le groupe repart sans leur faire de mal.

Le martyre des moines de Tibhirine

L’enlèvement

Le 31 mars 1996 doit se tenir l’élection du nouveau prieur du monastère, les moines se rassemblent donc. Le Père Christian de Chergé souhaite passer la main au Frère Christophe Lebreton, sous-prieur. Malheureusement, dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, à 1h15 du matin, un groupe d’une vingtaine de personnes se présente aux portes du monastère. Ils la forcent et vont vers le cloître où ils enlèvent sept moines. Deux moines échappent aux ravisseurs car ils dormaient dans une autre partie du monastère. Comme le téléphone a été coupé par les intrus, les deux frères ne peuvent prévenir la gendarmerie que le lendemain matin. Ils sont aussitôt placés sous protection. 

Pendant de longs jours, il n’y a aucune nouvelle des sept religieux.

Entre le 18 et le 27 avril, un communiqué, provenant apparemment du GIA (Groupe Islamique Armé), assure que les moines sont vivants. Le communiqué propose un échange de prisonniers.

Le 30 avril, un homme, envoyé par les ravisseurs, se présente au consulat de France à Alger et donne un message de la part du chef du GIA, Djamel Zitouni, et une cassette audio où l’on entend distinctement les voix des sept moines. Dans cet enregistrement daté du 20 avril on entend le Père Christian Chergé dire : « Dans la nuit du jeudi au vendredi, les moudjahiddin nous ont lu le bulletin du GIA dans lequel il est demandé au gouvernement français de libérer un certain nombre d’otages appartenant à ce groupe en échange de notre libération, cet échange semblant être une condition absolue. ». De nombreuses négociations ont été tentées par les Français, en vain.

La mort

Malheureusement, le 21 mai, un autre communiqué, attribué au GIA, annonce : « Nous avons tranché la gorge des sept moines, conformément à nos promesses. ». 

Ce martyre provoque une vive réaction en France et se sont 10 000 personnes qui se rassemblent le 28 mai sur le Parvis des droits de l’homme du Trocadéro pour rendre hommage aux moines. 

La reconnaissance des corps

Deux jours plus tard, le gouvernement algérien annonce la découverte des corps des religieux, près de Médéa. 

Aussitôt, le Père Armand Veilleux, procureur général de l’ordre cistercien (auquel les moines appartenaient) se rend en Algérie et demande à voir les corps. Cette demande est d’abord rejetée par l’ambassade de France. On l’informe qu’en réalité, seules les têtes ont été retrouvées. 

Par ailleurs, aucune autopsie officielle n’a été faite par les autorités algériennes. Toutefois, l’identité des sept moines a tout de même pu être établie le 31 mai, à la morgue de l’hôpital militaire d’AIn Naadja, où l’ambassadeur de France s’était rendu avec un médecin de la gendarmerie, l’évêque d’Alger, Mgr Henri Teissier, le père Armand Veilleux et un des deux moines ayant échappé à l’enlèvement. 

Les funérailles

Les funérailles des sept martyrs ont eu lieu à la basilique de Notre-Dame d’Afrique, à Alger, le 2 juin 1996. Ils ont été enterrés au monastère de Tibhirine deux jours plus tard.  

Ce sont malheureusement 19 prêtres et religieux catholiques qui ont été assassinés entre le printemps 1994 et l’été 1996, en Algérie.  

Noms des sept moines assassinés

• Père Christian de Chergé, prieur de la communauté depuis 1984, 59 ans, moine depuis 1969, en Algérie depuis 1971.
• Frère Luc Dochier, 82 ans, moine depuis 1941, en Algérie depuis août 1946. Médecin, il a exercé pendant la Seconde Guerre mondiale avant de prendre la place d'un père de famille nombreuse en partance pour un camp de prisonniers en Allemagne. Il était, avec le frère Michel, cuisinier de la communauté.
• Père Christophe Lebreton, 45 ans, moine depuis 1974, en Algérie depuis 1987, ordonné en 1990.
• Frère Michel Fleury, 52 ans, moine depuis 1981, en Algérie depuis 1985. Il était le cuisinier de la communauté.
• Père Bruno Lemarchand, 66 ans, moine depuis 1981, en Algérie et au Maroc depuis 1989.
• Père Célestin Ringeard, 62 ans, moine depuis 1983, en Algérie depuis 1987.
• Frère Paul Favre-Miville, 57 ans, moine depuis 1984, en Algérie depuis 1989. Il était chargé du système d'irrigation du potager du monastère.

Prier avec les moines de Tibhirine

Prière du bienheureux Père Christian sur l’amour du Christ

« Il m'a aimé jusqu'à l'extrême, l'extrême de moi, l'extrême de Lui. Il m'a aimé à sa façon, gracieusement, gratuitement,... comme je ne sais pas aimer : cette simplicité, cet oubli de soi, ce service humble et non gratifiant. Il a aimé les siens jusqu'à l'extrême, ils sont tous à Lui, chacun comme unique, une multitude d'uniques. Il a tant aimé les hommes qu'Il leur a donné son Unique : et le Verbe s'est fait FRERE. Amen. »

Prière du bienheureux Père Christian de Chergé

« S'il m'arrivait un jour d'être victime du terrorisme, j'aimerais que ma communauté, mon Église, ma famille se souviennent que ma vie était donnée à Dieu et à l'Algérie. Ma vie n'a pas l'innocence de l'enfance. J'ai suffisamment vécu pour me savoir complice du mal et même de celui-là qui me frapperait aveuglément. J'aimerais, le moment venu, avoir ce laps de lucidité qui me permettrait de solliciter le Pardon de Dieu, en même temps que de pardonner de tout cœur à qui m'aurait atteint. Je sais les caricatures de l'islam qu'encourage un certain islamisme. Ma mort, évidemment, paraîtra donner raison à ceux qui m'ont traité de naïf, mais ceux-là doivent savoir que sera enfin libérée ma plus lancinante curiosité. Voici que je pourrai plonger mon regard dans Celui du Père pour contempler avec Lui ses enfants de l'islam tels qu'Il les voit, tout illuminés de la gloire du Christ, fruits de Sa Passion investis par le don de l'Esprit, dont la joie secrète sera toujours d'établir la communion et de rétablir la ressemblance en jouant avec les différences. Cette vie perdue, je rends grâce à Dieu qui semble l'avoir voulue tout entière pour cette joie-là. Dans ce merci, je vous inclus, amis d'hier et d'aujourd'hui, et toi aussi, l'ami de la dernière minute, qui n'aura pas su ce que tu faisais. Qu'il nous soit donné de nous retrouver, larrons heureux, en paradis, s'il plaît à Dieu, notre Père à tous deux. Ainsi soit-il. » 

 

Prière de bienheureux Frère Michel Fleury

« Toutes les tempêtes peuvent souffler, tous les incendies peuvent brûler, toutes les inondations peuvent m'emporter, tous les volcans peuvent se ranimer, tous les séismes peuvent me secouer, mais ma foi est inébranlable ! Tous les problèmes peuvent m'arriver, toutes les maladies peuvent me toucher, toutes les paroles peuvent me blesser, tous les malheurs peuvent me ruiner, tous les ennemis peuvent me persécuter, mais ma foi est inébranlable ! Ma foi, c'est Toi ! Ma force, c'est Toi ! Dieu de toute ma vie, je Te sens, je Te prie, je Te chante, je Te parle, je n’ai ni crainte, ni peur, ni anxiété. La Vie vaut la peine d'être vécue. Avec Toi, toujours présent et éternel, en Toi, ma foi est inébranlable. Merci Y... et je crie : « Mon Dieu donne-nous cette Foi-là ! Ainsi soit-il. »

Prière de bienheureux Frère Célestin Ringeard

« Marie, Toi qui tout au long de Ta vie sur la terre as su si bien accueillir l'Esprit, emplis ma vie de silence et mon silence d’Amour. Apprends-moi à contempler comme Toi les merveilles d’Amour de Dieu, et les Mystères de vie de ton Fils Jésus. Marie, ma Mère, Mère de tous les hommes, apprends-moi à dire du plus profond de mon cœur : « Jésus, Fils de Dieu, Sauveur, prends pitié de moi, pécheur ! Viens, Seigneur Jésus ! » Nous attendons le Jour de ton Retour glorieux, Jour où Tu rassembleras dans la Maison du Père les hommes de tout temps et de tout lieu, Jour où Tu donneras une dimension de vie infinie à tout ce qui a existé sur terre et dans l'univers. Viens, Seigneur Jésus ! Viens ! Amen ! Alléluia ! Ainsi soit-il. »

Prière de bienheureux Frère Paul Favre-Miville

« Esprit Saint, Feu allumé par Jésus ressuscité, viens brûler encore aujourd'hui nos cœurs de jeunes afin que, laissant tout pour suivre le Christ, nous découvrions la vraie joie des disciples. Envoie-nous au milieu de nos frères, avec les Prêtres au service du Peuple de Dieu. Envoie-nous en plein monde, avec les hommes et les femmes au cœur apostolique. Envoie-nous au-delà des frontières, avec les témoins dévorés par le zèle missionnaire. Envoie-nous dans le silence du désert avec les chercheurs passionnés du Dieu vivant. Esprit d'Amour donne-nous, à nous jeunes le courage de répondre à l'appel du Père, de l'Eglise et du monde ! » 

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