59e JOUR – 25 mars – Annonciation – Sur l'amour de Dieu en l'Incarnation

La Grande retraite de Rome – 65 jours en 1865
– Notes de Retraite 44 (NR 44 dans les Œuvres complètes) déjà parues ici :
Récapitulatif des publications
• Les 7 premiers jours : Mercredi 25 janvier – Mercredi 1er février
• 2e Semaine : Jeudi 2 février – Mercredi 8 février
• 3e Semaine : Jeudi 9 février - Mercredi 15 février
• 4e Semaine : Jeudi 16 février – Mercredi 22 février 1865
• 5e Semaine : Jeudi 23 février – Mercredi des Cendres, 1er mars 1865
• 6e Semaine : Jeudi 2 mars – Mercredi 8 mars 1865
• 7e Semaine : Jeudi 9 mars – Mercredi 15 mars 1865
• 8e Semaine : Jeudi 16 mars – Mercredi 22 mars 1865
57e JOUR : Jeudi 23 mars 1865 • 1re méditation – Vie d'union • 2e méditation – Aliment de l'union avec Jésus-Christ • 3e méditation – Centre de l'union
58e JOUR : Vendredi 24 mars 1865 • 1re méditation – Jésus-Christ hôte de l'homme
• 2e méditation – Sur la compassion des saintes âmes du Calvaire
59e JOUR
Samedi 25 mars 1865 – Annonciation
1re méditation – Sur l'amour de Dieu en l'Incarnation
J'ai médité sur l'amour de Dieu pour l'homme tombé ; – sur l'amour du Père donnant son Fils unique dans l'Incarnation, pour devenir semblable aux hommes, leur frère selon la chair, – le choix d'une forme de vie humble, pauvre et souffrante pendant tout le temps de sa vie mortelle.
Dans le don de l'Incarnation, tout était réglé, déterminé.
Ce don emportait avec lui tous les états par lesquels passe une nature humaine pour arriver à la virilité : la conception, la naissance, l'enfance, etc.
Ce don divin déterminait comment le Verbe incarné serait :
– voie, le chemin, le modèle d'abord pendant trente ans à Nazareth ;
– vérité, pendant sa vie évangélique ;
– et vie, par la mort de la croix, comme autrefois le serpent d'airain du désert, – et le vie comme le pain du désert, la manne, – et le vie en chaque homme substantiellement par l'Eucharistie, extension de l'Incarnation. Et chaque homme, par l'Eucharistie, partageant l'honneur, le bonheur et les grâces de la très sainte Vierge, de Nazareth et des Apôtres.
Et il faut ajouter gloire : Notre Seigneur refait notre dignité, relève notre honneur, en devenant notre parent selon la chair, notre sociétaire selon l'esprit de foi, et notre communion. Puis au Ciel, nous sommes cohéritiers du Christ, – participants de la divine nature et de la divine gloire [Rm 8,17; cf. 2P 1,4].
Est-ce possible que la très sainte Trinité ait tant aimé l'homme tombé, et chaque homme en particulier ! « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire » ! [Jn 4,10]
Oh ! si les hommes savaient ce que c'est que l'Incarnation ! jusqu'où va l'amour de Dieu pour lui, ce que Dieu fait pour lui :
– le Père qui lui donne son Verbe ;
– le Verbe qui se donne à lui jusqu'au Calvaire et à l'Eucharistie ;
– le Saint-Esprit qui l'incarne en Marie, sur l'autel par le prêtre, et le vivifie en chaque homme !
Mais qui pense à toutes ces merveilles de l'amour de Dieu pour l'homme ? Qui les médite ? Qui les adore ? Qui les glorifie ? Qui aime le Verbe incarné ? Hélas ! Notre Seigneur n'est pas connu, il n'est pas prêché, même par les prêtres ! Il n'est pas aimé, même des siens ! L'amour n'est pas un acte de zèle, un acte isolé de vertu. L'amour est une vie, comme il a fait la vie humaine et divine de Jésus-Christ.
Mais ne serait-il pas nécessaire dans la Société d'avoir les contemplatifs et les apôtres ?* d'avoir des adorateurs et des incendiaires, puisque Notre Seigneur veut voir ce feu eucharistique incendier le monde, qui mieux que des religieux du Très Saint-Sacrement peuvent et doivent le répandre partout, faire connaître, aimer et adorer partout Notre Seigneur ?
Nous ne faisons pas assez pour lui. Qui sait si Notre Seigneur voudrait ces deux bras, ces deux flammes, une qui, comme la flamme, monte vers la divine hostie, l'autre qui monte et s'étend comme les rayons du soleil ?
Je vais bien demander à Notre Seigneur sa sainte et adorable volonté aujourd'hui.
La vue de tant d'amour me faisait peur. Que doit penser de cet amour, l'âme après la mort ? Et surtout l'âme qui l'a oublié, négligé, offensé, méprisé ? Oh ! comme elle doit se précipiter avec honte et horreur dans l'enfer et se dire : tant d'amour du côté de Dieu, et de son côté tant d'ingratitude. Je n'y ai pas pensé. Je l'ai oublié. Je ne le savais pas. Tout cela n'excuse pas le crime, l'infidélité, le mépris.
Comme aussi quel ravissement de l'âme, qui voit le voile s'ouvrir, la gloire de l'amour apparaître, et reçoit l'embrassement de joie et d'amour de Notre Seigneur Jésus-Christ, aussi heureux de la couronner, qu'elle d'être couronnée !
Imitation, lib. 1, c. 25 :
« Quand un homme en est venu à ne chercher sa consolation dans aucune créature, c'est alors qu'il commence à goûter Dieu parfaitement, et qu'il est, quoi qu'il arrive, toujours satisfait.
Alors il ne se réjouit d'aucune prospérité, et aucun revers ne le contriste ; mais il s'abandonne tout entier, avec une pleine confiance, à Dieu, qui lui est tout en toutes choses, pour qui rien ne périt, rien ne meurt, pour qui, au contraire, tout vit, et à qui tout obéit sans délai. » [Im 1, 25: 41-42].
2e et 3e méditation
Minerve – Saint-Père**
S. Pierre-Julien Eymard (NR 44,129)
* Le P. Eymard évoque ici la possibilité de deux branches dans la Société, les contemplatifs et les apôtres. De fait, les Constitutions de 1864 portent un chapitre sur “la maison de solitude”, un projet qui n'aboutira pas. Cf. Núñez, édition critique, p. 255, note 59.
** Selon la tradition, le Pape se rendit à la basilique Santa Maria sopra Minerva, où se tenait la Chapelle papale. Après la célébration, Pie IX reçut les Pères dominicains qui desservent l'église “et de nombreux prêtres étrangers et des laïcs qui avaient obtenu cette faveur” (cf. Núñez, édition critique, p. 256, note 60). – C'est la dernière rencontre du P. Eymard et de Pie IX.