Chers frères et sœurs dans le Christ, pour ceux d'entre nous qui habitent en France, cette période de confinement forcé peut être une occasion d'approfondir notre vie spirituelle, notamment en consacrant davantage de temps à la prière. Pour nous y aider, dans la ligne des textes que nous avons publiés chaque jour durant la dernière Semaine de prière pour l'unité des chrétiens, je vous propose quelques extraits d'un très beau livre que j'ai découvert tout récemment : « Le silence de la prière » de Dom Georges Lefebvre, moine bénédictin de Ligugé (Desclée de Brouwer, 1975). L'auteur – qui a publié de nombreux ouvrages sur la prière – nous livre le fruit de toute une vie consacrée à la recherche de Dieu. 

Prenons le temps de lire et de méditer ces lignes, et surtout de nous placer chaque jour devant Dieu. N'est-il pas vrai que plus nous serons unis à Lui, notre Père bien-aimé, plus nous serons un dans le Christ, par l'action de l'Esprit Saint ? 

            La prière répond au besoin le plus profond de notre cœur. Dieu nous a créés pour son amour et nous sommes marqués au plus intime de nous-mêmes du sceau de cet amour pour lequel nous sommes faits.

            Dieu nous a créés à son image et à sa ressemblance en faisant de nous des êtres personnels, c'est-à-dire non enfermés en nous-mêmes mais ne pouvant exister vraiment que dans une relation, une ouverture à l'autre. « Notre Créateur nous a donné l'amour comme l'expression de notre visage d'hommes », écrit saint Grégoire de Nysse. Nous sommes faits pour aimer.

            Tout quitter pour nous mettre un moment en présence de Dieu, pour nous tenir à sa disposition, c'est nous offrir à l'action secrète de sa grâce, qui agit toujours. Il suffit de faire ce qui dépend de nous, simplement, paisiblement, pour Lui être attentifs, sans nous troubler si nous y parvenons bien mal. La prière n'est pas une œuvre que nous aurions à réaliser nous-mêmes, elle est une grâce à laquelle nous avons à nous ouvrir par une bonne volonté sincère.

            Le Dieu de notre foi n'est pas un Dieu lointain et solitaire dominant sa création dans l'affirmation de son absolue souveraineté devant laquelle tout devrait plier. Un Dieu trop loin de tout ce qui n'est pas Lui pour pouvoir aimer. Un Dieu que sa grandeur isole.

            Notre Dieu est un Dieu trinitaire : un Dieu qui, étant en Lui-même communion d'amour, peut nous aimer aussi, en faisant de nous ses enfants en son Fils unique, d'un vrai amour divin, de l'amour qui est sa vie.

            Nous avons à nous ouvrir à cet amour qui vient à nous le premier, en lui faisant confiance, en le laissant nous conduire pas ses voies à lui. Ces voies seront des voies d'humilité. Il nous est bon de sentir que nous ne pouvons nous établir dans la prière comme dans un domaine où nous serions bien chez nous, où nous pourrions nous comporter en propriétaires. Il nous est bon d'apprendre qu'elle est toujours un don, une grâce à laquelle nous pouvons seulement nous ouvrir.

            Nous demeurerons alors devant Dieu dans une attitude de très simple disponibilité : regardant vers lui avec un regard de confiante espérance.

            C'est notre vie tout entière qui doit être vécue dans cette présence : dans la conscience de ne pas nous appartenir, mais d'appartenir à un amour dont nous nous savons aimés. Demeurant entre ses mains, dans une dépendance qui est toute confiance. Avec simplicité, dans une spontanéité joyeuse.

            Nous aurons seulement à nous rappeler qu'il n'est pas de vraie humilité devant Dieu qui ne se traduise dans une vraie humilité devant le prochain. Celle-ci, écartant les ombres de nos jugements et de nos sévérités, nous permettra de reconnaître en eux aussi la présence de cet amour dont nous ne pouvons vivre qu'en y communiant avec eux.