9AINE EUCHARISTIQUE À S. EYMARD - 1er jour : 25 Juillet
1_Les derniers jours du Père Eymard
Le Père Eymard, depuis le printemps 1868 de cette dernière année de sa vie, est souvent sur les routes pour prêcher des retraites au noviciat de la Congrégation du Saint-Sacrement ou pour d’autres congrégations, dans sa communauté de Paris tous les jeudis soir, ou bien visiter les Servantes du Saint Sacrement à Angers et participer à la bénédiction de la première pierre de la chapelle du Saint-Sacrement, etc.
Le 17 juillet au matin, au bord de l’épuisement et sous les conseils de son médecin qui le décida à aller se reposer en famille, le Père Pierre-Julien Eymard partit pour la Mure. Il pensait aussi retourner au Laus, tranquillement, reprendre des forces. Il avait même autorisé le frère Albert à venir le rejoindre dans ce sanctuaire béni. Il était conscient de sa faiblesse et de l’imminence de sa mort. « Notre Seigneur exige de moi tant de délicatesse que ce doit être bientôt la fin » avait-il dit au printemps de 1868, propos rapportés par son disciple et confident, mais aussi celui qui pris en note nombre de ses enseignements, homélies… le tout jeune frère Albert Tesnière (22 ans).
Mais Pierre-Julien n’alla pas directement à la Mure. Il passa rendre visite à Marguerite Guillot, la supérieure des Servantes du Saint-Sacrement d’Angers, qui était en cure thermale à Vichy. Il était question de créer une communauté féminine à Lyon, et il voulait s’en entretenir avec elle. Il resta 2 jours avec elle, jusqu’à sa fête le 20 juillet. Il était rendu à Lyon le soir même, dans un hôtel près de Perrache.
Le lendemain matin il prit le premier train pour Grenoble où il arriva vers 9 heures.
Il était encore à jeun et n’avait pas encore dit sa messe. Avec son ami l’abbé Bard, avec lequel il allait rejoindre La Mure dans l’après-midi, ils allèrent réserver leur voiture. Puis, le P. Eymard se rendit à la chapelle de l’Adoration, tenue par les missionnaires de La Salette.
Il était près de 11 heures. Il demanda à célébrer la messe. Visiblement si fatigué, le Père missionnaire voulu l’en dissuader. Mais le P. Eymard insista et le missionnaire resta pour l’accompagner. Ce fut sa dernière messe. Ce missionnaire de La Salette, le P. Archier, raconta par la suite : « Je le reçus presque dans mes bras lorsqu’il quitta le saint autel. Je lui donnai un peu de chartreuse. » (P . Archier, récit dans R. Ullens, Devant la mort, le bienheureux Pierre-Julien Eymard, Montréal 1950, p.20).
De la biographie du P. André Guitton, S. Pierre-Julien Eymard, L’Apôtre de l’Eucharistie :
Le P. Eymard dut renoncer à son rendez-vous au restaurant : il était si faible qu’il pouvait à peine se tenir debout. Il ne voulut rien prendre, il se reposa en attendant le départ de la diligence. Le P. Archier tenta de le dissuader de prendre la route et l’invita à demeurer quelques jours. Mais en vain. Vers 1 heure et demie, le Père se leva. À peine accepta-t-il un peu de nourriture et il rejoignit l’abbé Bard à la Porte de Bonne, lieu de départ de la voiture de La Mure. Avec son compagnon, il prit le coupé à l’avant et dans la chaleur étouffante de la canicule, il quitta Grenoble pour La Mure. Le voyage fut harassant. Selon le témoignage de son compagnon, « le Père devenait taciturne, ne répondait que par des monosyllabes. À chaque relais cependant il descendait, prenait un peu l’air, quelques rafraîchissements et remontait seul en voiture avec assez de vigueur » (Tesnière, AGRSS, Rome, 0 1, PP. 337-374). L’abbé Bard le quitta à Villard, non sans recommander au cocher de veiller sur le Père Julien. Vers 8 heures du soir, la diligence arrivait chez Pelloux à La Mure. Personne ne l’attendait.
« Quand je serai à Grenoble, avait-il écrit de Vichy à ses sœurs, je vous enverrai une dépêche pour vous annoncer mon arrivée à La Mure » (À Marianne Eymard, 19 juillet 1868, CO 2209). Ses sœurs n’avaient rien reçu. Alertées, elles arrivèrent immédiatement, Annette Bernard d’abord. Le Père l’embrassa, mais il ne dit pas un mot, il oubliait même son chapeau dans la voiture. Puis survint Marianne. Pas un mot non plus. Arrivés à la maison, toute proche, il rédigea avec peine un télégramme à l’adresse de la communauté de Paris sans doute, mais dont seules la date et la signature sont lisibles. On le conduisit dans sa chambre au second étage et il se mit au lit. On était loin de soupçonner la gravité de son état, et lui-même ne pouvait rien demander. « Nous pensions que ce serait une fatigue comme il en avait tant éprouvé de fois », devait confesser naïvement par la suite Annette. En réalité, il avait été victime d’une congestion cérébrale. Le voyage et la chaleur n’avaient pu qu’aggraver son état : il était aphasique.
2_Prédication : Triduum du Saint Sacrement
Rappelons que cette retraite est donnée par le Père Eymard les 26-28 juillet 1858 à l'Institut de l'Adoration perpétuelle, à Bruxelles. Voir la Présentation générale de la Neuvaine Eucharistique.
Sermon d'ouverture
Triomphe de l'amour de Jésus-Christ par l'Eucharistie
La séparation n'est pas naturelle à l'homme, sa seule pensée fait verser des pleurs. Notre Seigneur Jésus-Christ lui-même est attendri en songeant à la séparation : il va mourir, il va remonter dans la splendeur des cieux, et cependant son cœur est ému parce qu'il doit quitter ses apôtres. Mais bientôt son amour l'emporte sur la douleur : “Je ne vous laisserai point orphelins, leur dit-il, je serai avec vous jusqu'à la fin des siècles.” [Jn 14,18; Mt 28,20]
Que voulait donc dire Jésus-Christ ? Comment pouvait-il être avec nous jusqu'à la fin des siècles, lui, remontant dans sa gloire céleste ? Est-ce en nous donnant sa grâce ? Mais la grâce n'est que le don et nous voulons le donateur ; sa vérité ? mais la vérité n'est qu'un rayon et nous voulons le soleil ; se donnera-t-il à nous en ses ministres ? Oh non ! tout cela ne remplace pas Jésus pour mon cœur !
Vous me devancez, n'est-ce pas ? C'est par l'Eucharistie. Jésus, tout entier, sera avec nous jusqu'à la fin ; l'Eucharistie, voilà le triomphe vivant de l'amour de Jésus-Christ ! Il m'est doux de venir faire un appel à votre amour : ce temple, témoin d'un si prodigieux miracle, cette ville vouée au saint Sacrement vous font porter envie par mes compatriotes ; je désirais depuis longtemps voir cette capitale ; je serais consolé, mes frères, si je pouvais ajouter une fleur à votre piété.
S. Pierre-Julien Eymard (PO 20,1)
1- L'amour se perpétue
1er Point
L'amour veut trois grandes choses : il cherche à se perpétuer, à se multiplier, à s'unir.
L'amour éphémère qui ne dure qu'un jour ne mérite pas ce beau nom ; l'amour veut être constant, perpétuel. Voyez le père, la mère, l'amie ! Chaque jour donne à leur cœur un accroissement d'affection, et si la mort leur enlève l'objet aimé, ils font graver sur le marbre et l'airain leurs sentiments d'amour. Oh ! si l'amour était perpétuel, il n'y aurait plus ni larmes, ni tombeaux ! Si un peintre avait trouvé le secret de reproduire vivant le regard aimé d'un père, d'un enfant ; s'il pouvait faire battre encore ce cœur de mère, on accourrait à lui des extrémités de l'univers, sa fortune serait bientôt faite ! La chose est impossible ; il faudrait être créateur pour la réaliser ; et Dieu seul est créateur.
Mais Jésus-Christ qui a la vie, qui est l'auteur de la vie, ne peut-il pas nous faire son portrait vivant ? Ne le voyez-vous pas sur l'autel, ce côté entrouvert, ce feu dont il brûlait pour vous ? C'est là qu'il se donne, qu'il se perpétue ; c'est le buisson ardent qui brûle sans se consumer [cf.Ex 3,2]. Mais, me direz-vous, je ne le vois pas. – N'avez-vous donc jamais communié ? N'avez-vous pas senti Notre Seigneur si vous ne l'avez pas vu ? Le petit enfant ne comprend pas encore les caresses qu'il reçoit et cependant, à leur douceur, ne reconnaît-il pas sa mère ? Qu'un païen me dise cela, je le comprends, il ne sent pas Jésus-Christ ; mais un cœur chrétien, un cœur qui a reçu son Sauveur, oh ! non, je ne puis le comprendre !
“Ceci est mon corps, ceci est mon sang”, nous dit Notre Seigneur [cf. Mt 26,26-28], “je suis avec vous, non pas ma grâce, non pas ma doctrine, mais moi-même, c'est moi tout entier qui veux rester avec vous” [cf. Mt 28,20]. Et comment pourrait-il en être autrement ? Un roi aurait honte de demeurer dans son palais quand ses soldats sont sur le champ de bataille ; et ce que ferait un homme, un Dieu Sauveur ne le ferait pas ? Jésus-Christ serait mon frère et il me laisserait seul aux prises avec le démon, le malheur, la souffrance ? Oh ! non, l'amour ne recule devant rien.
Mais comment donc va faire Jésus-Christ pour se perpétuer, pour être avec nous jusqu'à la fin des siècles ? Sa puissance et sa bonté vont opérer ce grand mystère ; les apôtres ont foi dans l'un et l'autre de ces attributs divins, aussi ne réclament-ils pas ; ils s'inclinent et acceptent sa promesse, certains de sa réalisation. Adam et Ève ont eu le pouvoir de se reproduire, toute créature naturelle peut se perpétuer, et Jésus-Christ s'éteindrait ! Non, non. “Faites ceci en mémoire de moi”, dit-il à ses apôtres [Lc 22,19] ; voilà l'établissement du sacerdoce, voilà le prêtre, voilà Jésus perpétué.
S. Pierre-Julien Eymard (PO 20,2)
3_Prière
“Je ne vous laisserai point orphelins, leur dit-il, je serai avec vous jusqu'à la fin des siècles.” [Jn 14,18; Mt 28,20]
Jésus, tout entier, sera avec nous jusqu'à la fin ; l'Eucharistie, voilà le triomphe vivant de l'amour de Jésus-Christ ! Il m'est doux de venir faire un appel à votre amour…
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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6