Ajuster son attente (semaine 1)

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Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc (13, 33-37)

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Prenez garde, restez éveillés : car vous ne savez pas quand ce sera le moment. C’est comme un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail, et demandé au portier de veiller. Veillez donc, car vous ne savez pas quand vient le maître de la maison, le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin ; s’il arrive à l’improviste, il ne faudrait pas qu’il vous trouve endormis. Ce que je vous dis là, je le dis à tous : veillez ! »

I - Commentaire évangélique : les trois venues du Christ

S’il nous faut veiller, c’est bien sûr parce que quelqu’un vient : le Messie annonce sa venue. Il est venu ; il vient et il viendra. Telles sont les trois certitudes que nous retrouverons, diversement tressées, dans toutes les liturgies de ce temps de l’Avent. Il est ­important de bien les comprendre pour pouvoir attendre le Seigneur de manière adéquate et ne pas rater la rencontre.

Il est venu

Il a déchiré les cieux, et il est descendu, lui le propre Fils de Dieu. Il a aboli toute ­distance entre le ­Créateur et les hommes créés, en prenant chair de la chair de Marie ; et il a traversé l’écran de notre péché pour nous faire entendre sa voix de tout près, à l’intérieur de nous-mêmes. C’est ainsi, disait le prophète, que Dieu agit envers l’homme qui espère en lui. Il vient à la rencontre de celui qui « pratique la justice » au sens biblique (que nous précisons plus bas) et qui se souvient des voies du Seigneur, c’est-à-dire des chemins qu’il aime nous voir prendre.

Le prophète Isaïe a trouvé deux images extrêmement fortes pour décrire notre état de pécheurs : d’une part, toutes nos belles actions sont du linge souillé ; d’autre part, nous-mêmes sommes comme des feuilles tombées, sèches, inertes, vaines, désertées par la vie, et la seule chose qui nous soulève encore, c’est la bourrasque du péché. Or le vent qui chasse les feuilles ne leur redonne jamais la vie ; il les emporte seulement un peu plus loin, toujours aussi sèches, inutiles et déçues. Mais Dieu, lui, connaît le secret du véritable dynamisme, il refait du neuf avec nos vieilleries, il nous fait vivre « plus haut que ce qui meurt » (sainte Élisabeth de la Trinité). Nous sommes l’argile, et lui, le Grand Artiste, le potier inventif ; nous qui sommes tous l’ouvrage de ses mains. Or des mains de Dieu ne sort que la beauté !


Il est venu - Il vient

Il vient chaque jour à nous, offrant son amitié, son Corps et son Sang, et toutes les ­richesses dont parle saint Paul aux chrétiens de Corinthe, toutes celles de la connaissance de Dieu. Il vient à nous avant tout par son Esprit qui nous est donné pour connaître les dons que Dieu nous a faits, toutes ces merveilles de délicatesse et d’amour rédempteur qui sont encloses dans le cœur de Dieu et qui transfigurent peu à peu notre propre cœur. Dans la mesure même, nous explique saint Paul dans notre deuxième lecture, où le témoignage du Christ a pris en nous de la fermeté, donc dans la mesure où nous vivons en cohérence avec l’appel et l’amour de Jésus, nous ne manquerons, en Église, d’aucun don de l’Esprit, dans l’attente où nous sommes de la Révélation, de la ­manifestation ultime de Jésus qui est pour nous Seigneur.


Il est venu dans l’humilité
il vient dans l’intimité
il viendra dans sa gloire

Et qu’est-ce que la gloire, pour Jésus ­ressuscité, sinon le mystère indicible de son unité avec le Père, la densité de vie et de bonheur qu’il a en commun avec le Père, et l’éclat de sa sainteté de Fils, insoutenable pour nos yeux de chair ? Nous attendons de voir se révéler notre Seigneur Jésus Christ, dit encore saint Paul. Ce que nous guettons ainsi, de toute la force de notre espérance, c’est le jour de notre Seigneur Jésus Christ, le jour du grand dévoilement, de l’immense surprise, où un nouveau regard nous sera donné pour voir enfin en Jésus Christ ce qu’il est depuis toujours, pour admirer et adorer éternellement la gloire de Dieu sur la Face du Ressuscité.

Ce jour viendra ; Dieu l’a promis, et il est fidèle, lui qui nous a appelés à vivre en communion avec son Fils. Ce jour viendra, mais nous n’en savons ni le jour ni l’heure, et il viendra pour ceux qui seront éveillés, tout éveillés dans leur espérance. Or ce qui nous tient en éveil, c’est la fidélité, l’amour qui dure, qui résiste au temps, et qui se monnaye dans l’espace d’une vie. Dieu n’a pas d’heure, et le Fils de Dieu, le maître de la maison, n’a pas non plus d’heure pour venir. C’est bien pourquoi, dans la prière et le service, nous le guettons à toute heure, le soir, à minuit, au chant du coq ou au matin. « Veillez », nous dit Jésus ; et quand il viendra, pour nous tous et pour chacun de nous, il veut avoir la joie de nous dire : « C’est bien ; tu m’attendais ! »

II - Méditation : veiller avec Joseph le Juste

Pour entrer dans la vigilance propre à l’Avent, continuons à regarder Joseph. C’est lui qui a été, avec Marie, le témoin de la venue secrète de Dieu. Comment s’y est-il préparé ? En pratiquant la justice, en ­devenant juste. Mais que signifie être juste ?

Dans l'Ancien Testament et souvent dans le Nouveau, être juste, c'est s'ajuster au vouloir de Dieu, c'est, en quelque sorte, la sainteté au quotidien ; et cela résume bien la vie de Joseph. L'épisode où l'Évangile le décrit comme "juste", c'est sa découverte que Marie attend un enfant (Mt 1,18-25).

« Voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint. Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret. Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : "Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le Seigneur sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés." Tout cela est arrivé pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète : "Voici que la Vierge concevra, et elle enfantera un fils ; on lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : Dieu-avec-nous." Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse, mais il ne s’unit pas à elle, jusqu’à ce qu’elle enfante un fils, auquel il donna le nom de Jésus. »

Une ombre s'est glissée dans le bonheur de Joseph. Désormais Marie est perdue pour lui : il va se retrouver seul, et elle aussi sera seule pour toujours. Tout cela est si inattendu, si mystérieux et si incroyable que Joseph ne sait plus que faire ; mais c'est là que sa sainteté et sa sagesse spirituelle apparaissent en pleine lumière. C'est là qu'il réagit en homme juste, pleinement ajusté au vouloir de Dieu. Dans l’incertitude, sa première réaction est de s'arrêter à la solution la plus respectueuse de la personne de Marie. C'est le réflexe d’un homme bon, au cœur grand. Il respecte trop Marie pour la vouer à la réprobation de tout le village, et il respecte trop la loi de Dieu pour fonder un foyer sur des bases aussi incertaines. Il va donc simplement, mais la mort dans l'âme, rendre à Marie sa liberté. Cette grandeur d’âme de Joseph s’enracine en Dieu, et Dieu vient au-devant de son serviteur : il lui révèle son dessein. Dès lors tout s’éclaire : Joseph comprend le silence de Marie, il saisit d’une seule intuition de foi ce que Dieu attend d'elle et ce que Dieu attend de lui. Dieu, de nouveau, les réunit pour les insérer tous deux au cœur de l’histoire du salut. Elle donnera au Messie sa chair et ses traits ; lui, fils de David et charpentier, sera là pour lui donner légalement un nom dans la lignée royale de David.

Respect maximum des personnes, accueil docile des initiatives de Dieu : telles ont été les réactions de Joseph devant le mystère de la maternité de Marie. Et c’est bien ainsi qu'il nous faut à notre tour approcher du mystère de l'action de Dieu en nous, chez les autres et dans le monde. C'est bien ainsi qu'il faut nous situer, dans la foi, face à la venue du Fils de Dieu. La maternité de Marie a été depuis le début enveloppée de silence, comme toutes les grandes œuvres de Dieu, et ce silence qui voile l'incarnation de Jésus, personne jamais ne pourra le percer. Il nous faut, comme Joseph, y entrer par le oui de l'adoration ; dès aujourd'hui il nous faut être avec lui, et contempler la gloire que Dieu lui a donnée (Jn 17,27).

Joseph reçoit cependant une mission : « Tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le Seigneur sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » Dans le peuple juif, le nom indique ce qu'est et ce que doit faire un homme selon le dessein de Dieu. C'est à la fois un résumé de la personne et un programme de vie : l'enfant à naître viendra libérer. Libération d'ordre moral et spirituel, libération universelle, qui s'adressera à tous ceux et à toutes celles qui, par la foi, deviendront les enfants d'Abraham. Le titre ­d'Emmanuel, venu d'Isaïe (7,14), constitue lui aussi un programme, une mission : ce Jésus sera « Dieu avec nous », Dieu présent dans l'histoire des hommes, Dieu prenant fait et cause pour réussir l'homme, Dieu cheminant avec les hommes pour se les réconcilier. Et ce titre d'Emmanuel, Jésus le ­revendiquera solennellement au moment de quitter ses disciples, et après les avoir envoyés à toutes les nations : « Voici que moi, je vais être avec vous jusqu'à la fin du monde » (Mt 28, 20).

Mais ce nom ne sera pas préféré librement par Joseph, car le véritable Père, c'est Dieu. Joseph donnera le nom choisi et donné par Dieu. C'est Dieu qui crée l'événement en intervenant dans la vie de Joseph et en lui découvrant l'essentiel de son plan. Dieu a parlé : aussitôt Joseph infléchit sa route ; il ne craindra plus d'accueillir Marie, son épouse, et il va avoir un rôle irremplaçable dans l'avènement du Messie.

Grâce à lui, en effet, grâce à son obéissance de serviteur, l'enfant à naître sera légalement rattaché à la lignée de ­David ; grâce à son ajustement à la volonté du Père, en Jésus de Nazareth on pourra reconnaître le Christ de Dieu.

Frères et sœurs, cette semaine, cherchons à nous placer à l’école de Joseph pour apprendre à nous ajuster sans cesse à la venue imminente de Dieu. Entrons dans la grande attente du temps de l’Avent !

Fr. Jean Lévêque,
ocd, Province de Paris

III - Prière de la semaine

Tu reviendras, Seigneur, pour nous prendre avec toi dans la maison du Père où tu fais ta demeure ; tu es venu pour nous, vivre parmi les tiens et pardonner sans cesse à tous ceux que tu aimes ; viens en nous chaque jour dans ton Eucharistie, donne-nous d'espérer et de faire confiance, toi qui n'as pour chacun que des pensées de paix.

Envoie-nous ton Esprit et verse en nous ta joie. Toi qui es le Chemin, la Vérité, la Vie, apporte à tous les cœurs le goût de te servir. Si la souffrance est là, qui nous fait t'oublier, si le doute nous ronge et cache ton amour, redis-nous ta présence, réchauffe l'amitié, restaure le bonheur ; "tu viens pour tout sauver".

IV - Pistes de mise en pratique pour cette semaine

La réalité du retour du Christ : ai-je vraiment intégré cette affirmation de foi ? En suis-je comme déstabilisé ? Il ne faut pas avoir peur de la fin de notre monde. Ce ne sera pas une apocalypse-catastrophe, mais une apocalypse-dévoilement : Jésus dévoilera sa gloire auprès du Père. Le Seigneur reviendra, et sa miséricorde aura le dernier mot.

Devenir juste chaque jour : entre ce qui est "déjà" advenu du Royaume des cieux et ce qui n’est "pas encore" accompli, il y a le quotidien : c'est là que le Seigneur nous attend. C’est ici et maintenant que nous devons nous ajuster à la volonté de Dieu.

L’amour de charité fait la valeur de ma vie : tout passe mais la charité demeure. Est-ce que cette certitude me convertit ? Une journée sans amour est une journée perdue, dans mon pèlerinage vers Dieu. Puis-je essayer cette semaine de vivre selon cette vérité ?

Prière de la communauté

Je vous salue Joseph

Je vous salue Joseph, vous que la grâce divine a comblé. Le Sauveur a reposé dans vos bras et grandi sous vos yeux. Vous êtes béni entre tous les hommes et Jésus, l’enfant divin de votre virginale épouse est béni. Saint Joseph, donné pour père au Fils de Dieu, priez pour nous dans nos soucis de famille, de santé et de travail jusqu’à nos derniers jours et daignez nous secourir à l’heure de notre mort. Amen.

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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Avent 2017 : Avec Saint Joseph

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