Jour 6 - L'Amitié

Droits réservés Abbaye de Boulaur
« [J'ai] une Reconnaissance à en crever pour vous deux, pour chacun de vous, X. et Y., pour Dieu qui vous a faits, vos parents et vos amis qui vous ont faits aussi, pour les amis de ces derniers qui ont permis, en les faisant, de faire qu'ils vous fassent, donc pour l'humanité entière qui est charnellement vraiment comme moi, et tous les Saints qui, au fond, doivent être assez proches de nous, et les anges donc… » (le 11 novembre 1974, à 21 ans, à un couple d'amis).
Méditation
Dès le début de sa vie, Claire a la chance d'être très bien entourée et comblée par ses relations. Dans sa famille, d'abord, puis dans les amitiés qu'elle cultive. Ses lettres témoignent de relations belles, profondes et enrichissantes. Ces amitiés, pour la plupart nouées au collège, sont évidemment peu nombreuses mais précieuses pour sa construction. Il est touchant de voir à quel point elle est capable d'ouvrir son cœur à ses amies.
Elle n'hésite pas à leurs parler de sa relation au Christ, de ses joies, des garçons dont elle est amoureuse mais aussi de ses mouvements d'humeurs, de ses difficultés et de ses doutes.
Elle demande des conseils et des prières. Elle est elle-même bonne conseillère. On voit déjà dans ses lettres son envie de transmettre sa vocation à la joie : « “Sois gaie et indulgente”, me disait Papa tous les lundis matins : je me permets de te le souhaiter très vivement » (lettre à une amie du 3 janvier 1972) ou encore « Je souhaite que la Paix, bien que douloureuse que je lis dans ta lettre, tu la possèdes dans la vie de tous les jours, car, si j'en crois mon expérience, c'est bien difficile : pour s'encourager et forcer la main du bonheur et de la paix, presque on se l'invente un peu » (lettre à une amie du 24 juin 1974).
En espérant ne pas parler « comme une bonne sœur », on voit à quel point l'amitié signifie pour elle prendre soin d'un autre cœur, d'une autre âme.
Au-delà de ces amitiés, Claire veut aussi être l'amie de tous, à l'image du Christ. Elle fait ainsi le choix d'aimer des filles qui lui sont peu sympathiques, « celles qu'on ne peut pas piffer » (journal intime du 26 novembre 1966, à l'âge de 13 ans). Avec son caractère passionnée, cela ne fait pas sans combat car si elle capable d'aimer, elle peut aussi rejeter vivement des personnes, comme des jeunes filles au collège, ou sa voisine de chambre lorsqu'elle est étudiante à Toulouse…
Elle arrive tout de même à écrire : « Aidez-moi à aimer X. Elle a peut-être des défauts, mais elle a sûrement des qualités que peut-être elle ne développe pas mais elle en a comme tous les autres hommes. Et moi, pécheresse, je ne vois que ses défauts. Mais Jésus Chéri, Doux et humble de cœur, qui avez aimé les hommes jusqu'au plus méprisant, avec Vous, avec Vous seul, j'arriverai à l'aimer, ça sera dur, mais j'y arriverai, si je ne l'aime pas, si vraiment je ne peux pas, je ferai comme si et je me dirai qu'elle vaut certainement plus que moi, alors je l'aimerai. » (le 23 novembre 1966, à 13 ans, à propos d'une camarade de pension, dans son journal intime).
En arrivant à Rome, Claire est pour la première fois vraiment confrontée à des personnes athées. Loin du cocon familial et de ses précieux soutiens, elle est déboussolée. Lors de la première année d'étude au Restauro, elle fait la connaissance d'un groupe de jeunes filles loin de sa Foi mais très sympathiques. L'une d'entre elle l'impressionne particulièrement par sa prestance, sa générosité, son intelligence. Mère Emmanuelle Desjobert écrit : « Elle s'embarque dans cette relation sans frein ni recul, additionnant toute l'intensité dont son cœur est capable, son besoin d'être rassurée dans une période difficile et un grand désir de communion, en écho avec la qualité d'amitié vécue avec ses amis de collège. Bien vite, elle y perd sa liberté intérieure et se laisse prendre dans une effervescence excitante [...] Sa vie spirituelle et ses études en pâtissent dangereusement. » (Mère Emmanuelle Desjobert, Prier 15 jours avec Claire de Castelbajac, p. 79, Edition Nouvelle Cité).
Au bout d'un an, cette jeune fille lucide, percevant le décalage entre leurs attentes mutuelles et leurs aspirations de vie, agacée par les tentatives de Claire de la convertir, met fin à leur amitié par une discussion douloureuse. Pour Claire, c'est une très grande épreuve ; la blessure reste vive pendant plusieurs mois apportant son lot de tristesse, de colère et de rancœur. Elle demande l'aide de ses amis du Ciel et de la terre pour retrouver la paix. La relation ne sera pas renouée mais très lentement, Claire se reconstruit. C'est lors d'une excursion avec des amis de sa cousine, des gens « purs, sains, pleins de la joie de Dieu » (lettre à une amie du 23 mai 1975) qu'elle retrouvera sa vraie joie de vivre. Plus tard, avec une très belle ouverture du cœur, Claire sera en capacité de relire ce passage douloureux, de comprendre sa responsabilité.
Pour le moment elle a compris ce dont elle a vraiment besoin pour équilibrer son besoin débordant d'aimer et surtout pour vivre sa vocation à la joie sur la terre : s'entourer de personnes qui vivent elles aussi complètement de Dieu.
Proposition de réflexion
Les amitiés sont des cadeaux précieux dont a besoin chaque femme tout au long de sa vie et particulièrement au moment de l'adolescence. Comme Claire, je peux rencontrer plusieurs types d'amitié. Est-ce que j'arrive à faire la différence entre celles qui me font grandir et celles qui m'empêchent de garder mon jardin secret, de cultiver ma propre personnalité ?
Défi du jour
Aujourd'hui, je prends le temps de rendre grâce pour les amies qui m'entourent. Je peux même écrire une lettre à une amie dans laquelle je lui dis ce que j'apprécie chez elle et combien notre amitié m'est précieuse.
Je peux faire une liste des amies sur lesquelles je peux m'appuyer : celle qui m'écoute ou me console, celle qui me conseille, celle qui me fait rire...