« Voir avec l’intelligence, [à travers les œuvres de Dieu], ce qui de lui est invisible. »
(Rm 1, 20)

     Cette parole de saint Paul pourrait être le résumé de toutes les œuvres de sainte Thérèse d’Avila dont nous faisons mémoire aujourd’hui.

     En effet si dans un premier temps, c’est à travers la Création que nous voyons la présence invisible du Créateur, un cœur à Cœur plus intime nous permet de dépasser cela pour nous unir à Dieu sans intermédiaire visible. L’oraison est « un échange d’amitié où l’on s’entretient souvent seul à seul avec Dieu dont on sait qu’Il nous
aime. » (Ste Thérèse d’Avila) ; c’est être attentif à sa présence. Une présence intime et chaleureuse, quoique pas toujours sensible. Cependant, pour franchir un certain
« abime », outre la fréquentation des sacrements, l’adoration eucharistique ou bien la pratique la charité fraternelle, il est nécessaire, même pour pratiquer tout cela d’une manière profonde et harmonieuse, de faire au moins un quart d’heure d’oraison par jour. C’est une dose homéopathique que nous propose le Saint Esprit, afin que nous y prenions goût, et que toutes nos œuvres intérieures ou extérieures soient imprégnées de cette saveur divine. Évidemment il ne s’agit pas d’une obligation, d’un compte d’apothicaire, mais cela signifie que durant ce quart d’heure, si nous ne mettons pas d’obstacles à son action, Dieu agira en notre âme.

     « La colère de Dieu se révèle du haut du ciel contre toute impiété et contre toute injustice des hommes qui, par leur injustice, font obstacle à la vérité. » (Rm. 1, 18) Par ces termes saint Paul nous signifie l’une de ces actions en notre âme. C’est-à-dire que petit à petit Dieu créer des brèches en notre cœur afin que sa Lumière et son Amour nous purifient de toutes nos iniquités, de nos ténèbres, de nos erreurs. Voilà une bonne « méthode » pour faire son examen de conscience avant d’aller se confesser. Ce n’est pas seulement faire une liste plus ou moins exhaustive de nos péchés en faisant une liste comme on ferait une liste de courses, non ! c’est d’abord Le regarder Lui et se laisser toucher par la blessure que nos péchés Lui infligent. Dieu ne s’impose pas à nous, Il se propose, Il mendie notre amour tel un amoureux transi. C’est pourquoi nous avons cette liberté incroyable et dangereuse, de pouvoir Lui résister et de ne pas vouloir de sa Vérité, de Le refuser, Lui, qui se révèle ainsi Lui-même « Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (St Jn 14, 6), mais alors Il se retire et nous laisse comme livrés à nous-mêmes et les « soi-disant sages deviennent fous ». (Rm. 1,22)

     Traditionnellement, ce chemin nous est présenté comme une montagne à gravir ; citant le psaume 67 saint Louis-Marie Grignion de Montfort compare la sainte Vierge Marie, à la montagne de Dieu, la montagne fertile : mons Deis, mons pinguis, où nous devons demeurer, « afin d'y devenir des rois de l'éternité par notre mépris de la terre et notre élévation en Dieu. » Cela est bien vrai, nous devons demeurer en la Vierge Marie pour qu’Elle nous apprenne cette prière silencieuse du cœur. Sa douce présence peut être pour nous très rassurante si la vue de notre misère profonde nous fait peur car Elle seule possède l’art et la manière de nous la faire admettre, Elle est comme un filtre qui permet que nous ne soyons pas totalement aveuglés et brûlés par la lumière divine. Cependant ne nous y trompons pas et n’oublions pas ce dialogue fabuleux entre sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et une de ces novices qui se décourageait et soupirait “Oh quand je pense à tout ce que j’ai à acquérir pour devenir sainte ! » et Thérèse de lui répondre: “Dites plutôt à perdre ! C’est Jésus qui se charge de remplir votre âme, à mesure que vous la débarrassez de ses imperfections. Je vois bien que vous vous trompez de route ; vous n’arriverez jamais au terme de votre voyage. Vous voulez gravir une montagne et le Bon Dieu veut vous faire descendre ; il vous attend au bas de la vallée fertile de l’humilité”.

     Ne soyons donc pas comme le pharisien de l’Évangile de ce jour à qui Jésus adresse ce reproche : « Bien sûr, vous les pharisiens, vous purifiez l’extérieur de la coupe et du plat, mais à l’intérieur de vous-mêmes vous êtes remplis de cupidité et de méchanceté. » (St Lc.11, 39), ne mettons donc pas notre confiance en nos actions extérieures comme des personnes satisfaites d’elles-mêmes car alors Jésus pourra nous dire « En vérité je ne vous connais pas » (Mt 7, 23) mais laissons Jésus allumer en notre âme ce Feu qu’Il est venu jeter sur la terre et qu’Il désire de tout son Être divin voir brûler en nous (Lc 12,49). Amen.

Résolution : À partir d’aujourd’hui, faire un quart d’heure d’oraison tous les jours.