Toute une vie à Gethsémani

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Chers compagnons de prière,


Pour ouvrir nos coeurs au destin douloureux auquel Padre Pio a consenti en union à Jésus, écoutons  quelques lignes de Gilbert Cesbron : “Heureux ceux qui vivent dans le soleil de Pâques ! Moi, je retourne sans cesse à mes ténèbres : je ne puis sortir de cette nuit du jeudi au vendredi parce que c'est à elle que le monde ressemble. [...] Chrétien sans espérance, chrétien indigne, que la vue d'un petit enfant et le chant d'un oiseau suffisent pourtant à sauver du désespoir. Ainsi, je marche vers la mort, de chute en relèvement. Mais, qu'a-t-Il fait d'autre dans la montée du Golgotha ? Porte ta croix et elle te portera : comme l'oiseau porte ses ailes qui le portent…”


Dans les mots et la sensibilité qui sont les siens, Padre Pio, aux prises toute sa vie avec un même sentiment d’indignité que celui que nous exprime Gilbert Cesbron, parle d’une succession permanente de “grandes voluptés spirituelles et de grandes désolations spirituelles”. 


Mettons-nous à l’écoute de cet itinéraire fait de souffrance intérieure

Gardons-nous de tenter de comprendre ce chemin de vie extraordinaire, gardons-nous de le réduire aux schémas de notre pauvre compréhension : écoutons humblement ce que cet itinéraire intérieur nous dit de Padre Pio, et laissons vibrer ce que Padre Pio nous y transmet.


Les souffrances intérieures de Padre Pio sont telles durant l’année 1918 qu’il pense être l’objet de la justice divine qui le punit de son indignité. Alors que de grandes grâces lui ont été données, comme des visites et locutions de Jésus, il vit en effet un long abandon de la part de Dieu, et ce Silence après la Présence est d’autant plus douloureux. Padre Pio ressent une faim inextinguible, la “faim du retour de [s]on Dieu dans [s]on âme”. Son directeur spirituel, le Père Benedetto, saura lire dans l’itinéraire intérieur de Padre Pio l'empreinte de ce qui sera l’itinéraire privilégié de son âme. Il lui écrit ainsi : 

“Les assurances sont noyées dans la furie des angoisses et des tourments parce que Celui qui est tout-puissant sait détruire la lumière et les impressions de réconfort, et cela précisément parce que l’âme doit rester tourmentée : après la goutte de miel, il lui faut continuer à déguster le calice de Gethsémani.


Sa vie durant Padre Pio goûtera le calice de Gethsémani, par et dans l'amour pour Jésus et ses frères. La désolation intérieure ne lui sera en effet jamais retirée, elle reviendra tout au long de sa vie au sein même de sa communion extraordinaire avec Jésus : elle sera le ressort profond d’une souffrance intérieure qui le fait sans cesse s’unir plus profondément à Jésus dans une relation vivante, ancrée dans la chair et dans le monde.

Au sein de l'union qu'Il donne, Dieu doit en effet sans cesse se retirer, pour rendre l'âme au monde. Padre Pio a vécu toute la douleur d'être de la terre et du ciel, d'avoir à vivre sur terre quand on est du ciel. "Dieu attire à Lui l'âme qui est sienne, mais Il la repousse parce qu'elle n'est encore que pèlerine. Qui pourrait vivre si l'attirance persiste ? Donc, tant que tu es exilée, ne te plains pas de ne pouvoir embrasser pour toujours le Bien Suprême" (lettre à une fille spirituelle, 5 février 1919)


Gethsémani

Comme le dit avec sensibilité Benoît XVI dans ses catéchèses, à Gethsémani, dans sa prière, Jésus "s’est fait pont entre la terre et le ciel". C’est toute la destination de la vie de Padre Pio, qui sa vie durant s'est fait pont entre Dieu et les hommes. Écoutons-le parler de ce moment si dense et magnifique dans lequel Jésus s'est offert au Jardin des Oliviers pour nous réconcilier Dieu :

“Souvenez-vous du vrai Jacob (Jésus) qui prie dans le Jardin de Gethsémani ; souvenez-vous que là, Il nous a découvert la vraie échelle qui relie la terre au Ciel. Il nous a appris que l’humilité, la contrition, la prière font disparaître la distance qui existe entre l’homme et Dieu et font descendre Dieu jusqu’à nous et élèvent l’homme jusqu’à Dieu” . (lettre 7 septembre 1915)


à Gethsémani Jésus a fait disparaître toute distance entre la volonté du Père et la sienne. Dans sa prière il est passé du fait de consentir à la Passion comme volonté de Dieu, par amour pour le Dieu-Père, au fait d’aimer la Passion dans l’amour du Père et dans l’amour des hommes que le Père lui donne.


Cette force d’aimer le destin, Jésus nous la donne au Jardin des Oliviers. Méditons le texte rédigé par Padre Pio pour le mystère douloureux de l’agonie de Jésus à Gethsémani : 

“Ô Jésus, agonisant dans le Jardin des Oliviers, mets en nous la force de surmonter les abandons et les désolations du coeur, et donne-nous le regret d’avoir offensé Dieu”.

Prenons un temps de silence. Laissons ces mots de Padre Pio résonner en nous et nous mettre en chemin vers l’union à Jésus que Padre Pio a si bien su incarner pour nous.



Mettons-nous en chemin vers l’union au Christ

Padre Pio nous montre et nous trace un chemin d’humilité, dans la conscience de notre indignité qui est creusée en nous par les inévitables et nécessaires périodes de désolation spirituelle, d’abandon de Dieu. L’itinéraire spirituel de Padre Pio nous montre en effet comment l’infini, pour toucher et habiter les créatures finies que nous sommes, doit sans cesse se retirer à nous : se retirer de nos coeurs trop étroits, de nos âmes trop fermées pour le recevoir. Sachons voir le travail en nous de l’infini dans ce que nous ressentons comme des temps de sécheresse ou d’abandon, sachons déceler la présence de l’infini dans ses absences, y voir la marque de notre propre petitesse, et aimer l'abandon lui-même que Dieu nous donne à vivre.


Mettons-nous sous la direction spirituelle de Padre Pio. Écoutons-le diriger ses fils et filles spirituelles dans leurs désolations :

“Aime ton abjection. Si tu es humble, tranquille, douce, pleine de confiance au milieu de ces impuissances, si tu ne t’impatientes pas, si tu ne fais pas trop attention à toi, si tu ne te troubles pas de tout ce que tu vas souffrir, mais si, de bon coeur - je ne dis pas allègrement - mais franchement et fermement, tu embrasses toutes les croix, si tu te contentes de rester dans les ténèbres de l’esprit que t’enverra le Ciel, alors, tu aimeras ton abjection.

Et que veut dire “abjection”, sinon “obscurité” et “impuissance”. Aime à être dans cet état par amour de Celui qui le veut ainsi, et tu aimeras ta propre abjection qui est le degré le plus élevé de l’humilité.”


Laissons-nous mener à l’union à Jésus au coeur de nos désolations, et pour cela allons à Gethsémani :

“ Prenez donc courage, même lorsque vous vous sentez opprimé par la multitude et l’horreur de vos fautes. Allez donc, plus que jamais, aux pieds de Jésus-Christ qui lutte, qui agonise pour vous dans le Jardin ; humiliez-vous, pleurez, suppliez avec Lui, comme Lui, et demandez à grands cris qu’Il vous aide toujours à marcher devant Lui. Faites cela et ne doutez pas ; ce Dieu miséricordieux et clément vous tendra comme toujours sa main secourable pour vous relever de votre misère, de votre désolation spirituelle.” (lettre du 7 septembre 1915)



Acceptons d’être en chemin toute notre vie

Le retour permanent de la désolation est la marque que nous ne posséderons jamais le souverain Bien. Nous ne serons jamais qu’en quête de Dieu. Ouvrons nos âmes au fait que cette quête permanente est en elle-même une grâce.

Laissons-nous initier par Padre Pio au renoncement à posséder Dieu, qui nous mène à Dieu : 

“Je l’affirme, en renonçant à toutes mes volontés, à tout ce que je sais, à mes goûts et à mes connaissances : j’affirme que je suis le fils très obéissant de mon directeur spirituel, même au plus fort des rigueurs du Très-haut. Quoi de plus ? Mon Dieu ! Il y a beaucoup : je te demande la force de souffrir, dénué de tout réconfort. [...] Quant à moi, je m’efforcerai de chercher quelque répit à mon insupportable souffrance sur ce lit d’épines acérées et cruelles, en recevant de tes mains, pour toute nourriture, ton rejet et ton abandon.

Je suis perdu, oui, perdu dans l'inconnu. Je suis privé de tout. ...

Mon Dieu ! Ce cri est tout ce qu'il me reste dans une telle souffrance...

Je ne cesserai jamais de m'immoler constamment à ce Dieu que j'ai perdu.” 

(lettre au Père Benedetto 4 juin 1918).

Ce renoncement sublime fait de Padre Pio un formidable passeur de Dieu : tout ce qu'il reçoit de Dieu il le donne à ses frères d'exil, chaque grâce reçue, chaque marque d'amour, déborde de son coeur dédié à ses frères, au point que Padre Pio n'en garde rien pour lui, si ce n'est la souffrance du manque et de l'abandon qui s'ensuit. Padre Pio a fait le choix d'amour insensé de ne posséder pas même l'amour et les grâces donnés par Dieu : il a tout redonné à Dieu en se faisant passeur de Dieu pour nous. Ce renoncement  né d'un amour fou, cet amour pour Dieu purement gratuit, l'amèneront à cette union totale, incommensurable à Jésus tel qu'Il s'est offert pour nous à Gethsémani et sur la Croix.

Ô Padre pio, communique-nous cet amour fou pour Dieu qui t'a tant coûté et par lequel tu nous as tant donné.


Padre

Au plus près de l’imitation de Jésus, Padre Pio a toute sa vie tendu sa main secourable aux pécheurs les plus éloignés de Dieu, qui retrouvaient le chemin de la foi par la force de la messe de Padre Pio et par l’acuité de ses confessions. Cette force intérieure qui a fait de Padre Pio l’incarnation mystique de Jésus lui a été donnée dans le calice de Gethsémani auquel Padre Pio a plus que consenti, qu’il a aimé pour nous. Si nous sommes nombreux à continuer à invoquer Padre Pio sous le nom de “Padre Pio” plutôt que sous son nom officiel de saint Pio de Pietrelcina, c’est peut-être parce qu’il nous a aimé comme un père.

Au commencement de sa nuit de douloureuse prière au Jardin des Oliviers, Jésus demanda à ses disciples les plus proches de “veiller et prier”, mais ils furent bien incapables de s'unir à Lui dans la prière et de maintenir leur veille malgré les demandes répétées de leur maître souffrant. En repartant du Jardin au terme de son offrande, Jésus leur dit : “dormez maintenant”. Ce “dormez maintenant” m’a toujours bouleversée, j’y entends l'amour plein de sollicitude d’une mère qui dit à son enfant malade “dors”, car elle sait qu’elle veillera auprès de lui toute la nuit pour surveiller sa température et le soigner, j’y entends l'amour plein de dévouement d’un père qui prend le temps de jouer avec ses enfants le soir et ne se met à ses tâches qu’une fois qu’ils sont couchés. C’est de cet amour tout de sollicitude et de dévouement que, dans l’union à Jésus s'offrant à Gethsémani, Padre Pio nous a aimés. Alors, tels les enfants malades que nous sommes, acceptons ce don d’amour qu’il nous fait, cet amour qu’il nous transmet, et puisons-y la force de guérir.


Ne désespérons pas du fait de nos désolations, de nos indignités, parce que Padre Pio est là. Ne désespérons pas parce que si Padre Pio est là pour nous c'est que Jésus est là, a toujours été là et sera toujours là : à nos côtés dans notre monde par ses saints et par Marie, présent au plus profond de notre âme par le coeur à coeur à son coeur transpercé. N’oublions jamais la prière de Jésus à Gethsémani, son amour infini pour le Père qui lui fait aimer la Passion consentie pour nous. Au coeur de nos désolations allons à Gethsémani nous unir à la prière souffrante de Jésus où éclate tout son amour.


Dans nos moments d'impuissance rappelons-nous toujours comment Padre Pio a été amené à l’union à Jésus dans l’expérience de son néant et de son impuissance. Rappelons-nous que cette union n'a pu s'épanouir en lui que quand il lui a été donné de vivre avec l’impression que le ciel s’était fermé pour lui, alors même que les assauts de Satan semblaient redoubler. Cette union n'a pu s'épanouir en lui que quand il a fait l’expérience abyssale de l’impuissance de sa volonté face à Satan (lettre au Père Benedetto du 1247) et qu'il a renoncé à toute possession, à toute maîtrise : l'âme écrasée dans la poussière il a alors rejoint la prière de Jésus à Gethsémani et a trouvé le chemin merveilleux de consentir à son destin par amour de Dieu, pour arriver dans l’oraison à aimer son destin.

Écoutons les mots simples et immenses de sa dernière lettre à son directeur spirituel : “ma position n’est quasi plus soutenable. Du reste, que soit toujours faite sa divine volonté.”



Suivons Padre Pio dans sa confiance au sein de l’itinérance permanente qui fait partie de notre exil :

“Dieu sait ce qui arrivera. Quand je mesure mes forces à l’aune de Celui qui me réconforte, il me semble être prêt à tout affronter pour Jésus. Laus Deo (louange à Dieu).” (extrait du dernier écrit connu de Padre Pio)



Prière de la communauté

"Ta Croix, ô Jésus, résume les souffrances du monde" Prière de Benoît XVI

Dieu notre Père, nous contemplons dans la Croix de ton Fils les plaies de sa Passion glorieuse, chemin qui conduit chaque baptisé à une union profonde, intime, par cet acte suprême d'Amour. Ta Croix, ô Jésus, résume les souffrances du monde. Elle est surtout le signe tangible de ton Amour, mesure de la Bonté du Père envers l'homme blessé par le péché ; voie de sanctification pour qui cherche ton Visage. Ce n'est qu'en se laissant illuminer par la Lumière de ton Amour que l'homme et la nature entière peuvent être rachetés, que la beauté peut finalement refléter la Splendeur de ton Visage, comme la lune reflète le soleil. En jaillissant de la Croix glorieuse, ton Sang recommence à vivifier les os desséchés de l'Adam qui est en nous, pour que chacun retrouve la joie de se mettre en marche vers la sainteté. Que cet Amour nous ravisse ô Jésus, rende notre cœur humble, pour être intimement configuré à Toi par les larmes de la prière, cette participation intérieure de notre amour répondant à ton Amour. Ainsi soit-il.

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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