J32 - Cinquième dimanche - Commencez toujours !

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 Méditation biblique : Lecture du livre d'Isaïe 43, 16-21

 

16 Ainsi parle le Seigneur, lui qui fit une route à travers la mer, un sentier au milieu des eaux puissantes, 17 lui qui mit en campagne des chars et des chevaux, des troupes et de puissants guerriers ; et les voilà couchés pour ne plus se relever, ils se sont éteints, ils se sont consumés comme une mèche.

Le Seigneur dit : 18 « Ne vous souvenez plus d'autrefois, ne songez plus au passé. 19 Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ?

Oui, je vais faire passer une route dans le désert, des fleuves dans les lieux arides. 20 Les bêtes sauvages me rendront gloire, – les chacals et les autruches – Parce que j'aurai fait couler de l'eau dans le désert, des fleuves dans les lieux arides, pour désaltérer le peuple, mon élu. 21 Ce peuple que j'ai formé pour moi redira ma louange. »

 

1. Commentaire : « Voici que je fais toute choses nouvelles. » (Ap 21,5)

 

Le prophète des chapitres 40-55 du livre d’Isaïe (les exégètes le nomment le « deutéro-Isaïe ») a fort à faire pour réconforter ses contemporains qui connaissent la terrible épreuve de l’exil à Babylone. Il le fait si bien qu’on appelle son livre « le livre de la Consolation d’Israël » parce que le chapitre 40 commence par cette magnifique invitation : « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu ».

La première lecture de ce dimanche de Carême annonce un  nouvel Exode et s’ouvre par l’affirmation : « Ainsi parle le Seigneur, votre rédempteur, le Saint d’Israël. » Que signifie le titre de « rédempteur » ? Littéralement c’est le « racheteur ». Toute la terre est à Dieu. Aucune parcelle de la Terre ne peut être aliénée. Quand le peuple est devenu esclave de Babylone, le vocabulaire social du rachat d’un frère pauvre qui a dû aliéner sa liberté devient une métaphore adéquate. Le Seigneur se présente comme celui qui a « racheté » son peuple. Le premier Exode est celui qui raconte comment « le Seigneur fit une route à travers la mer, un sentier au milieu des eaux puissantes. » Dieu a fait échapper son peuple à l’esclavage des Egyptiens, lancés à la poursuite des fuyards. Le Seigneur « mit en campagne des chars et des chevaux, des troupes et de puissants guerriers ; les voilà tous couchés pour ne plus se relever, ils se sont éteints, ils se sont consumés comme une mèche. » Voilà donc l’œuvre du Dieu rédempteur dans le passé.

Cependant il est impossible de raconter le premier Exode sans nous souvenir du murmure du peuple devant la mer : mieux vaut être esclaves que mourir. « Ils dirent à Moïse : “L’Égypte manquait-elle de tombeaux, pour que tu nous aies emmenés mourir dans le désert ? Quel mauvais service tu nous as rendu en nous faisant sortir d’Égypte ! C’est bien là ce que nous te disions en Égypte : Ne t’occupe pas de nous, laisse-nous servir les Égyptiens. Il vaut mieux les servir que de mourir dans le désert !” Moïse répondit au peuple : “ N’ayez pas peur ! Tenez bon ! Vous allez voir aujourd’hui ce que le Seigneur va faire pour vous sauver ! Car, ces Égyptiens que vous voyez aujourd’hui, vous ne les verrez plus jamais. Le Seigneur combattra pour vous, et vous, vous n’aurez rien à faire.” » (Ex 14,11-14) L’Exode, ce n’est pas passer la mer qui s’ouvre devant vous ; c’est être prêt à mourir, c’est donner sa vie librement. Le prophète invite Israël à ne plus se souvenir d’autrefois. On ne peut pas mieux opposer le nouvel exode à l’ancien. Ce n’est pas une invention de la génération du Nouveau Testament. Le Nouveau s’insère complètement dans ces versets : « Voici que je fais un monde nouveau. »  Le premier Exode est la figure du deuxième Exode, celui qui est encore à venir, l’Exode espéré. La figure est moins que l’accomplissement. C’est ainsi que la ligne entre l’Ancien et le Nouveau Testament passe à l’intérieur de l’Ancien. Isaïe non seulement pose le rapport entre l’Ancien et le Nouveau, mais bien plus : il vit ce rapport. En quelque manière il est déjà présent au nouveau.  

A qui Isaïe promet-il un monde nouveau ? Au cours de la période difficile de l’Exil, au moment où on risquait de s’installer dans la désespérance, le prophète développe une nouvelle métaphore, celle du germe : « Il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? » Le mot « germe » est devenu un symbole d’espérance. Le même prophète avait déjà dit équivalemment la même chose au chapitre précédent : « Les événements passés, voici qu’ils sont arrivés. Les nouveaux, c’est moi qui les annonce ; avant qu’ils ne germent, je vous les fais connaître. » (Is 42,9).

Au verset 10 du chapitre 43, le prophète reprend les trois verbes propres à la culture juive dans sa relation avec Dieu : connaître, croire, comprendre. (Cf. Troisième dimanche de Carême) « Vous êtes mes témoins – oracle du Seigneur –, vous êtes mon serviteur, celui que j’ai choisi pour que vous sachiez, que vous croyiez en moi et compreniez que moi, Je suis. » (43,10) Le Seigneur est toujours à l’œuvre. Il nous reste à apprendre aujourd’hui à déceler les germes du monde nouveau, du Royaume que Dieu est en train de construire.  « Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? » (43,19). Il nous faut connaître, croire et comprendre les signes et les traces de Dieu aujourd'hui.

 

Exercice spirituel 

  « Je donne ma vie pour la recevoir de nouveau. » (Jn 10,17)

  « Jésus a fait l’expérience de la mort. C’est, par grâce de Dieu, au profit de tous…  Puisque les enfants des hommes ont en commun le sang et la chair, Jésus a partagé, lui aussi, pareille condition : ainsi, par sa mort, il a pu réduire à l’impuissance celui qui possédait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable, et il a rendu libres tous ceux qui, par crainte de la mort, passaient toute leur vie dans une situation d’esclaves…  Et parce qu’il a souffert jusqu’au bout l’épreuve de sa Passion, il est capable de porter secours à ceux qui subissent une épreuve. » (Hé 2,9.14-15.18)

Nous demandons à Dieu de connaître, croire et comprendre la sainteté et la révélation de sa gloire dans la charité de Jésus manifestée par sa passion et sa mort. C’est la prière de ce dimanche où nous entrons dans le temps liturgique de la Passion : « Que ta grâce nous obtienne, Seigneur, d’imiter avec joie la charité du Christ qui a donné sa vie par amour pour le monde. »

 

2.  Lettre d’Edith Stein

« Ma vie commence neuve chaque matin. »

Lettre du 12 février 1928 à sœur Callista Kopf  (Corresp. I, p. 369-371)

 

Contexte : La destinataire Elisabeth Kopf (1902-1970) fut préparée au baccalauréat par Edith Stein. Elle reçut le nom de sœur Calliste comme dominicaine en 1927. Edith Stein se réjouissait de « désormais fêter nos saints patrons l’une avec l’autre. » (Lettre du 12 octobre 1927) Edith (devenue Thérèse Hedwige depuis son baptême) fête Thérèse le 15 octobre. Saint Calliste est fêté le 14 octobre. Sœur Calliste était alors étudiante à Munich, avec deux autres jeunes dominicaines de celles qu’Edith aimait à appeler « mes grandes filles » puisqu’elle avait contribué à leur formation comme enseignante à Spire.

 « Je voudrais répondre à vos questions les plus importantes. Naturellement, la religion n’est pas à vivre dans  un petit coin tranquille, durant quelques heures, pour les grandes fêtes, mais elle doit, comme vous le ressentez vous-même, être racine et fondement de toute la vie, et ce pas seulement pour quelques élus mais pour tout chrétien véritable (assurément, il n’y en a toujours qu’un « petit troupeau »). C’est au contact de saint Thomas [d’Aquin] que j’ai vraiment compris qu’il est possible de pratiquer la science comme un service de Dieu. (…)

Et ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai pu me décider à reprendre sérieusement un travail scientifique. A l’époque qui précéda immédiatement ma conversion, et durant toute une période ensuite, j’ai pensé que vivre la religion signifiait faire abstraction de tout ce qui est terrestre pour ne vivre qu’en pensant aux choses de Dieu. Mais j’ai progressivement compris qu’il nous est demandé autre chose en ce monde et que, même dans la vie la plus contemplative, on n’a pas la droit de couper la relation avec le monde ; je crois même que plus on est attiré profondément en Dieu et plus il faut aussi, en ce sens, « sortir de soi », c’est-à-dire aller vers le monde pour y porter la vie divine.

Il importe simplement d’avoir dans les faits un coin tranquille où l’on puisse converser avec Dieu comme si absolument rien d’autre n’existait, et cela chaque jour : les heures matinales me semblent convenir pour cela, avant que le travail quotidien ne commence ; d’autant plus que l’on reçoit là sa mission particulière, au mieux aussi jour après jour, et que l’on ne choisit rien de soi-même, enfin que l’on se considère purement et simplement comme un instrument, et spécialement les facultés avec lesquelles on doit particulièrement travailler, à savoir, dans notre cas, l’entendement que nous considérons non pas comme ce que nous manions, mais ce que Dieu manie en nous. Vous avez là ma méthode… Ma vie commence neuve chaque matin et s’achève chaque soir ; nous ne devons pas faire de plans et de projets au-delà ; c’est-à-dire que cela peut naturellement faire partie de notre travail quotidien de prévoir − un enseignement par exemple serait sinon impossible − mais cela ne doit jamais devenir un « souci » pour le jour suivant. Vous comprendrez ainsi que je ne peux accepter que vous disiez que je  suis « devenue quelqu’un ». Il semble que la sphère de ma tâche se soit étendue [Edith commence à cette époque son activité de conférencière]. Mais cela ne change rien à ce que je suis, selon moi. »

 

Réflexion

 Quelle route le Seigneur a-t-il tracée pour moi malgré les difficultés ? De quels événements passés est-ce que je ne veux plus me souvenir ? Quel est le monde nouveau qui émerge actuellement ? De quelles choses inattendues suis-je le témoin ? Quelle relecture de l’histoire d’une partie difficile de ma vie est source d’espérance ou promesse pour l’avenir ?

 

Philippe de Jésus, ocd (couvent d’Avon)

 

 

 

 

 

Prière de la communauté

Notre Père

Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour. Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. Et ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre-nous du Mal. Amen

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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Carême – Chemin pascal avec Édith Stein

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