L'appel à la concorde et à la charité qu'on va lire est extrait d'un magnifique discours prononcé par un évêque arménien, saint Nersès de Lambron (1153-1198), au cours d'un concile de l'Eglise arménienne réuni en 1179 en vue d'envisager la réunion de cette Eglise avec l'Eglise de Constantinople.

Originaire de Tarse (la ville de saint Paul), en Cilicie (sud-est de l'actuelle Turquie), Nersès de Lambron devint évêque de cette ville à l'âge de 22 ans (!). Il déploya toutes ses énergies - malheureusement sans succès - en vue du rétablissement de la pleine communion de l'Eglise arménienne avec les Eglises de Constantinople et de Rome. Il est reconnu comme saint par l'Eglise apostolique arménienne. On trouvera plusieurs extraits de lui dans l'ouvrage "Trésors sprirituels des chrétiens d'Orient et d'Occident".

Voulons-nous être aimés ? Dilatons d’abord la charité. Écoutons notre Maître, le Christ, disant : Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le aussi pour eux (Mt 7,12). Faites, vous, d’abord, et ainsi leur volonté vous sera acquise pour coopérer en accord avec la vôtre. Soyons donc les premiers à être source de paix, prenons les devants pour arroser le paradis de la concorde. Celui qui se charge du fardeau de son prochain, n’accomplit-il pas la loi du Christ (cf. Ga 6,2) ? Celui qui s’humilie le premier, ne sera-t-il pas exalté davantage (cf. Mt 23,12) ? Celui qui a la parfaite charité, n’est-il pas vrai qu’il ne cherche pas son intérêt (cf. 1Co 13,5) ?

Nous avons reçu un commandement : Que le soleil ne se couche pas sur votre colère (Ep 4,26). Rappelons-nous donc la gravité qu’il y a à transgresser cette loi et repentons-nous. Comment pouvons-nous demander à Dieu son pardon, nous qui avons appris à Lui présenter d’abord notre pardon [à nos frères](cf. Mt 18,35), alors que ce pardon, nous le différons. Qui plus est, nous avons reçu ordre de signifier notre pardon, non seulement à nos frères chrétiens, mais encore aux païens (cf. Rm 12,18).

« Ne te fie pas à ta justice ! », nous enseigne un Père qui connaissait parfaitement les ruses du Malin. Jusques à quand croirons-nous, à tort, être justes, sans nous repentir ? Celui qui fut une fois couvert de confusion sera de nouveau dans la honte. Le filet du piège ingénieux, une fois découvert, ne sera plus caché.

Le Prince de ce monde, frères, se trouve condamné et la charité, ainsi que la paix, ont été restaurées par notre Sauveur. La charité ne s’exerce pas à l’intérieur d’une nation, mais elle est commune à tous les chrétiens, pour en faire une seule nation dans le Christ. Ainsi, elle est le lien de la paix (Ep 4,3), qui fait descendre la grâce de la Tête sur les membres. Nous n’avons qu’une Tête, le Christ. Comment est-il possible à des membres d’une même Tête d’être dissociés ?

Prière :

Père des miséricordes,

accorde aux disciples de ton Fils de se pardonner mutuellement leurs péchés contre l’unité

et de rivaliser de charité les uns envers les autres,

afin de parvenir à la pleine communion en Celui qui est leur Tête, Jésus Christ.

Lui qui règne pour les siècles des siècles. Amen.