Bienheureux Jean-Joseph Lataste - Chapitre 4

Le Père Jean-Joseph Lataste est hanté par un immense désir : ces détenues que le monde rejette, qui sont mises au ban de la société, il veut qu’elles soient réhabilitées. La Miséricorde divine ne fait pas de tri, elle est pour tous, elle pardonne à tous et remet chacun debout.

Il forme alors un projet audacieux : fonder une congrégation de dominicaines où des vocations venues de la prison seraient mêlées, sans distinction aucune, à des vocations nées dans un milieu catholique normal.

Il sait que quelques détenues souhaitent devenir religieuses à leur sortie de prison. Hélas ! Aucun couvent n’est disposé à les accueillir. Seuls les «  refuges  », tenues par des congrégations s’ouvrent à l’époque aux anciennes prisonnières « repenties », ainsi étiquetées, la honte de leurs forfaits passés toujours au visage.

Aussi a-t-il le courage d’innover. Il veut réunir dans une même famille spirituelle, dans une même communauté, religieuses et repenties. Il formule ainsi son projet : « Un pauvre prêtre a pensé qu’il était temps de rendre au front de ces femmes la couronne tombée. – Les recueillir en une société d’âmes sans tache, vouées à Dieu, qui les prenant par la main comme des sœurs, et par des ascensions successives, les élevant à leur niveau, les confondraient dans leurs rangs, les abriteraient de leur pureté, partageraient avec elles leur nom, leur habit, leurs vœux, toute leur vie ; de telle sorte que nul regard humain ne puisse plus discerner désormais les anciennes pécheresses de celles qui n’ont pas péché. »

Le Père Lataste se lance immédiatement dans les démarches de fondation d’une congrégation. Comme il s’y attendait, sa proposition de pousser la réhabilitation jusqu’à confondre des «  femmes honnêtes  » avec d’anciennes criminelles fut loin d’entraîner l’adhésion générale. Les réticences sont nombreuses car il n’est pas, dans l’esprit du temps, de concevoir pareilles réhabilitations pour des femmes considérées comme définitivement perdues pour la société.

Pendant un an, le Père Lataste continue son activité de prédicateur et, revenu à Cadillac en 1865, il ressent à nouveau, devant la foi des détenues, l’urgence de sa fondation : « J’ai eu l’occasion, une fois de plus, d’admirer le travail de la grâce dans ces âmes et de constater la nécessité et l’opportunité de cette fondation, non seulement pour plus tard mais dès maintenant. »

Cependant il dispose de peu de loisirs car il vient d’être nommé Maître des Novices au couvent de Flavigny. Il écrit beaucoup, notamment une importante brochure publiée en 1866 qui n’est autre que celle de son projet de fondation, Les Réhabilitées. Il veut faire vite, doit trouver des locaux, faire venir des religieuses. Avec confiance, il envoie sa brochure à de nombreuses personnalités. Ses idées sont bientôt partagées par une sœur dominicaine, Sœur Henri-Dominique Berthier, une religieuse de la Présentation de Tours, déjà sensibilisée à ces problèmes. Sur les conseils de son directeur spirituel, le Père Sudreau, elle rencontre le Père Lataste à Flavigny et c’est là que débute leur collaboration. C’est elle qui deviendra la première Supérieure des Dominicaines de Béthanie.

Grâce à la générosité de l’évêque de Besançon, une première maison ouvre ses portes, le 14 août 1866, à Frasne-le-Château, en Haute-Saône. Le 20 novembre 1866, le Père Lataste reçoit les professions de Mère Henri-Dominique, instituée prieure, et de Marguerite-Marie. Le principe fondateur de la Congrégation est clairement affirmé : « Je désire que nulle excepté vous ne sache de nos enfants la cause ni la durée de leur détention. Il faut que le passé soit absolument enterré, mis dans la tombe ; qu’il n’y soit jamais fait allusion devant qui que ce soit, mais seulement en confession  et en direction entre vous et elles. »

Pour lui, Béthanie n’est pas son œuvre mais sera toujours celle de Dieu.

Pendant trois ans, tout en continuant ses prédications, il soutient ses Sœurs de Béthanie. Le 22 juillet 1868, en la fête de Sainte Marie-Madeleine, le père Lataste voit se concrétiser ses vœux les plus chers : deux premières réhabilitées prennent l’habit. Et la veille de Noël, il remet l’habit à une ancienne détenue suicidaire qu’il avait connue à Cadillac et détournée de son projet.

Cette même année 1868, le Père Lataste contracte une infection pleurale après avoir longuement confessé dans un confessionnal humide. Il ne s’en remettra pas. Il n’aura pas le temps de rédiger les Constitutions de l’Ordre de Béthanie dont il commence la dictée à Mère Henri-Dominique. Elles seront terminées ultérieurement par le Père Boulanger.

A l’approche de la mort, il prie pour ses filles, rend grâce et pardonne : « Je remercie bien l’Ordre de Saint Dominique tout entier de m’avoir donné son saint habit. Je remercie bien et je bénis en mourant toutes les personnes qui m’ont approuvé et m’ont aidé de leurs prières, de leurs conseils, de leur influence, de leurs dons. Je pardonne à tous ceux qui ne m’ont pas approuvé et même qui m’ont contredit et combattu : je prie Dieu de les bénir tous, tous. »

Le Père Jean-Joseph Lataste s’éteint le 10 mars 1869, à l’âge de 36 ans. Il est d’abord enterré à Frasne-le-Château mais un an plus tard, la communauté de Béthanie part s’installer à Montferrand-le-Château. La dépouille du Père Lataste est alors exhumée pour être transportée dans le nouveau couvent. Elle ne présentait alors aucune marque de corruption. De même, en 1937, son corps, toujours intact, est transféré du cimetière dans la chapelle des Soeurs.

Déclaré Vénérable par le pape Benoît XVI en 2007, le Père Jean-Joseph Lataste a été béatifié le 3 juin 2012 à Besançon. Le 27 juin 2011 le Pape avait publié un décret reconnaissant le miracle que voici, dû à son intercession :

« Florent Mahaux, un homme de 74 ans vivant en Belgique, était dans la phase terminale d’un cancer digestif en janvier 1943. La médecine de l’époque ne laissait aucun espoir de guérison. Une fille du malade était alors à Béthanie. Elle devait commencer son noviciat au moment où on lui annonça que son père n’avait plus que quelques jours à vivre.

Les sœurs de Montferrand-le-Château firent une neuvaine demandant la guérison du malade par l’intercession du père Lataste. Dans les jours qui ont suivi, le malade, guéri, a repris ses activités habituelles. Il est décédé paisiblement en 1949 des suites d’un accident vasculaire cérébral. Sa fille a vécu toute sa vie à Béthanie, dans la discrétion, au point que les sœurs qui vivaient avec elles ne savaient pas de quelle grâce elle avait bénéficié dans sa jeunesse. »

 

Aujourd’hui, les Sœurs dominicaines de Béthanie sont présentes dans plusieurs pays d’Europe, France, Suisse et Italie. Vivant dans une communion fraternelle de miséricorde, elles rassemblent toujours, comme l’avait voulu le Bienheureux Jean-Joseph Lataste, des femmes venant de prison, ayant un passé lourd, et d’autres avec un parcours plus classique.

Un institut séculier existe aussi, la Mission Notre-Dame de Béthanie. Dans une prison d’hommes, à Norfolk aux Etats-Unis, a été fondée une fraternité dominicaine. Enfin des groupes de laïcs, la Fraternité Lataste et la Résurrection de Lazare de Béthanie se veulent des lieux d’accueil où puisse renaître l’espérance pour chacun.

 

La fête du Bienheureux Jean-Joseph Lataste a été fixée au 5 septembre.

 

Apôtre de la Miséricorde divine, le Père Jean-Joseph Lataste écrivait : « Pénitentes ou immaculées,  Jésus ne pèse les âmes, quelles qu’elles soient, qu’au poids de leur amour ».

C’est donc aujourd’hui, sans regarder en arrière, que nous sommes invités à donner toujours plus d’amour à Dieu et à notre prochain, en essayant d’aimer comme nous-mêmes sommes aimés, sans mesure, sans compter.

En nous confiant à la Vierge Marie pour qu’Elle guide nos pas sur ce chemin d’espérance.

 

Je vous salue, Marie…

Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

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10 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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