J12 - Deuxième dimanche - Décaper notre image de Dieu

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Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 9,2-10

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmena, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. Élie leur apparut avec Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus. Pierre alors prend la parole et dit à Jésus : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » De fait, Pierre ne savait que dire, tant leur frayeur était grande. Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le ! » Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux.

Ils descendirent de la montagne, et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. Et ils restèrent fermement attachés à cette parole, tout en se demandant entre eux ce que voulait dire : « ressusciter d’entre les morts. »

1.  Voir Jésus autrement

Jésus nous emmène avec Pierre, Jacques et Jean, à l’écart sur une haute montagne. Que nous soyons habitants de la ville ou de la vallée, insérés dans un endroit isolé ou près d’un carrefour, nous sommes d’abord invités à nous laisser conduire par Jésus lui-même dans un lieu inconnu mais habité, sans quitter notre chez nous. Tâche difficile me direz-vous ! Certes, mais si essentielle durant ce temps de carême. Jésus a besoin de notre attention, de notre disponibilité. Alors il nous fait quitter, comme ses apôtres, nos chemins trop fréquentés pour permettre un certain dépaysement. Il souhaite attirer notre attention, ouvrir nos oreilles, permettre la rencontre. C’est un effort, mais il peut être transformé en grâce si nous le voulons.

Laissons Jésus nous déranger. Nous sommes si souvent prisonniers de nos habitudes, de nos repères durcis par le temps. Recevons cette invitation comme un cadeau offert en ce temps de carême. Dieu vient inscrire en nos vies du neuf, de l’inattendu, de l’imprévisible. Laissons-nous déposséder de ce que nous croyons savoir pour faire l’expérience d’un compagnonnage renouvelé avec Jésus lui-même. Demandons, au commencement de notre prière, cette même liberté dont Dieu a fait cadeau à notre Père Abraham. Relisons le début du live de la Genèse que nous offre la liturgie de ce dimanche. « En ces jours-là, Dieu mit Abraham à l’épreuve. Il lui dit : "Abraham !" Celui-ci répondit : "Me voici !" ». Redisons lentement cette phrase et mettons notre prénom à la place d’Abraham. Rendons-nous disponibles, libres, accueillants à Dieu, prêts à dire en toute confiance à Dieu :
« ME VOICI ! »


Cette liberté acquise, nous devenons alors prêts pour recevoir de Dieu, en son Fils, sa visite. Surprise de ces trois compagnons de Jésus. Ils commençaient à connaître ­Jésus, à s’habituer, non sans difficultés, à son message, à sa personne ; et voilà que Jésus est transfiguré devant eux. Reconnaissable mais tellement autre. Ses habits devinrent resplendissants, mieux que la meilleure poudre à laver utilisée par nos soins quand nous voulons obtenir un résultat impeccable. Jésus est accompagné d’Élie et de Moïse, deux figures importantes de l’Ancien Testament.

Arrêtons-nous sur ce verbe « transfigurer ». Le dictionnaire Petit Robert note : « Transformer en revêtant d’un aspect éclatant et glorieux. Transformer en donnant une beauté et un éclat inhabituels, transformer en améliorant… ». Voilà une aide précieuse pour comprendre ce texte de l’évangile. Un itinéraire nouveau semble se dessiner. Nous ne sommes plus dans la répétition d’une belle définition apprise depuis longtemps. Nous sommes au temps de l’irruption de Dieu dans notre vie afin de le reconnaitre et de le connaître pour mieux l’aimer. Alors, avec cette image de Jésus transfiguré, une parole se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ! »

Voir autrement Jésus, écouter Jésus autrement. Ce pourrait être pour nous un exercice à entreprendre en ce début de carême. Nous sommes souvent si habitués à tout. Nous ne savons plus voir autre chose que ce que nous avons imprimé, et cela pour une personne comme pour un événement. Nos oreilles risquent d’enregistrer les mêmes sons, les mêmes mots, avant même que la personne connue ouvre la bouche. S’il en est ainsi avec les êtres humains, n’en serait-il pas de même avec Dieu ? Ne risquons-nous pas avec le temps d’enfermer Dieu dans une définition ou une image, aussi belle soit-elle, mais jaunie par le temps, usée par les mêmes mots répétés sans cesse ? Comment, durant ce temps de carême, allons-nous accepter de décaper l’image de Dieu que nous avons construite en nous afin de la rendre « d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille » nous dit l’évangile ? Le psaume 62 peut nous aider à entreprendre cet exercice. Il note : « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube ». Cette recherche de Dieu ne nous aidera-t-elle pas à parler à Dieu avec des mots nouveaux, des mots pétris par la prière afin de devenir un bon pain frais et croustillant, encore chaud et prêt à une dégustation qui régale le cœur ?

Comment en ce jour ne pas faire nôtre un beau texte de notre Père Jean de la Croix qui nous invite à accueillir Jésus comme parole du père. Relisons-le : « C’est pourquoi celui qui demanderait maintenant à Dieu ou qui voudrait quelque vision ou révélation, non seulement ferait une sottise, mais ferait injure à Dieu, ne jetant pas entièrement les yeux sur le Christ, sans vouloir quelque autre chose ou nouveauté. Car Dieu pourrait lui répondre de cette manière : « je vous ai déjà parlé, répondu, manifesté et révélé, vous le donnant pour frère, pour compagnon, pour maître, pour prix et pour récompense. Car depuis le jour où je suis descendu avec mon Esprit sur lui au mont de Thabor disant : ‘Voici mon Fils bien-aimé, auquel je me suis plu, écoutez-le’ (Mt 17,5), j’ai cessé toutes ces manières d’instructions et de réponses et lui ai tout remis. Écoutez-le, car je n’ai plus de foi à révéler ni de choses à manifester. » (Jean de la Croix, Montée du Carmel, II, 22,5)

Demandons à l’Esprit Saint une grâce, celle des commencements. Acceptons d’accompagner nos frères et sœurs catéchumènes qui s’avancent vers le baptême pour faire avec eux l’expérience d’un appel à un renouveau de notre foi, de notre OUI à Jésus, de notre volonté de le suivre.

2.  « Dieu se peint au fond de notre cœur »

Notre frère Laurent peut nous accompagner sur ce chemin et nous aider. Ainsi écrivait-il : « Dieu lui-même se peint au fond de notre âme, et nous ne voulons pas l’y voir : nous le quittons pour des badineries et dédaignons de nous entretenir avec notre Roi qui est toujours présent en nous. » (Mœurs 5-7) Son biographe ajoute : « Par la même raison il préférait, dans le peu de lecture qu’il faisait, le saint Évangile à tous les autres livres, parce qu’il y trouvait à nourrir plus simplement et plus purement sa foi, dans les propres paroles de Jésus-Christ. » (Mœurs 7). Interrogeons-nous quelques instants : qu’en est-il de notre rapport avec le saint Évangile ?

Ce temps du carême ne serait-il pas un temps propice pour redonner au livre de l’Évangile toute sa place ? Ne serait-ce pas l’occasion favorable de laisser notre Bible ouverte et exposée comme une présence tout au long de la journée ? Ainsi nous pourrions, à divers instants de nos occupations, poser les yeux sur ce Livre resté ouvert depuis notre lecture. Laissons la Parole s’échapper pour mieux nous rejoindre et développer avec nous une certaine complicité. Dieu nous parle en son Fils Bien-Aimé. Il s’adresse à nous et utilise les mots de notre quotidien pour nous dire son Amour et sa Miséricorde. Dieu nous écrit une lettre et nous ne nous empresserions pas de la lire, de la relire, pour qu’elle s’imprègne en nous et s’imprime au plus profond de notre cœur ? Avons-nous songé un instant que nous sommes les destinataires de cette Parole, de toute Parole de Dieu qui adresse à son enfant bien-aimé une lettre, un message ? Ne serait-ce pas pour chacun de nous un temps où la Parole viendrait féconder notre existence ? Dieu nous entraîne hors des sentiers connus et trop banalisés de notre vie chrétienne pour nous donner les prémices de sa Parole. Mais avons-nous goût à lire sa Parole ?

Cet exercice n’est pas une expérience isolée mais un exercice à renouveler tout au long de cette traversée du carême, en communion avec nos frères et sœurs chrétiens à l’écoute des Écritures. Alors gravissons la montagne. Dieu nous y attend et nous désigne son Fils : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le ! ». Allons-nous oser nous rendre libres pour l’écouter. Allons-nous nous rendre disponibles pour l’accueillir ?

Fr. Didier-Joseph CAULLERY, ocd (Avon)

Prière de la communauté

Notre Père

Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour. Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. Et ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre-nous du Mal. Amen

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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Carême avec Laurent de la Résurrection

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