Saint Bernard de Clairvaux - Chapitre 3

Saint Bernard était très attaché à la récitation quotidienne du Salve Regina. Il en aurait composé la dernière strophe : o clemens, o pia, o dulcis Virgo Maria.

Du temps de Saint Bernard, tout l'Occident croyait, bien éloigné de la foule des indifférents d'aujourd'hui. Mais l'Eglise était en proie à d'autres tourments. Le démon l'assaillait de toutes parts et Bernard de se tourner vers Marie, de regarder l'étoile, d'invoquer la Vierge qui foule aux pieds le serpent.

A maintes reprises, il va quitter le silence de son monastère parce que l'Eglise a besoin de lui pour combattre un schisme, des hérésies, ou encore pour participer à des réflexions sur la doctrine, sur les relations avec le pouvoir temporel. Traditionaliste, il refusera certains dogmes qui seront adoptés plus tard par l'Eglise. Ainsi, malgré sa dévotion à la Vierge, il s'opposera à la pratique, nouvelle à l'époque, de fêter l'Immaculée Conception. Cela dit, la voix de cet apôtre du Seigneur se fait entendre dans l'Eglise et sa réputation va croissant.

Le voici donc qui sillonne les routes d'Europe occidentale pour prêcher, défendre l'Eglise, apporter partout sa vision de Dieu, un Dieu qui, à la fois, exige, aime et pardonne. En 1129, il participe au Concile de Troyes, convoqué par le pape Honorius II. Ce Concile a pour objet de faire reconnaître l'ordre du Temple, fondé à Jérusalem par Hugues de Payns. Il s'agit aussi de fixer une règle de vie à cette nouvelle communauté. De nombreux évêques et Abbés sont présents. Parmi eux se trouve Bernard, nommé secrétaire du Concile. Les Templiers ne lui sont pas inconnus car son oncle, André de Montbard, compte au nombre des neuf fondateurs de l'Ordre. Il a rencontré Hugues de Payns et a été convaincu du bien-fondé de son initiative, même si, de prime abord, il a pu être rebuté par l'aspect militaire de l'entreprise. Il a pris part à la rédaction des statuts de la Milice du Temple où sont inscrits les vœux que vont prononcer les futurs templiers : obéissance, chasteté, pauvreté. Pourtant l'existence d'un ordre de moines-soldats appelé à manier l'épée avait d'abord été très contestée et vilipendée comme une « monstruosité doctrinale ». Or l'approbation des statuts, entérinée par le Concile, est une reconnaissance officielle de la notion de guerre sainte dans la doctrine de l'Eglise. Bernard en admet le principe mais craint les débordements. L'année suivante, il écrit aux Chevaliers du Temple pour expliquer qu'il est plus difficile à un chrétien de donner la mort que de la recevoir. Il fustige le chevalier du siècle qui engage les guerres et rappelle au Templier qu'il est un combattant discipliné sans orgueil et sans haine. L'Eloge de la Nouvelle Milice est une ligne de conduite splendide où sont dénoncées les guerres injustes et le luxe effréné de certains chevaliers.

Bernard est avant tout un homme de paix. Il intervient pour que cessent les querelles, les injustices, toutes les atteintes à la tolérance et à la charité. Il prône la miséricorde vis-à-vis des coupables. Par exemple, il demande à son ami, le Comte Thibaut de Champagne de distribuer des aumônes, de restituer les biens confisqués des condamnés. Rencontrant un jour un cortège accompagnant au supplice un condamné à mort, il demande qu'on lui remette le condamné. « Je le pendrai moi-même » dit-il. Le Comte cherche à le dissuader. Le prisonnier a mérité cent fois la mort. Bernard tient bon. « Vous allez le pendre à une potence ? Moi, je le pendrai à la Croix pour toujours », argumente-t-il. Il l'emmène à Clairvaux où le malheureux deviendra un saint frère convers.

La paix règne dans les monastères mais l'Eglise n'est pas en repos. Elle est en proie à la pire des tribulations car elle est attaquée au plus haut dans sa hiérarchie. Le pape Honorius II décède et s'ensuit une véritable guerre de succession. Les cardinaux divisés, excités, élisent deux papes : le cardinal Aimeric qui prend le nom d'Innocent II et le cardinal Pierleone qui prend le nom d'Anaclet II. Et chacun de s'empresser à écrire à tous les souverains, sans mentionner son rival, pour se faire reconnaître. On se bat dans les rues. Anaclet II paraît plus puissant qu'Innocent II, lequel est contraint de s'enfuir. C'est le schisme.

En France, le roi Louis VI réunit un concile à Etampes où siègent évêques, abbés et grands personnages du royaume, notamment Suger. Bernard, convié, hésite à s'y rendre. Le pape défunt lui avait reproché de trop se mêler des affaires de l'Eglise. Quant à Innocent II, il avait, avant son élection, qualifié Bernard de « grenouille criarde », l'invitant à rester dans son trou. Et de fait, dans son « trou » Bernard se trouve si bien qu'il n'a nulle envie d'en sortir. Une vision lui aurait reproché d'être lâche. Il se met donc en route pour examiner cette affaire complexe au vu du Droit Canon. Sous l'angle de la moralité et de la sainteté, les choses sont différentes. Innocent est un homme pieux de haute moralité face à Anaclet qui ne présente pas les mêmes vertus. Il est le pape que la France doit reconnaître, plaide Bernard qui incite le roi à rencontrer Innocent II, toujours errant et séjournant alors en France. Le rôle de Bernard ne s'arrête pas là. Il décide Henri Ier, roi d'Angleterre, à opter en faveur d'Innocent II. Puis, en compagnie du pape, il se rend à Liège pour rencontrer Lothaire II, roi d'Allemagne. Celui-ci veut négocier son ralliement contre des droits sur la nomination des évêques, revenant ainsi sur le Concordat de Worms. Lothaire s'emporte, ose un geste hostile à l'encontre du pape. Bernard se dresse, tout de blanc vêtu, et s'impose. Il interpelle l'empereur, l'adjure et le fait céder.

Cependant Innocent II, toujours errant, décide de regagner l'Italie et, avec l'aide de Lothaire, soumet des cités italiennes rebelles mais il se heurte à l'opposition de Roger de Sicile qui soutient Anaclet. Les intrigues de toutes sortes rendent ce conflit interminable et par deux fois le pape appelle Bernard au secours. Celui-ci, malade, accourt et franchit les Alpes en plein hiver, brûlant de fièvre, à dos de mulet. Partout il apaise, réconcilie, parvient à emmener le pape à Rome en 1133 mais les combats se poursuivent. En 1135, le pape réunit le concile de Pise pour frapper d'anathème Anaclet. Bernard y prononce un discours très violent puis rallie la ville de Milan à la cause du pape. De Pise, Bernard emmène à Clairvaux un autre Bernard qui fait grande impression et devient son disciple soumis.

Cette même année,  l'Abbé de Clairvaux part en Aquitaine où l'évêque d'Angoulême et Guillaume, Comte de Poitiers, sont des partisans d'Anaclet. La rencontre a lieu à Parthenay. Chacun campant sur ses positions, le saint décide de célébrer une grand-messe solennelle. L'évêque de Poitiers prend place dans l'église. Pour sa part, Guillaume, excommunié en raison de ses convictions, reste à la porte. Mais au moment de la communion, Bernard prend l'hostie, va le trouver et s'écrie :

Depuis des jours, vous nous méprisez. Voici le Fils de la Vierge Marie, votre juge. Lui aussi, le mépriserez-vous ?

Guillaume s'écroule à terre, écume. On le relève, il retombe. Bernard lui ordonne de se lever, d'aller vers l'évêque de Poitiers pour lui donner le baiser de paix et se soumettre à Innocent II. Celui-ci obéit. L'assistance, stupéfaite, assiste à la conversion miraculeuse du Comte. La nouvelle s'en répand dans toute l'Aquitaine dont la population renonce au schisme.

 Soudain meurt Anaclet. Un autre antipape est élu mais bientôt, épouvanté par son propre sacrilège, il se précipite auprès de Bernard qui l'emmène voir le Saint Père à Rome. En janvier 1138, le pape convoque le deuxième Concile du Latran qui met fin au schisme. Celui-ci aura duré huit ans.

A Clairvaux, le monastère d'origine est devenu trop petit face à l'afflux des novices. Il faut agrandir ce que la pauvreté du monastère ne permet pas. C'est cependant une nécessité. Or la renommée de Clairvaux et de son saint Abbé est telle que, dès le projet connu, les dons affluent. Un second Clairvaux, beau et austère, voit le jour. Il n'en reste rien aujourd'hui.

Bernard a repris pour un temps sa vie de prière. Il administre l'abbaye, s'occupe des bâtiments, de la mise en valeur des terres. Surtout, il consacre l'essentiel de son temps à ses écrits. Dans son Traité, De l'Amour de Dieu, il décrit ses états mystiques, à l'origine d'une école spirituelle. Il développe un ascétisme extrême de dépouillement, privilégiant l'écoute qui ne doit pas être perturbée d'où la nécessité du silence. L'écoute est conditionnée par l'humilité. Le Saint écrit : « l'humilité est une vertu par laquelle l'homme devient méprisable à ses propres yeux en raison de ce qu'il se connaît mieux. » Chacun, en connaissant sa propension au péché, sa propre misère, est enclin à compatir à celle d'autrui, à exercer miséricorde et charité. Il poursuit ses Sermons sur les Ecritures, sur la Sainte Vierge qu'il chante comme sa Dame, supplie comme son avocate, évoque avec des accents si doux qu'on le surnommera le cithariste de Marie, le Docteur aux lèvres de miel.

Certains de ses contemporains lui reprochent son austérité, assimilée parfois à un manque de cœur. Pourtant ce cœur, gonflé d'amour, laisse souvent déborder sa tendresse ou sa souffrance. C'est le cas lors du décès de Gérard, son frère, un homme sage et bon qui l'avait beaucoup secondé à Clairvaux. Bernard laisse alors éclater sa douleur : « C'était mon Gérard, mon Gérard à moi ! J'ai la mort en horreur pour moi et pour les miens. Je souffre, je souffre horriblement parce que j'aime avec passion. »

Cette retraite de Clairvaux où Bernard se plaît tant ne lui est jamais donnée bien longtemps. Sa notoriété, son zèle au service du Seigneur l'appellent toujours au dehors où les passions, les jalousies, les hérésies continuent... Malade mais négligeant toujours ce corps dont il n'a que faire, il va bientôt reprendre ses pérégrinations au pas de sa mule.

Saint Bernard, le cithariste de Marie n'a jamais assez de mots pour lui dire son amour et lui demander de faire pleuvoir ses grâces sur les pauvres que nous sommes. Il disait qu'Elle était pour lui l'aqueduc par où passent toutes les grâces. Unissons-nous à lui pour prier Marie en empruntant ses paroles de louange et d'amour. 

Ô Notre-Dame Médiatrice, comme Te voici devenue l'amie du Seigneur, ô Dame ! Combien proche, que dis-je, combien intime à cause de Tes mérites ; quelle grâce Tu as trouvée auprès de Lui ! En Toi Il demeure, et Toi en Lui ; Tu Le revêts et Tu es revêtue par Lui. Tu le revêts de la substance de Ta chair, et Lui, Il Te revêt de la gloire de sa Majesté ; Tu revêts le soleil d'une nuée, et Toi-même Tu es revêtue par le soleil. Et maintenant, ô Mère de Miséricorde, au nom de cette Tendresse même de ton Cœur très pur, la Lune - l'Eglise - prosternée à Tes pieds t'adresse ses pressantes supplications, à Toi la Médiatrice établie pour elle auprès du Soleil de justice, pour obtenir que dans Ta lumière elle voie la Lumière, pour mériter par Ton entremise les bonnes grâces de ce Soleil qui T'a aimée vraiment plus que tout, qui T'a faite si belle en Te parant d'un manteau de gloire et en plaçant sur Ton front la plus belle des couronnes. Nourris aujourd'hui Tes pauvres, ô Notre Dame, car Tu es vraiment la Vierge choisie par avance et destinée au Fils du Très-Haut qui est au-dessus de tout, Dieu béni à jamais. Ainsi soit-il.

Je vous salue, Marie...

Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

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4 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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