Aujourd'hui, méditons en préambule ces lignes du Cardinal Mercier, primat de Belgique :

« Si à la naissance de Luther et de Calvin, l'Eglise avait eu un pontife de la trempe de Pie X, le protestantisme eut-il réussi à arracher à l'Eglise le tiers de l'Europe chrétienne ?  » 

Pie X fut le gardien vigilant du dogme catholique, il eut à lutter non seulement contre les attaques extérieures des anticléricaux (la laïcisation), mais aussi contre les menaces intérieures par des "ennemis d'autant plus redoutables qu'ils le sont moins ouvertement".

Parmi ces derniers, étaient des catholiques laïcs mais aussi des prêtres, qui sous prétexte d'interprétation et se réclamant du point de vue historique, poursuivaient un prétendu progrès des dogmes et qui en réalité en étaient une interprétation. Le Saint Siège les regroupa sous le terme générique de "modernistes", un mouvement qui toucha la France, mais aussi l'Angleterre, l'Allemagne et l'Italie.        

Le modernisme est à l'époque une tendance théologique considérée par les courants intransigeants, dominant les autorités catholiques d'alors, comme déviante et menant à l'hérésie. S'appuyant sur une nouvelle lecture de la Bible, les modernistes acceptent l'idée d'une évolution dynamique de la doctrine de l'Église par opposition à un ensemble de dogmes fixes. Ses 2 fondements philosophiques sont : l'agnosticisme (l'impossibilité pour l'homme de connaître le divin par la raison) et l'immanentisme (la foi est avant tout un sentiment intime qui varie selon les époques)

Charles Péguy en donnera cette définition : « Le modernisme consiste à ne pas croire ce que l'on croit. Il consiste à ne pas croire soi-même pour ne pas léser l'adversaire qui ne croit pas non plus. C'est un système de complaisance, de politesse, de déclinaison mutuelle, de lâcheté, c'est la vertu des gens du monde »

En 1964, Paul VI, dans sa première encyclique Ecclesiam suam (1964), qualifiera le modernisme de « danger menaçant », et Jean Paul II, dans Fides et ratio (1998), justifiera aussi le combat de Pie X contre le modernisme.

 La lutte de Pie X contre le modernisme

Le modernisme est la synthèse et le rendez-vous de toutes les hérésies qui tendent à détruire les fondements de la foi et à anéantir le christianisme (Pie X)

 Tout restaurer dans le Christ, voilà notre programme, et, comme le Christ est vérité, notre premier devoir est d'enseigner et de proclamer la vérité  (Pie X)

Pie X a lutté contre « le modernisme » (Encyclique Pascendi Dominici Gregis du 8 septembre 1907)

Dans la constitution apostolique Lamentabili sane exitu (3 juillet 1907), Pie X condamne formellement 65 propositions dites « modernistes » que résumait ainsi la dernière : « Le catholicisme d'aujourd'hui ne peut se concilier avec la vraie science à moins de la transformer en un certain christianisme non dogmatique, c'est-à-dire en un protestantisme large et libéral », et rappelées dans l'encyclique Pascendi laquelle rejette notamment les thèses d'Alfred Loisy qui est excommunié.

Le résumé de la position antimoderniste est donné dans le motu proprio Sacrorum antistitum de 1910.

La « Question française »

Pie X, au cours de son pontificat, fait face à la loi française de séparation de l'Église et de l'État, votée par le parlement le 9 décembre 1905, et qui s'inscrit dans le prolongement de la politique anticléricale menée par le précédent gouvernement d'Emile Combes (un ancien séminariste), qui a ordonné la dissolution des congrégations religieuses et l'expulsion des religieux réguliers : enseignants, personnel des hospices, etc. 

En quelques jours, plus de 2500 écoles religieuses furent fermées, et des religieuses et religieux furent obligés de fuir et chercher asile à l'étranger.

Bien que la majorité des évêques français conseille de se plier à la loi, Pie X interdit toute collaboration par l'encyclique Vehementer nos (11 février 1906), l'allocution consistoriale Gravissimum (21 février), et l'encyclique Gravissimo officii munere (10 août), Cette opposition du Pape à la loi française a pour conséquence de compromettre la création des associations cultuelles, prévues par la loi, et de faire transférer les biens immobiliers de l'Église au profit de l'État. Ce n'est qu'en 1923 que la situation est débloquée par la création des associations diocésaines..

Le Sillon

Le Sillon (fondé par Marc Sangnier) est un mouvement catholique d'éducation populaire ayant comme objectif de christianiser la démocratie française, réconcilier l'Eglise avec la République. Il est d'abord soutenu par le Saint-Siège, mais par la suite ce mouvement tente d'échapper à l'autorité ecclésiastique, de promouvoir le nivellement des classes, la défiance envers l'Eglise, de devenir une association interconfessionnelle, et de se rapprocher des ennemis modernes de l'Eglise. Le Sillon est dissout en 1910.

Lien :  https://www.youtube.com/watch?v=arHEftuxeds