Saint Martin - chapitre 1

Saint Martin (316 - 397)

Un soldat romain, juché sur son cheval, sort son épée du fourreau et tranche son large manteau rouge pour en couvrir les épaules du malheureux, transi de froid, qui se tient devant lui et lui demande l'aumône.

L'image est gravée dans toutes les mémoires. Nous savons aussi combien Martin, cet immense saint, a pu être vénéré en Gaule puis en France depuis le IVe siècle. Aujourd'hui, 237 communes portent le nom de Saint Martin. Plus de 3.600 églises lui sont dédiées. Sans compter les hameaux, abbayes, fontaines, ponts etc… Entre le Ve et le XVe siècle, cinq papes de Rome ont porté le nom de Martin.

Qui était-il donc ?

Un homme de douceur, de bonté, de générosité, d'humilité, de paix qui portait un nom guerrier : Martinus, surnom dérivé du nom du dieu de la guerre, Mars. Ce prénom martial était sans doute en honneur dans les milieux d'officiers auxquels appartenait son père.

Ni gaulois, ni romain, Martin est né en 317 en Europe centrale, à Sabaria en Pannonie, c'est-à-dire dans une partie de la Hongrie et de la Moravie actuelles. Sabaria, colonie romaine depuis l'empereur Claude, s'appelle aujourd'hui Szombathely, ville hongroise, à une centaine de kilomètres au Sud Sud-Est de Vienne.

Ses parents étaient païens, d'origine mi slave, mi celtique. D'abord simple soldat, son père devint tribun militaire (équivalent à un colonel ou un général de nos jours). Et comme tel, à la tête d'une légion, il changeait souvent de garnison. C'est ainsi qu'il vint s'établir à Pavie, au sud de Milan.

A Pavie, le jeune Martin fréquente des soldats qui lui parlent de l'Empereur Constantin et de ses batailles. Celle du pont Milvius (situé à quelques kilomètres au nord-est de Rome) en 312, avait opposé Constantin et Maxence qui régnait sur l'Italie. Avant la bataille, Constantin aurait vu une Croix lumineuse dans le ciel avec ces mots : hoc signo vinces (par ce signe, tu vaincras). Sa victoire consacra le début d'une nouvelle ère pour l'Empire tout entier et surtout pour les chrétiens qui s'étaient vu accorder la liberté religieuse par l'Edit de Milan. Le père de Martin, farouchement opposé à la religion chrétienne, ne supporte guère de voir apposée la Croix du Christ sur l'étendard impérial… Il demande donc son congé et reçoit, pour se retirer, des terres à Ticinum, près de Pavie. C'est  là que Martin est éduqué, qu'il apprend à lire, compter, monter à cheval et qu'il éprouve, très jeune, une irrésistible attirance pour la foi chrétienne. En cachette de son père, il rend visite à l'évêque Athanase qui lui fait suivre  des cours de catéchisme. Sa mère a bien compris que la foi chrétienne anime son fils et, même si elle ne le suit pas dans cette voie, complice, elle ferme les yeux.

Tandis que tous les jeunes romains ne voient que pour Constantinople dont l'Empereur vient, en 330, de faire sa capitale, Martin, selon son biographe, Sulpice Sévère, a le cœur « tout entier fixé dans les églises ou dans les monastères, uniques objets de ses affections. »

Mais son père a d'autres vues pour lui. Un fils de militaire doit embrasser la même carrière. Il n'y a pas d'alternative. L'armée fera du bien à ce jeune, toujours fourré dans les églises. Martin proteste. Il demande que l'ordre d'appel soit annulé. Mais la fureur de son père est à son comble. Il fait enchaîner son fils, le fait traîner devant les officiers. Martin est enrôlé.

Il entre dans le corps d'élite de la garde impériale à cheval, appelée Schola. Il revêt une armure de métal souple et brillant, un casque à crête, un bouclier de même éclat, le tout complété par un immense manteau blanc, la chlamyde, fendue et fixée sur l'épaule droite par une fibule.

En Gaule, les Francs, venus de l'est, ne cessent de piller et d'incendier les villes. Constantin décide de pacifier cette région. Martin fait partie de l'expédition. Avec la troupe, il franchit les Alpes et pénètre en Gaule. Compte tenu de sa jeunesse et de son enrôlement récent, Martin n'est pas appelé à se battre dans l'immédiat. On lui a donné le grade de circitor.

Ce dernier est chargé de faire des rondes diurnes et nocturnes et de veiller à la discipline des soldats. A ce poste, Martin étonne. Il est, en principe, servi par un soldat d'ordonnance, il perçoit une double paye et une double ration alimentaire. Or il donne tout, paye et nourriture. Quand son ordonnance s'attarde, le soir, et rentre tard au camp, s'apprêtant à fourbir les armes et à cirer les souliers de son chef, il s'aperçoit que Martin a fait le travail à sa place…

La Gaule est alors un pays en proie à une grande pauvreté. Au point que, dans des familles en difficulté, les parents n'hésitent pas à vendre leurs propres enfants. Cette situation attriste Martin qui n'y peut rien, même s'il donne tout ce qu'il possède. Très affecté, il traverse avec sa légion tout le pays jusqu'à Amiens où les soldats établissent leurs quartiers d'hiver.

Là se situe l'épisode évoqué au tout début de cette histoire. Martin est un tout jeune homme de 17 ou 18 ans et la scène se passe donc à la porte de la ville d'Amiens, pendant l'hiver très rigoureux de 334. Martin est croyant mais n'a eu ni le temps ni les moyens d'aller jusqu'au bout de son désir de vie chrétienne et n'a pu être baptisé. Cependant il est déjà enfant de Dieu. Sa bonté est sans limites de sorte que, au moment de sa rencontre avec le mendiant, il a déjà distribué tout l'argent qu'il possédait. La chlamyde est tout ce qui lui reste mais il ne peut en disposer, elle appartient à l'armée. Ce vêtement était composé de deux pièces d'étoffe. La partie supérieure était propriété de l'armée mais la doublure, laissée à la discrétion des officiers, était leur propriété. Dans la plupart des cas, cette doublure, pour protéger du froid, était en peau de mouton.

Et c'est bien de cette chaude doublure qu'il s'agit. C'est donc elle que Martin tranche pour en revêtir le pauvre. Et contrairement à  l'iconographie qui relate l'événement, la chlamyde est non pas rouge… mais blanche ! Ce qui reste du vêtement, appelé cape, fut placé plus tard à la vénération des fidèles, dans une pièce dont le nom est à l'origine du mot chapelle (cappella, en italien).

La nuit suivante, le Christ, revêtu du pan de la chlamyde, apparaît en songe à Martin : « Reconnais-tu ce manteau ? » lui dit-il. Et Il ajoute aux anges qui l'accompagnent : « Voyez ce vêtement. Martin qui n'est encore que catéchumène m'en a revêtu. » Et Martin se remémore les paroles d'Evangile apprises au catéchisme de Pavie : Et quand est-ce que nous t'avons vu étranger, et que nous t'avons recueilli ; ou nu, et que nous t'avons vêtu ? Et le Roi leur dira : En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, vous me l'avez fait à moi-même. 

       Martin est ensuite envoyé à Trèves où il commande deux cohortes. Il y fait une rencontre importante. L'évêque Paulin, qui sera lui aussi canonisé, accueille en effet avec bonté ce jeune catéchumène dont il admire la foi ardente. Il parfait son éducation chrétienne et l'initie aux problèmes de l'heure à savoir le grand danger que représente pour les catholiques l'hérésie arienne. Ceux-ci, dont le culte avait été rendu public en 313 dans l'Empire, pensaient en avoir terminé avec les poursuites, les tortures, les mises à mort. Or, à Alexandrie, le prêtre Arius, inspiré par Satan, avait cherché à semer la discorde parmi eux. Il avait professé une doctrine fondée sur la négation de la divinité de Jésus. L'arianisme niait la consubstantialité, c'est-à-dire l'égalité de substance du Fils avec le Père, et considérait Jésus, le Fils de Dieu, comme une nature inférieure, subordonnée. Cette hérésie fut condamnée par le Concile de Nicée (Isnik aujourd'hui, en Anatolie) en 325. Mais l'hérésie avait gagné à la fois les peuples germaniques et les Wisigoths en péninsule ibérique. Il fallut plusieurs siècles pour en venir à bout. A l'époque de Martin, l'empereur Constance II, se targuant de théologie, prétendait imposer pouvoirs temporel et spirituel, Arius l'ayant convaincu du bien-fondé de sa doctrine. Il voulut persécuter la foi de Nicée et obtenir le ralliement inconditionnel des évêques d'Occident à l'arianisme.  De nombreux évêques se rallièrent en effet mais d'autres s'élevèrent fermement contre cette hérésie. Parmi eux, Paulin à Trèves et Hilaire à Poitiers. Tous deux seront exilés par Constance II. Entretemps, le jeune Martin approfondit sa foi en compagnie de l'évêque Paulin qui lui parle de la lutte énergique que conduit cet autre évêque à Poitiers, Hilaire.

Au début de l'année 354, les Alamans envahissent la Gaule. Le Gouverneur des Gaules est à l'époque un neveu du grand Constantin, Julien l'Apostat. Elevé dans le christianisme, il l'a abjuré et tente de rétablir l'ancien polythéisme païen. Avant la bataille, Julien, selon l'usage, distribue à chaque soldat un donativum ou gratification qui a pour objet d'encourager les troupes à mener combat. Vient le tour de Martin qui tient tête vaillamment et refuse le donativum. Il sait bien que s'il accepte, c'en est fini de sa liberté. Il pense le moment venu de demander son congé et dit à Julien : « Jusqu'ici, j'ai été à ton service : permets-moi maintenant d'être au service de Dieu. Que celui qui a l'intention de combattre accepte ton donativum. Moi, je suis soldat du Christ, je n'ai pas le droit de combattre ». Mais Julien ne l'entend pas de cette oreille et le traite de lâche. Martin propose alors de se tenir le lendemain sans armes, sans bouclier et sans casque devant les lignes et, sûr d'être protégé par la Croix, il s'engage à pénétrer ainsi dans les bataillons ennemis. De peur qu'il se sauve, Julien le fait emprisonner durant la nuit qui précède la bataille. Mais celle-ci n'eut jamais lieu : l'ennemi envoya un messager pour négocier la paix.

Suite à cet événement, Martin se serait retrouvé libre de tout engagement, Grâce à lui, toute effusion de sang et toute perte humaine ont été évitées. Julien aurait alors consenti à le libérer de ses obligations militaires.

Pourtant, selon Sulpice-Sévère qui fut, dès le vivant de Martin, son disciple et son biographe, Martin aurait encore servi deux années dans l'armée avant de se faire baptiser à Pâques, toujours en garnison à Amiens. Ainsi s'est affirmée sa vocation chrétienne au moment où se terminait sa période militaire. Catéchumène exemplaire, il a rayonné au milieu de ses compagnons d'armes par l'exemple de ses vertus chrétiennes. Elles préfiguraient déjà le mode d'existence monacale qu'il adoptera par la suite.

Martin quitte l'armée du Rhin et entreprend un long voyage jusqu'à Poitiers. Depuis sa rencontre avec l'évêque Paulin, il brûle de connaître Hilaire dont la réputation de sainteté et de fermeté dans la défense de la foi catholique se répand en Gaule.

Simple catéchumène, Martin éblouit déjà ses contemporains par sa sainteté. Il vit dans la pauvreté, donnant tout ce qu'il possède, et se complaît dans l'humilité – il se fait le serviteur de son serviteur. Enfin il témoigne d'une foi à toute épreuve, ne vivant que par son Dieu et pour Lui, ne doutant jamais de Sa Miséricorde comme en témoigne son attitude à la veille de la bataille. 

Saint Martin, donne-nous ta foi, ta charité, ton humilité, ton espérance. Pour que le Seigneur fasse Sa Demeure en nous comme Il la fit en toi. 

Que notre prière à la Vierge Marie nous obtienne des vertus à l'image de celles que tu as pratiquées.

Je vous salue, Marie…



Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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