Carême Dimanche V (29/03/20) : "Déliez-le, et laissez le aller !"

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Durant ce carême, cette quarantaine où nous vivons dans le confinement d'un monde attaqué par une terrible pandémie, traversons ce désert, en priant pour les malades atteints par Covid-19, pour ceux qui nous ont quitté, pour les soignants et tous ceux qui nous permettent de vivre, avec le regard fixé vers la lumière de la résurrection et de la sortie de cette crise. Amen.

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

Du livre du prophète Ézékiel : 

Ainsi parle le Seigneur Dieu : Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple, et je vous ramènerai sur la terre d'Israël. Vous saurez que Je suis le Seigneur, quand j'ouvrirai vos tombeaux et vous en ferai remonter, ô mon peuple ! Je mettrai en vous mon esprit, et vous vivrez ; je vous donnerai le repos sur votre terre. Alors vous saurez que Je suis le Seigneur : j'ai parlé et je le ferai – oracle du Seigneur.

De l'Évangile de Jésus Christ selon saint Jean : 

En ce temps-là, il y avait quelqu'un de malade, Lazare, de Béthanie, le village de Marie et de Marthe, sa sœur. Or Marie était celle qui répandit du parfum sur le Seigneur et lui essuya les pieds avec ses cheveux. C'était son frère Lazare qui était malade. Donc, les deux sœurs envoyèrent dire à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade. » En apprenant cela, Jésus dit : « Cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. » Jésus aimait Marthe et sa sœur, ainsi que Lazare. Quand il apprit que celui-ci était malade, il demeura deux jours encore à l'endroit où il se trouvait. Puis, après cela, il dit aux disciples : « Revenons en Judée. » Les disciples lui dirent : « Rabbi, tout récemment, les Juifs, là-bas, cherchaient à te lapider, et tu y retournes ? » Jésus répondit : « N'y a-t-il pas douze heures dans une journée ? Celui qui marche pendant le jour ne trébuche pas, parce qu'il voit la lumière de ce monde ; mais celui qui marche pendant la nuit trébuche, parce que la lumière n'est pas en lui. » Après ces paroles, il ajouta : « Lazare, notre ami, s'est endormi ; mais je vais aller le tirer de ce sommeil. » Les disciples lui dirent alors : « Seigneur, s'il s'est endormi, il sera sauvé. » Jésus avait parlé de la mort ; eux pensaient qu'il parlait du repos du sommeil. Alors il leur dit ouvertement : « Lazare est mort, et je me réjouis de n'avoir pas été là, à cause de vous, pour que vous croyiez. Mais allons auprès de lui ! » Thomas, appelé Didyme (c'est-à-dire Jumeau), dit aux autres disciples : « Allons-y, nous aussi, pour mourir avec lui ! » À son arrivée, Jésus trouva Lazare au tombeau depuis quatre jours déjà. Comme Béthanie était tout près de Jérusalem – à une distance de quinze stades (c'est-à-dire une demi-heure de marche environ) –, beaucoup de Juifs étaient venus réconforter Marthe et Marie au sujet de leur frère. Lorsque Marthe apprit l'arrivée de Jésus, elle partit à sa rencontre, tandis que Marie restait assise à la maison. Marthe dit à Jésus : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. Mais maintenant encore, je le sais, tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l'accordera. » Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera. » Marthe reprit : « Je sais qu'il ressuscitera à la résurrection, au dernier jour. » Jésus lui dit : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s'il meurt, vivra ; quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? » Elle répondit : « Oui, Seigneur, je le crois : tu es le Christ, le Fils de Dieu, tu es celui qui vient dans le monde. Ayant dit cela, elle partit appeler sa sœur Marie, et lui dit tout bas : « Le Maître est là, il t'appelle. » Marie, dès qu'elle l'entendit, se leva rapidement et alla rejoindre Jésus. Il n'était pas encore entré dans le village, mais il se trouvait toujours à l'endroit où Marthe l'avait rencontré. Les Juifs qui étaient à la maison avec Marie et la réconfortaient, la voyant se lever et sortir si vite, la suivirent ; ils pensaient qu'elle allait au tombeau pour y pleurer. Marie arriva à l'endroit où se trouvait Jésus. Dès qu'elle le vit, elle se jeta à ses pieds et lui dit : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. » Quand il vit qu'elle pleurait, et que les Juifs venus avec elle pleuraient aussi, Jésus, en son esprit, fut saisi d'émotion, il fut bouleversé, et il demanda : « Où l'avez-vous déposé ? » Ils lui répondirent : « Seigneur, viens, et vois. » Alors Jésus se mit à pleurer. Les Juifs disaient : « Voyez comme il l'aimait ! » Mais certains d'entre eux dirent : « Lui qui a ouvert les yeux de l'aveugle, ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? » Jésus, repris par l'émotion, arriva au tombeau. C'était une grotte fermée par une pierre. Jésus dit : « Enlevez la pierre. » Marthe, la sœur du défunt, lui dit : « Seigneur, il sent déjà ; c'est le quatrième jour qu'il est là. » Alors Jésus dit à Marthe : « Ne te l'ai-je pas dit ? Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu. » On enleva donc la pierre. Alors Jésus leva les yeux au ciel et dit : « Père, je te rends grâce parce que tu m'as exaucé. Je le savais bien, moi, que tu m'exauces toujours ; mais je le dis à cause de la foule qui m'entoure, afin qu'ils croient que c'est toi qui m'as envoyé. » Après cela, il cria d'une voix forte : « Lazare, viens dehors ! » Et le mort sortit, les pieds et les mains liés par des bandelettes, le visage enveloppé d'un suaire. Jésus leur dit : « Déliez-le, et laissez-le aller. » Beaucoup de Juifs, qui étaient venus auprès de Marie et avaient donc vu ce que Jésus avait fait, crurent en lui. (Jn 11, 1-45)

Le prophète Ézéchiel t'avait entendu, lorsque tu lui disais : « je vais ouvrir vos tombeaux ! »

Lève-toi et marche ! C'est une expression commune du langage que l'on utilise pour désigner quelque chose d'impossible à faire, et, d'une certaine façon, moquer le ridicule d'une demande. Sans doute en ton temps en était-il de même. L'épisode de la résurrection de Lazare est un des plus connus, des croyants comme des autres, et entre dans la culture collective.

Il faut dire que Lazare n'est, pour toi, pas n'importe qui. Frère de Marthe et de Marie, qui t'ont reçu dans leur maison, Lazare est ton ami, celui que tu aimes. Nous ne connaissons pas entièrement ton histoire avec lui, mais ce qu'en rapporte Jean est assez explicite. Lorsqu'on vient te rapporter sa maladie, pour, sans te le demander de façon claire, tu viennes le guérir, tu n'as pas l'air surpris, et tu annonces qu'il se joue là un évènement qui conduit à la manifestation de la gloire de Dieu, anticipant ce qu'il va se passer et l'impact que cela aura sur les gens, jusqu'à aujourd'hui. L'ordre des choses aurait voulu te voir partir sur-le-champ, mais tu attends deux jours, avant de dire à tes disciples qu'il faut aller en Judée. Ils ne sont pas d'accord, les disciples, parce qu'ils connaissent l'hostilité et la haine que te voue cette région. Ils ont peur de te voir mourir, mais tu leur explique que, marchant en plein soleil, rien ne peut arriver. Il s'agit, évidemment, ici, de toi Lumière du monde, protégé jusqu'à ce que ton heure arrive. Lazare est endormi, dis-tu, et il te faut aller le réveiller. Alors les disciples, toujours aussi incrédules, ne comprennent pas : il se réveillera bien tout seul ! Mais dans ta bouche, toi, pleinement Dieu, le sommeil signifie la mort. Lazare est mort ! Malgré leurs peurs, ils se résolvent à te suivre, quitte à mourir comme Lazare.

Cela fait quatre jours que Lazare est mort, au tombeau, en décomposition, lorsque tu arrives dans le petit village de Béthanie, tout près de Jérusalem. En t'approchant de la ville Sainte, tu le sais, tu es non loin de ta passion, et pourtant, tu accomplis ce que l'Écriture annonce depuis les siècles. De nombreux juifs sont là, qui réconfortent les deux sœurs.

C'est Marthe, qui t'accueille. Elle te reconnait Fils de Dieu, elle sait que pour toi rien n'est impossible, et que ta volonté s'accomplira. Ta volonté, c'est la résurrection de Lazare, mais connaissant l'annonce de ton Royaume, elle sait déjà qu'il renaîtra au jour dernier, auprès de toi. Elle ne comprend pas que tu parles d'une résurrection immédiate, mais comment le pourrait-elle, elle qui sent l'odeur nauséabonde de ce corps en décomposition ?

« Je suis la résurrection et la vie ». Proclamation qui marque tous tes disciples. Il suffit de croire en toi pour avoir la vie. Alors, comprenant, elle va chercher sa sœur, Marie. Marie parle beaucoup moins, et pleure. Fait étrange, auquel tu ne nous habitues pas, tu pleures avec elle. C'est à la fois la manifestation de ta pleine humanité, qui ressent la souffrance de la perte d'un être cher, et la manifestation du Dieu miséricordieux, qui souffre avec ses créatures, dans chaque deuil vécu. Voilà ta pleine compassion à l'œuvre : tu souffres avec nous, comme tu ris avec nous ! Une fois de plus, tu provoques la division de ceux qui sont là, car tes pleurs sont interprétés à la fois comme la preuve de ton immense amour pour Lazare, mais aussi comme ton impuissance face à une mort que tu n'as pu empêcher, et donc ton discrédit.

Tu te reprends, tu vas jusqu'au tombeau creusé dans le roc. Tu ordonnes qu'on ouvre la tombe, mais les gens autour de toi sont un peu embêtés : depuis quatre jours qu'il est mort, il dégage une odeur à peine soutenable, sans parler de son aspect. Personne n'a envie d'assister à cela. C'est une entrave à ta résurrection. Mais tu insistes auprès de Marthe, lui rappelant sa profession de Foi, qu'elle avait déjà oubliée. Et on t'écoute.

L'Évangile ne dit pas la réaction de la foule face à la décomposition. Toi tu n'entres pas. Il est légitime d'imaginer que tous sont saisis d'effroi par la scène, qu'il y a des cris, des étouffements, des relents de dégoût, car ni la vue ni l'odeur de la mort à l'œuvre ne sont agréables au vivant. Peut-être est-ce pour couvrir ce brouhaha que tu cries. Peut-être sans doute ordonnes-tu à la mort de façon ferme parce que tu es Dieu et que tu la domines : « Viens dehors ! »

Ils attendaient sans doute plus : un rituel, des gestes, une incantation magique, une aspersion d'eau, une imposition des mains. Mais tu es la Parole, tu es le Verbe. Alors tu t'adresses à l'âme, que tu appelles par son prénom, et tu lui dis simplement ce que tu attends : « Lazare, viens dehors ! » C'est aussi simple, c'est la sortie du tombeau, c'est le passage de l'ombre à la Lumière, de la Ténèbre qu'est la mort à la Vie que tu es.

Et Lazare sort, quatre jours après sa mort, avec les pieds et les mains liés dans leurs bandelettes, couvert de son suaire. Alors tu t'adresses aux hommes : « Déliez-le, et laissez le aller ! »

Après ta parole et le miracle, la foi de certains de ceux qui étaient là se manifestent. Mais visiblement, il en reste qui, bien qu'ils aient vu, ne croient pas.

L'histoire de Lazare, c'est un scénario de vie et de conversion : on t'annonce un mal, la mort arrive, tu viens, tu prends avec toi la souffrance, tu parles, un retour à la vie, un retour à la Foi. Nous sommes tous, au fond, des Lazare. Nous vivons tous des maux qui nous anéantissent, qui provoquent nos chutes, des morts symboliques et au combien dévastatrices. Nous pouvons alors rester chez nous, se satisfaire de la déchéance et du silence moribond, mais toi, tu nous pousses à l'insatisfaction, tu nous pousses à t'appeler, et de nos morts tu fais renaître l'homme nouveau, comme le grain de blé enterré qui meurt dans l'obscurité, et qui pourtant fera se lever l'épi qui murira au soleil d'été.

L'histoire de Lazare, c'est une histoire d'amour, d'amitié profonde, de l'homme-Dieu qui guéri celui qu'il aime. Nous le savons, tout ce que tu accomplis devant les scribes et les pharisiens te propulse à ta chute, mais « il n'est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. »

L'histoire de Lazare, c'est la preuve que ta Parole n'est pas faite de jolis mots qui s'envolent dans le vent, mais est le Verbe en action qui permet à toute chose de s'accomplir. Même après quatre jours de putréfaction, Lazare revient à la vie !

L'histoire de Lazare, c'est une manifestation, pour que ceux qui sont là voient, assistent au miracle de la résurrection, afin que face à la Vérité, la Foi les gagne. Et pourtant, nous le savons, il y en aura toujours pour dire : « mais non, ce n'est pas vrai, Lazare n'était peut-être pas vraiment mort, ou peut-être a-t-on changé le corps… » Heureux ceux qui croient sans voir, car ils n'ont pas besoin de répondre à ces questions.

L'histoire de Lazare, enfin, c'est la préfiguration de ta propre mort sur la croix, de ta mise au tombeau et de ta résurrection glorieuse au troisième jour.

Seigneur, nous qui croyons sans avoir vu, ou qui voyons sans croire, crie-nous de sortir de nos tombeaux, de nos prisons, des murs que nous érigeons, pour renaître, revivre, et sortir à la pleine lumière du soleil ;

O Christ, Lazare était ton ami ; permets-nous, à notre tour d'être tes amis, de trouver Grâce à tes yeux ; viens auprès de nous, avec ta compassion et ta miséricorde, pour nous accompagner sur nos chemins de conversion ;

Seigneur, que ton esprit balaye les odeurs nauséabondes de la putréfaction due au péché, engendrée par Satan, pour l'odeur agréable du parfum fleuri de Marie, sœur de Marthe, des roses qui accompagnent Marie, ta Sainte Mère, pour que nous abandonnions nos visions d'apocalypse pour l'espérance de la résurrection ;

Par toi, Dieu le Père, créateur de toute chose ; avec toi, Dieu le Fils, Verbe Vivant ; en toi, Dieu le Saint-Esprit, qui ne cesse de souffler ses dons ; toi Dieu Un, unique et unitaire, Père, Fils et Esprit-Saint, Trinité insondable depuis le commencement, maintenant, et pour toujours,

Amen, Maranatha ! (durant le carême, nous ne disons pas Alléluia, mais Maranatha, qui signifie en Araméen « Seigneur, viens ! »)


Prière finale pour le Carême en temps de confinement :

Seigneur Jésus Christ, en marchant dans tes pas de carême, nous vivons le confinement d'une maladie qui attaque notre monde. Lorsque tu es parti au désert, tu as jeûné ; tu as été tenté par le diable, mais par ta Parole tu as vaincu. Dans ces moments d'isolement imposés, nous parcourons nos déserts existentiels, périphériques, profonds et enfouis. Nous allons faire face à nos démons, qui, bien cachés, nous paralysent. Nous allons jeûner physiquement et spirituellement, pour nous dépouiller du superflu qui nous alourdit, et redécouvrir la vraie valeur de ce et ceux qui nous entourent. Donne-nous, Seigneur, d'avoir le courage de faire la Lumière sur les démons de nos caves, et de rejeter comme toi vigoureusement Satan et ses œuvres. Donne-nous, ô Christ, d'accepter notre croix, dans l'espoir et la certitude de la résurrection, Bonne Nouvelle que tu nous envoies annoncer. Rappelle-nous, agneau de Dieu immolé, qui enlève le péché du monde, que lorsque nous assistons un affamé, un assoiffé, un pauvre, un malade, un enfant, un aveugle, une brebis égarée, c'est à toi que nous le faisons. Dans ton infinie miséricorde, délivre-nous de cette terrible pandémie. Amen, Maranatha.

Prière de la communauté

Talitha Koum : réveille-moi, Seigneur !

Réveille-moi, Seigneur, de mes sommeils et de mes peurs, comme tu as réveillé la petite fille morte à qui tu as murmuré « Talitha Koum ». Pose ta main sur la mienne, ôte de moi les idées mortifères. Pardonne-moi dans ta Divine Miséricorde. En toi je m'abandonne, pour laisser les promesses de ce monde, et vivre de ta Providence. A tes pieds je dépose ce qui m'encombre pour devenir serviteur et pauvre, avec la joie parfaite de me mettre à ta suite. Donne-moi de vivre pleinement la fraternité, en œuvrant pour l'unité des chrétiens et l'amitié des croyants. Oui, réveille-moi, Dieu Tout-Puissant, Père, Fils et Saint-Esprit, avec l'aide de la bienheureuse Vierge Marie, afin que, relevé, je vive entièrement dans ton amour par une charité simple, une foi profonde, et dans l'espérance de ton Royaume. Amen.

Merci ! 5 personnes ont prié

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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Journal chrétien - Le Quotidien Jésus - Talitha Koum

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