Sauve ton Peuple, Seigneur, et bénis ton héritage, accorde à tes fidèles victoire sur les ennemis et sauvegarde par ta Croix les nations qui t'appartiennent.

Revêtue d'une dimension universelle, la croix se dresse sur le Golgotha, lieu du crâne, considéré comme le centre du monde. On distingue sous la terre les restes d'Adam, le premier homme. Il sera ainsi le premier racheté par le sang qui coule du côté du Sauveur. Le Christ nu rachète la nudité d'Adam au Paradis. Sur les icônes orthodoxes, est représentée une petite traverse sous les pieds du Sauveur : c'est la balance de justice, car par la Croix, le Christ relie les trois espaces où se réalise le Salut : le Ciel dont il vient, la Terre où "il habité parmi nous" (Jn 1,14) et les Enfers où il s'apprête à plonger pour libérer les enchaînés.

En proie à une vive douleur et pourtant impassible dans sa souffrance, la sainte Mère vit dans son âme la Crucifixion de son Enfant. La communion entre eux a-t-elle jamais été aussi forte ? L'attitude sobrement douloureuse de la Vierge montre qu'elle ne laisse pas de place à la révolte mais participe par l'amour au sacrifice de celui qui donne sa vie pour nous. Comme toujours, elle a les mains tendues vers son Fils. Elle est l'Hodigitria, celle qui montre le chemin du Salut. Le léger infléchissement du corps de Jésus vers Marie et la tête inclinée laissent à penser que la mort est imminente. Le visage, également tourné vers Marie, garde une expression de grave majesté dans la souffrance. La Mère regarde son Fils avec tendresse et, au-delà, elle regarde Jean. "Femme voici ton fils" (Jn 19,26).

Il est triste, Jean, comme l'indiquent la main qui soutient sa tête et les larmes qu'il tâche d'essuyer avec son manteau. Son regard est perdu, tourné vers l'intérieur. Précieux témoin des dernières paroles du Maître, il médite plus qu'il ne contemple le mystère de la Passion.

Mais sur le calvaire, c'est aussi le nouvel arbre de vie qui s'élance vers le ciel. Car le Seigneur ne pend pas à la Croix, il est comme délivré de l'attraction terrestre. Debout, il se tient, les bras étendus, comme le célébrant à l'autel. "Ma vie, personne ne me la prend, c'est moi qui la donne" (Jn 10, 18). Ni sang ni couronnes d'épines, c'est déjà la représentation du sacrifice non sanglant réalisé en chaque Eucharistie. Notre présence auprès du Crucifié apporte consolation à celui qui a bien voulu "effacer la cédule de nos péchés" (Col 2,14).