Méditation mercredi 13 mars : Ce monde dans lequel nous vivons

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Alors Joseph mourut, ainsi que ses frères et toute cette génération. Les fils d’Israël étaient fertiles ; ils pullulèrent, devinrent nombreux et très très forts, le pays fut rempli par eux.
Il se leva un nouveau roi sur l’Égypte qui n’avait pas connu Joseph.

Pourquoi cette mention de Joseph ? En quoi a-t-il été si important dans l’histoire du peuple hébreu mais aussi de l’Égypte ? Vous le savez, Joseph, abandonné dans une citerne par ses frères, est recueilli par des marchands ismaélites qui vont le vendre à Potiphar, l’eunuque de Pharaon. Après bien des péripéties, Joseph est appelé pour interpréter deux songes de Pharaon auquel il prédit sept années de vaches grasses suivies par sept années de vaches maigres. Pharaon le nomme alors intendant du royaume. Grâce à Joseph, le pays va échapper à la famine.

Au départ, Pharaon est seul en vis-à-vis de son peuple, monarque absolu. Joseph introduit une médiation, celle de la parole de Dieu. Par l’intermédiaire de Joseph, Pharaon écoute une parole qui n’est pas la sienne, une parole qui donne vie à tout son peuple. Et il institue Joseph, un étranger, comme médiateur entre lui et son peuple. Il y a donc de l’autre dans la relation qui ouvre à une fécondité inattendue. Le pouvoir de Pharaon n’est pas absolu. Une parole le précède et le transcende. Plus tard, Joseph, fera venir son peuple qui connaît la famine. Le peuple, par son travail, va contribuer à la richesse de l’Égypte.

Mais Joseph meurt, puis Pharaon. Avec eux disparaît la mémoire de cette ouverture à une parole autre, source de fécondité. Pharaon se retrouve de nouveau seul face à son peuple, dans une relation totalisante, l’illusion de la toute-puissance. La parole n’est plus reçue d’un autre mais enfermée sur elle-même. Cette situation d’enfermement provoque peur et violence, jusqu’au meurtre. La différence est insupportable, l’autre représente une menace. 

Il dit à son peuple : Voici, le peuple des fils d’Israël est plus grand et plus fort que nous. Allons, agissons sagement en ce qui le concerne de peur qu’il ne devienne plus nombreux. Une guerre pourrait arriver, il se joindra, lui aussi, à nos ennemis, il nous fera la guerre et il montera du pays. 

Ils placèrent sur lui des chefs de corvée afin de l’opprimer par leurs travaux forcés. Il bâtit des villes-entrepôts pour le Pharaon, Pitom et Ramsès. 

Mais plus ils l’opprimèrent, plus il devenait nombreux, et plus il se répandait. Ils redoutaient les fils d’Israël. 

Les Égyptiens imposèrent aux fils d’Israël un travail forcé avec violence. Ils rendirent leur vie amère par un travail dur avec du mortier et des briques et par tout travail aux champs et tout le travail auquel ils étaient astreints avec violence. 

Le roi d’Égypte dit aux sages-femmes des femmes hébraïques dont la première s’appelait Shifra et la deuxième Poua. Il dit : Lorsque vous accouchez les femmes hébraïques, faites attention au sexe : si c’est un garçon vous le ferez mourir, si c’est une fille, alors elle vivra. Les sages-femmes craignirent le dieu et ne firent pas comme leur avait dit le roi d’Égypte, elles laissèrent vivre les garçons. 

Le roi d’Égypte appela les sages-femmes et leur dit : pourquoi avez-vous fait cela et laissé vivre les garçons ? 

Les sages-femmes dirent au Pharaon : Vraiment, elles ne sont pas comme les femmes égyptiennes, les Hébraïques. Vraiment, ce sont des bêtes, avant que la sage-femme ne vienne chez elles, elles ont enfanté. 

Dieu fit du bien aux sages-femmes ; le peuple se multiplia, et ils devinrent très forts. Et parce que les sages-femmes avaient craint le dieu, il leur fit des maisons. Alors Pharaon ordonna à tout son peuple : Tout fils qui est né, dans le Nil vous le jetterez, et toute fille, vous la laisserez vivre.

L’histoire est toujours la même : ces tribus venues de Canaan et réfugiées en Égypte étaient les bienvenues pour faire les tâches les plus ingrates, participer aux travaux de construction pharaoniques... Mais les Hébreux se multiplièrent et les Égyptiens prirent peur : l’autre, l’étranger devient une menace. Il faut prendre des mesures pour en limiter l’influence, pour qu’il reste à sa place marginale... Pourtant rien objectivement dans l’attitude des Hébreux n’indique une quelconque menace. Le peuple projette ses propres peurs.

Pensons aux hommes que nous avons fait venir du Maghreb après la guerre pour aider à la reconstruction du pays. Nous avions besoin alors d’une main d’œuvre nombreuse. Seulement les choses ne se sont pas passées comme nous l’imaginions. Loin de repartir dans leur pays une fois le travail accompli, ces hommes ont fait venir leurs familles, s’installant durablement sur le sol français. Et certains « Français de souche » prirent peur : « Nous ne sommes plus chez nous ; qu’ils retournent chez eux ! »

Arrêtons-nous à l’attitude de Pharaon. Cet homme est du côté de la toute-puissance. Rien ne lui résiste. N’est-il pas considéré comme un dieu par son peuple ? Et pourtant, sous cette puissance apparente, se cache une grande fragilité : Pharaon est prisonnier, esclave de sa peur. Il est à l’affut de tout ce qui pourrait remettre en cause son pouvoir. L’autre est toujours une menace potentielle qu’il s’agit de contrôler, voire éliminer.

Son regard sur les hébreux change et se durcit peu à peu. De partenaires, ils deviennent une menace. Il va alors prendre une série de mesures, toujours plus radicales : il leur impose des travaux forcés ; puis il durcit encore les conditions de travail, les réduisant en esclavage ; mais cela ne marche pas, la vie est toujours la plus forte et leurs enfants sont toujours aussi nombreux. Pharaon ordonne alors de tuer tout nouveau-né de sexe masculin.

Mais c’était compter sans les femmes. Les femmes sont toujours du côté de la vie. Comment des sages-femmes dont la tâche, précisément, est d’aider à mettre au monde, pourraient-elles supprimer une vie ?

Un homme de la maison de Lévi s’en alla et prit une certaine fille de Lévi.
La femme devint enceinte, elle enfanta un fils et elle le vit : il était beau. Elle le cacha pendant trois mois.
Lorsqu’elle ne pouvait plus le cacher, elle prit pour lui une caisse de papyrus, elle l’enduisit de bitume et de poix. Elle y mit l’enfant, puis elle la mit dans les joncs près du bord du Nil. Sa sœur se plaça au loin pour savoir ce qui lui serait fait.
La fille du Pharaon descendit pour se laver dans le Nil et ses suivantes marchaient le long du Nil. Alors elle vit la caisse au milieu des joncs et elle envoya sa servante. Elle la saisit et l’ouvrit. Elle regarda, lui l’enfant, et voici, c’était un garçon qui pleurait. Elle eut pitié de lui, et dit : Celui-ci est un des enfants des Hébreux.
Sa sœur dit à la fille de Pharaon : Est-ce que j’irai et je t’appelai une nourrice parmi les femmes hébraïques pour qu’elle allaite pour toi l’enfant ?
La fille de Pharaon lui dit : Va ! La jeune fille alla et appela la mère de l’enfant. La fille de Pharaon lui dit : Emmène cet enfant, et c’est moi qui te donnerai ton salaire. La femme prit l’enfant et l’allaita.
L’enfant grandit et elle l’amena à la fille du Pharaon, et il devint pour elle un fils ; elle lui donna le nom de Moïse et elle dit : Des eaux, je l’ai tiré.

La mère de Moïse ne put non plus se résigner à la mort de son fils. Elle le confia au fleuve dans une caisse de papyrus. Le mot hébreu utilisé pour désigner cette caisse revient deux fois dans la Bible : il désigne à la fois l’Arche de Noé et la caisse qui sauva Moïse. Noé construit l’arche et sauve l’humanité et la faune futures ; la mère construit une arche pour son peuple en préservant la vie de son libérateur. Le mot « roseaux » fait allusion à la mer des Joncs que les Hébreux traverseront pour échapper au Pharaon et être sauvés.

La fille de Pharaon voit l’enfant, elle se laisse toucher par sa détresse, elle a pitié de lui. C’est l’expression de la miséricorde-même de Dieu. Jésus, pareillement, regarde la personne en détresse et a pitié ; il est saisi aux entrailles par la misère des hommes.

Dieu sauve à sa manière. Il nous rejoint toujours là où on ne l’attend pas. Moïse est sauvé par la fille même de Pharaon ! Dieu se joue des catégories. Il ne sépare pas les hommes en deux : les justes et les injustes, les purs et les impurs... Dieu ne juge pas d’après les apparences... Quelques siècles plus tard, il choisira Cyrus, roi de Perse, pour libérer son peuple en Exil et le ramener à Jérusalem.

Comme souvent dans la Bible, le nom donné à une personne marque aussi sa mission. Or Moïse ne reçoit pas son nom de sa mère biologique mais de la fille de Pharaon, qui devient ainsi sa mère adoptive. Moise a deux mères... Il va se trouver tiraillé entre deux cultures, deux peuples, deux identités... Voire trois puisque, après sa fuite dans le désert, il épousera la fille de Jéthro, un prêtre de Madiân, en pays païen.

Le prénom qui lui est donné, Moïse, n’est pas un prénom hébreu mais égyptien. Le peuple hébreu va pourtant lui chercher une racine hébraïque, qui dit son identité et sa mission ; l’étymologie populaire le traduit donc ainsi : « Je l’ai tiré des eaux » (Ex 2,10).
Or la mission de Moïse sera de « sauver des eaux son peuple ». Sa mission trouve sa source, s’enracine, dans sa blessure même.

Cela veut dire que nous n’avons pas à avoir peur de nos blessures. Les reconnaître, les accueillir, nous ouvre à une dimension unique de notre vocation personnelle. Nos blessures sont le lieu où Dieu nous rejoint et nous appelle. Elles sont le lieu de la grâce.

 

Prière de la communauté

Mon Père, je m’abandonne à Vous (Bx Charles de Foucauld)

Mon Père, je m’abandonne à Vous, faites de moi tout ce qu’il vous plaira. Quoique vous fassiez de moi, je vous remercie. Je suis prêt à tout. J’accepte tout, pourvu que votre volonté se fasse en moi, en toutes vos créatures ; je ne désire rien d’autre, mon Dieu. Je remets mon âme entre vos mains, je vous la donne, ô mon Dieu, avec tout l’amour de mon cœur, parce que je vous aime, et que ce m’est un besoin d’amour de me donner, de me remettre entre vos mains, sans mesure, avec une infinie confiance car vous êtes mon Père !

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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