J17 - Troisième dimanche - Cette joie qui fortifie

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Evangile de Jésus-Christ selon saint Luc (3,10-18)

En ce temps-là, les foules qui venaient se faire baptiser par Jean lui demandaient : « Que devons-nous faire ? » Jean leur répondait : « Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas ; et celui qui a de quoi manger, qu’il fasse de même ! » Des publicains (c’est-à-dire des collecteurs d’impôts) vinrent aussi pour être baptisés ; ils lui dirent : « Maître, que devons-nous faire ? » Il leur répondit : « N’exigez rien de plus que ce qui vous est fixé. » Des soldats lui demandèrent à leur tour : « Et nous, que devons-nous faire ? » Il leur répondit : « Ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort ; et contentez-vous de votre solde. » Or le peuple était en attente, et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Christ. Jean s’adressa alors à tous : « Moi, je vous baptise avec de l’eau ; mais il vient, celui qui est plus fort que moi. Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Il tient à la main la pelle à vanner pour nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas. » Par beaucoup d’autres exhortations encore, il annonçait au peuple la Bonne Nouvelle.

1-Commentaire évangélique : de la force et de la joie

Chaque année, le troisième dimanche du temps de l’Avent est celui de Gaudete, c’est-à-dire celui de la joie. Et effectivement, tout le peuple se trouve « en attente [se demandant] en eux-mêmes si Jean n’était pas le Christ ». C’est que la venue tant espérée du Messie est un sujet de grande joie ! Cette joie intense a des motifs bien différents au sein du peuple. Pour les uns, elle vient donner du sens à des vies jugées parfois inutiles ou brisées. Le Christ viendrait alors établir un Royaume, celui de Dieu, où chacun aurait sa place – une bonne et juste place – donnant au passage une seconde chance même aux publicains et aux prostituées (Mt 21,28). Pour d’autres, très nombreux eux aussi, le Christ viendrait chasser l’occupant romain, supprimant le poids des impôts et des lois étrangères à celles laissées par Moïse à Israël. Pour d’autres encore, la venue tant attendue du Christ serait l’occasion de consacrer leur vie à son service et au service de son Royaume. Ces perspectives diverses et non exhaustives ont toutes un point commun : elles sont la source d’une grande joie.

Jean le Baptiste recueille cette joie des foules venant à lui, et il ne la contredit surtout pas ! Il en donne au contraire un autre motif, qui regroupe tous les autres : il y a de la joie à se préparer à recevoir Celui qui va naître, parce qu’il est « fort », si bien que « lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu ». Quant aux ennemis, ils finiront par être brûlés « au feu qui ne s’éteint pas ». Mais sommes-nous sûrs de bien comprendre ces paroles, de bien comprendre ce grand motif de joie ? Que les rebelles refusant le Royaume soient conduits à être éternellement consumés par le feu, ceci est un point facile à comprendre et à se représenter, même si cela nous dérange évidemment. Mais que signifie que le Christ à venir est « fort » ? Que signifie que le peuple sera baptisé « dans l’Esprit Saint et le feu » ?

Concernant la première question, Jean n’envisage pas la force du Messie sous l’angle de la puissance physique. Cette dernière n’est pas une préoccupation pour le Baptiste. Lui-même ne cherche pas à se sculpter un physique d’athlète : il préfère vivre au désert, se nourrissant de sauterelles et de miel sauvage (Mt 3,4) – nourriture saine… mais ne favorisant pas le développement musculaire ! –. Et quand il sera livré aux mains sanguinaires du roi Hérode, il ne cherchera pas la confrontation avec les soldats venus l’arrêter. La force dont parle Jean se traduit non en performances physiques, mais en comportements convenables, en comportements éthiques dirions-nous aujourd’hui.

Le premier dimanche de ce temps de l’Avent l’avait déjà évoqué ; c’est en restant éveillés et en priant en tout temps, que « vous aurez la force » [Lc 21,36] d’échapper « au feu qui ne s’éteint pas », grâce à cette force divine investissant les cœurs, leur évitant ainsi de s’alourdir dans les soucis de la vie… Aujourd’hui, Jean invite ses auditeurs à mettre concrètement en œuvre cette force. Comment ? Que celui qui peut partager une part de ses biens le fasse, conseille le Baptiste. Ces biens peuvent être des biens matériels (Jean parle de vêtements ou de nourriture), mais ils peuvent aussi bien être, par exemple, du temps à prendre et à partager avec son prochain ! De même, que ceux qui exercent une autorité, voire un leadership, le fassent en n’oppressant pas leurs subordonnés. Car au regard de Jean, la vraie force est celle qui ne cherche pas à se renforcer elle-même au détriment des autres. Au contraire, elle se met au service d’autrui quand elle le peut, tout en sachant se maîtriser quand elle risque d’asservir l’autre. C’est une force morale veillant à la fois sur soi et sur son prochain.

Concernant la question de savoir ce qu’est ce baptême « dans l’Esprit Saint et le feu », Jean-Baptiste se réfère aux promesses de Dieu dans l’Ancien Testament. Le prophète Isaïe évoquait l’Esprit Saint comme un Esprit donnant la vie, même à des cœurs secs comme un désert (Is 32,15 ; 44,3). Ezéchiel, de son côté, annonçait que la venue de l’Esprit transformerait les cœurs de pierre en cœurs de chair, capables désormais de vivre dans une vraie charité fraternelle, plutôt que de croupir dans une conduite dissolue (Ez 36,27-29). Et que dire du prophète Joël pour qui l’Esprit se répandra sur les hommes en les faisant prophétiser à leur tour, bénéficiant de songes et de visions (Jo 3,1) ? Pour qui veut accueillir la présence et la vie de Dieu en lui, oui, voilà de grands motifs faisant tressaillir de joie…

Marie elle-même a exulté de cette grande joie, comme elle le dit dans le Magnificat. Aujourd’hui, Notre-Dame du Mont Carmel intercède pour que nous recevions en nos cœurs, à notre tour, cette allégresse venant de l’Esprit.

Tableau du couvent de Ségovie (Espagne)
« Notre-Dame du Mont Carmel »

2- Méditation : recevoir la joie du Ciel avec Notre-Dame du Mont Carmel

Mater dulcis
Carmeli domina,
Plebem tuam
Reple laetitia
Qua bearis

Ô douce Mère

Qui règne sur le Carmel,

Que ton peuple

Soit rempli de cette joie

Qui te rend heureuse

Notre-Dame du Mont Carmel est une Mère qui règne. Elle est appelée douce Mère et maîtresse (domina) en ce massif s’élevant paisiblement vers le ciel. Et elle est entourée de son peuple. Nous faisons bien sûr partie de ce peuple, si nous sommes les disciples de son Fils.

Avoir Marie pour Mère est une joie consolante. « Sans Marie, le chrétien est un orphelin », a tweeté le pape François le 2 septembre 2014 ! Près d’elle nous trouvons un refuge, un abri maternel, une douceur consolante mêlée à une force revigorante… Car nous avons pour Mère la femme forte évoquée par le livre des Proverbes (Pr 31). Nous avons pour mère la femme qui resta debout au pied de la croix, la femme qui ne douta pas de la résurrection à venir au jour de Pâques.

Au Nord d’Israël, à Nazareth, la Vierge a commencé à concevoir l’enfant-Dieu après l’annonce de l’archange Gabriel. À partir de ce moment, « elle reçut le Verbe de Dieu à la fois dans son cœur et dans son corps », comme l’ont écrit les pères conciliaires de Vatican II, dans la Constitution sur l’Église. Marie n’a donc pas seulement enfanté Jésus en son corps, elle l’a tout autant enfanté en son propre cœur ! On ne peut enfanter un roi sans être soi-même une reine, d’où le règne de Notre-Dame sur le Mont Carmel, règne illustrant son règne dans les hauteurs célestes.

Mère et Reine, que nous dit Notre-Dame du Mont Carmel sur sa relation avec [son] peuple ? La prière du Flos Carmeli nous informe de cette vérité si consolante, si stimulante : la Reine n’étend pas son règne sur les fidèles à la manière d’une reine dominant ses sujets, imposant ses vouloirs ici et là. Au contraire, la Reine qu’elle est partage avec son peuple ses propres privilèges. Car celui-ci n’est pas constitué de serfs ou de domestiques, il n’est constitué que d’enfants ; enfants d’une Vierge-Mère donnant en partage ses prérogatives de Reine. Parmi les élus de Dieu, parmi les saints, il n’y a donc que des Princes au Ciel ! Au Mont Carmel, il n’y a pas de Maîtresse entourée de sujets soumis à ses désirs, tels des domestiques ; il y a une Reine avec sa multitude d’enfants de Roi. Les enfants aiment leur mère, ils cherchent à la servir et à lui faire plaisir bien sûr, mais ils restent fondamentalement libres, ils ne font pas figures de domestiques…

C’est ainsi que la grâce de Notre-Dame « rayonne sur toute la communauté des élus », pour reprendre, là encore, une expression du Concile Vatican II. L’Esprit Saint qui a été donné à Marie, nous est donné en partage à nous aussi. La joie qui fut celle de Marie est celle dont l’Esprit veut nous combler à notre tour, pour que le chrétien actuel soit rempli de cette joie dont la Vierge, à Nazareth, fut la première bénéficiaire.

La maternité et la royauté de Marie s’articulent ainsi aussi harmonieusement qu’indissociablement, tant l’aspiration profonde de Notre-Dame est de faire participer ses enfants au règne qu’elle a elle-même reçu en partage par la venue de Jésus. Ne retenant pas jalousement son privilège d’avoir enfanté le Christ, Marie cherche encore et toujours à communiquer à ses enfants Celui que nous pouvons enfanter à notre tour, en nos cœurs, par la grâce du Saint-Esprit. Et sur ce point encore, Marie est Mère des élus ; car si elle n’avait pas accepté d’accueillir en son cœur et en sa chair la venue du Verbe, comment les hommes auraient-ils pu ensuite accueillir à leur tour Celui… qui ne serait donc pas venu au monde ?! C’est pourquoi Marie est bien Mère de la foi des élus ; l’accueil de la grâce du Christ dans la vie des élus ne peut prendre naissance que suite à l’accueil de cette grâce consenti par la Vierge de Nazareth. La grâce d’une vie en Christ prend naissance dans la maternité divine de Marie, au sens où, sans cette maternité, il n’y aurait aucun élu enfanté.

Aujourd’hui encore, sa prière maternelle nous aide à accueillir le fruit de son cœur et de ses entrailles : Jésus-Christ. Et avec Lui, à accueillir le don joyeux de l’Esprit faisant de nous des enfants du Père.

Dans le regard de Marie, nous pouvons alors deviner combien la joie est présente dans les paraboles que son Fils présentera au sujet du Royaume qui nous attend. Le Royaume des Cieux n’est-il pas, en effet, tantôt présenté comme un joyeux banquet de noces, tantôt comme une joie – celle du Maître – à recevoir en partage (pensons à la parabole des talents…), tantôt comme l’enjouement de la découverte d’une perle précieuse ? Les exemples pourraient se multiplier. Retenons que, vraiment, ce troisième dimanche du temps de l’Avent est celui de la joie ! Et vivons-en au long de la semaine !

Fr. Cyril Robert, ocd (couvent de Paris)

Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

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6 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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L'Avent : Avec Notre-Dame du Mont Carmel

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