Nous croyons toujours, et c’est notre tort, que la sainteté se donne à reconnaître sous le visage de l’exceptionnel, du brillant, du prodigieux... En vérité, nous nous égarons, le Fils de Dieu Lui-même passa la plus grande partie de sa vie dans l’anonymat le plus complet ! Pour tous, Il était le fils de Joseph, le fils du charpentier de Nazareth ! Et personne ne se doutait que la sainteté à l’état pur, le créateur de l’univers se trouvait là, à portée de main, dans un atelier obscur, sciant des planches, rabotant des portes et des fenêtres. Et à sa suite, ils sont nombreux, encore aujourd’hui, les saints et les saintes dont l’existence n’a pas vraiment d’allure, mais dont le cœur pourtant, si on pouvait le toucher et en mesurer l’incandescence d’amour pour Dieu et pour les hommes, nous brûlerait au passage. On passe, on passe à côté de la vie, comme des aveugles, c’est bien connu, et la sainteté, elle, ne nous aveugle pas ! C’est souvent après la mort des êtres, en réfléchissant et en se souvenant de la beauté de leurs gestes et de leurs intentions, que soudain l’on réalise que telle ou telle vie était particulièrement lumineuse, ardente, aimante, priante et donc sainte !

Souvent, nous nous demandons les uns et les autres, ce qu’est l’amour, eh bien, c’est tout simplement la gentillesse, les petites choses de la vie vécues avec beaucoup d’intensité, beaucoup de bonté à l’égard des uns et des autres : ouvrir la porte à quelqu’un, faire passer quelqu’un devant nous, porter le sac d’une personne. Tout cela paraît secondaire, mais à force d’éliminer le secondaire, on devient très primaire. Il faut que nous gardions dans notre cœur ce désir d’être gentil. Ah, parmi nous, beaucoup n’aiment pas ce terme : on le critique, on se méfie, on a l’impression qu’il n’y a pas de personnalité derrière la gentillesse et l’on se trompe. C’est la gentillesse qui signe la bonté et, je dirais même, la présence de Dieu dans une âme.

Les saints sont toujours un peu excessifs, et c’est pourquoi, il est parfois si difficile de vivre avec eux, mais leur démesure d’amour, leur manière de faire, nous renseignent magnifiquement sur ce que Dieu attend de chacun de nous.

Père Michel-Marie Zanotti-Sorkine

(Prédication du 6 juillet 2016)