Saint Yves - Chapitre 2

Image de la publication

Saint Yves entre le riche et le pauvre

 

La tradition a souvent représenté Saint Yves entre le riche et le pauvre, pour illustrer un jugement où, entre l’insolence du riche et l’inquiétude du pauvre, tout tremblant, Yves avait tranché en faveur du pauvre. Sûrement parce que le pauvre était dans son droit. Dans le cas contraire, sa cause aurait été perdue car Yves recherchait avant tout la justice, quelle que soit la condition des plaignants.

Bientôt la réputation d’équité et de sainteté de Maître Yves Hélori dépasse vite les limites de Rennes et se répand en Bretagne, notamment en son pays natal de Tréguier. Ne serait-il pas normal que l’enfant du pays revienne à son lieu d’origine ? Messire Alain de Bruc, évêque de Tréguier, en fait un argument pour réclamer sa nomination à Messire Maurice, évêque de Rennes. Mais celui-ci n’entend pas se séparer de son official qui fait merveille dans cette fonction. Il se fait donc tirer l’oreille et ce petit jeu va durer cinq ans… puis il cède, de guerre lasse, et se montre bon prince puisqu’il offre à Yves Hélori un cheval pour sa route. C’est mal connaître son official qui ne garde jamais aucun bien pour lui-même, à commencer par les revenus de sa charge. Yves s’empresse donc de vendre le cheval, d’en distribuer le prix aux pauvres et se rend à pied à Tréguier.

On ne sait si, de retour, il a pu retrouver en vie dame Azo, sa mère. A-t-elle pu se réjouir de le voir recevoir les ordres mineurs et de le voir accéder au sacerdoce ? On peut le supposer car certains écrits affirment qu’elle a vécu jusqu’en 1290. Le voir ordonner prêtre était, en tout cas, son plus cher désir. Quant à lui, il ne se juge pas digne du sacerdoce, il se décrira même plus tard, dans son testament, comme le plus vil des serviteurs de Dieu.

A partir de 1284, le voilà donc à Tréguier, où il continue d’exercer la charge d’official qui consiste non seulement à juger mais aussi à plaider. Autrement dit, il est à la fois juge et avocat. Quant le requérant est un pauvre, une veuve, un orphelin, il les défend gratuitement après s’être assuré que leur cause est juste. Parfois il s’offre à les défendre avant qu’on le lui demande. On le nomme bientôt l’avocat des pauvres et des misérables. Aujourd’hui les indigents peuvent bénéficier d’une assistance juridique. C’est exactement ce que Saint Yves inventa, en son temps. Il va même plus loin. Quand il s’aperçoit que ses clients n’ont pas les moyens de payer les procès-verbaux, il demande aux notaires du tribunal de le faire pour l’amour de Dieu et s’il observe des réticences, il les en conjure.

Magistrat, avocat, il est aussi et surtout prêtre. Sitôt ordonné, il a été nommé Curé de Tredrez. Pas de messe sans de longues prières préalables, où il se remémore la Passion de Notre Seigneur ce qui lui fait verser des larmes avant de monter à l’autel. Il se juge en effet indigne de célébrer. Pourtant, quand il élève l’Hostie, l’assistance voit parfois un globe de feu. Une colombe lumineuse vole, un jour, au-dessus de sa tête. Son extrême sensibilité le porte à s’émouvoir et à pleurer souvent. Cela lui arrive au confessionnal tandis qu’il écoute ses paroissiens s’accuser d’avoir péché. Tous ces péchés ont cloué le Sauveur sur la Croix et cette pensée lui est insupportable. Quand il a confessé, il prêche. Il prêche le Carême de village en village et il lui est arrivé, le Vendredi Saint, de prononcer jusqu’à sept homélies. Ses paroissiens ne se lassent pas de l’écouter et le suivent d’église en église. De retour dans son presbytère, il ouvre sa porte aux misérables et aux malades qui trouvent asile chez lui. Un jour de famine, il voit arriver quelque deux cent pauvres de la région qui viennent lui demander du pain. Il leur distribue le peu dont il dispose et le pain se multiplie jusqu’à ce que la foule soit rassasiée. Tout ce qu’il possède, tout ce qu’on lui offre, il le donne aux pauvres et, une fois leur pain quotidien assuré, il leur prodigue de saintes paroles. On le voit parcourir la campagne et le bord de mer, portant des secours et des consolations, parlant breton avec ses paroissiens ; il instruit, catéchise, moralise et partage la vie de ses administrés chaque fois qu’il le juge nécessaire. Ainsi il n’hésite pas à se joindre, un jour de tempête, à une équipe de sauvetage à la recherche d’un bateau dans la baie de Locquémeau. Ou bien il aide les goémoniers à charger leur récolte sur leurs charrettes. Lors des grandes fêtes religieuses, Noël, Pâques, Pentecôte et Toussaint, il fait préparer de bons repas, dresser les tables et apporter les plats garnis. Alors seulement, il ouvre les portes et fait entrer tous les pauvres qu’il a pu découvrir. Puis il se met à table à son tour mais ne s’autorise, même ces jours-là, que du pain grossier, des légumes et de l’eau fraîche.

Cette vie de sainteté, Yves la veut au plus profond de lui-même mais elle ne lui fut pas acquise d’emblée. Un confident du saint raconte qu’il dut livrer de difficiles batailles entre la raison et la sensualité avant de vaincre cette dernière au bout de huit longues années. Alors seulement il se mit à prêcher et la qualité de ses homélies fut bientôt reconnue dans tout le diocèse. La neuvième année, il se sépara de ses beaux habits pour se revêtir « d’une cotte à manches longues et larges sans boutons et une housse fort longue, l’une et l’autre de grave allure, taillées dans un drap grossier de bureau blanc, et cela pour pouvoir mieux ramener les brebis du Seigneur à l’amour du Christ. » Ces vêtements qui évoquent une tenue monastique ont peut-être été adoptés par référence à ses modèles dans la pauvreté, ces Frères Mineurs chez qui il avait étudié la théologie à Rennes. Par la suite, Yves renonce au blanc pour choisir le gris, couleur de pénitence.

Ses devoirs de prêtre ne le dispensent pas de ses fonctions au Tribunal. Et chaque fois qu’il s’agit de défendre les plus pauvres, nous avons vu qu’il plaide sans jamais demander de rémunération. Sans doute le talent avec lequel il avance ses arguments n’est pas toujours du goût de la partie adverse car il récolte souvent des insultes, se faisant traiter de coquin, de truand et de gueux. Il y répond par un sourire, tout de béatitude.

 

Le soir, à ses rares moments de détente, Yves Hélori écrivait un livre intitulé Les Fleurs des Saints. Perdu ou détruit par son auteur, le manuscrit n’est pas parvenu jusqu’à nous. Mais les Fleurs de Saint Yves, son immense Amour de Dieu, sa charité exprimée en un don total aux autres, surtout aux plus pauvres, son sens de la justice, son humilité constante nous sont bien présentes.

Qu’il nous inspire et nous donne l’élan suffisant pour marcher à sa suite, mettant nos pas dans ses pas. Avec l’aide de la Vierge Marie.

Je vous salue, Marie…


Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

Merci ! 171 personnes ont prié

7 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

loader

Cheminer avec les Saints en terre de France

Je m'inscris