Sainte Jeanne Jugan Sœur Marie de la Croix - Chapitre 1

Pourquoi Jeanne s’obstine-t-elle à demeurer fille ? Sa mère la pousse à accepter une demande en mariage : « tu ne trouveras pas de meilleur parti ! » Et Jeanne de répondre : « Le Bon Dieu me garde pour une œuvre qui n’est pas encore fondée. »

En cette fin 1816, une grande mission s’était déroulée à Cancale. Des jours de grâce et de ferveur au cours desquels quelque vingt prêtres avaient prêché, confessé, récité le rosaire et fait des visites à domicile. Depuis la signature du Concordat, ils pouvaient exercer librement leur ministère et leurs paroissiens, frustrés pendant tant d’années, vivaient de nouveau avec bonheur leur foi, si ancrée en territoire breton.

En prière, Jeanne avait senti naître en son cœur un grand désir de venir en aide aux pauvres, un désir qui allait changer sa vie. A 24 ans et tandis que la mission prenait fin,  elle venait de choisir le Bon Dieu et, au grand dam de sa mère, refusé cette demande sans doute opportune pour les siens.

Car la famille Jugan est pauvre. A quatre ans, la petite Jeanne, cinquième de sept enfants, a perdu son père, marin terre-neuvas, péri en mer comme tant d’autres. Elle a fait, dès son plus jeune âge, l’expérience de la misère. Habituée à aider sa mère dans toutes les tâches ménagères et les soins aux animaux, elle a su garder du temps pour la prière. Née sous la Révolution, l’église de Cancale étant donc fermée, elle avait quand même reçu une éducation religieuse, alors dispensée en secret par des femmes pieuses. Puis elle avait fait sa Première Communion en 1803. En grandissant, elle était devenue cette jeune fille assidue à la prière, obéissante et travailleuse, soucieuse d’aider les siens. Dans ce but, elle s’était placée, comme employée de cuisine, chez une famille noble de Saint-Coulomb, village voisin de Cancale.

Mais, dès 1817, la pauvreté de sa famille la contraint au départ. Elle s’installe à Saint-Servan, village situé sur la Rance, face à Saint-Malo, où elle est engagée comme infirmière à l’hôpital du Rosais. Elle s’y dévoue, sans épargner ses forces, au point qu’au bout de six ans, elle doit renoncer à cet emploi tant elle est épuisée. A cette époque, elle entre dans un tiers-ordre eudiste et pratique une vie religieuse à domicile. Elle est recueillie par une vieille demoiselle, sans doute eudiste, elle aussi, chez qui elle restera douze ans. Mademoiselle Marie Lecoq est tout occupée de bonnes œuvres et Jeanne seconde avec joie sa maîtresse et amie. Celle-ci meurt, en 1835, lui laissant un petit pécule. Elle se place alors comme journalière.

Elle fait à ce moment-là la rencontre d’une femme plus âgée, Françoise Aubert, qui partage le même idéal de vie, de prière et de soins aux pauvres. Elles louent ensemble un  logement. Bientôt une jeune fille de 17 ans, Virginie Trédaniel se joint à elles.

De nombreuses personnes âgées et sans ressources vivent à Saint-Servan. Ce bourg compte, en effet, une population importante de marins. Ceux-ci s’absentent pour de longues périodes et nombre d’entre eux ne reviennent pas. Les vieux parents restent dans la misère, Saint-Servan n’ayant pas d’hospice pour les accueillir.

Cette situation attendrit le cœur de Jeanne qui veut voler à leur secours. Mais comment ? Elle n’a pas d’argent. Elle se confie à Dieu.

Et voici qu’au début de l’hiver 1839, Jeanne visite une personne âgée, aveugle et paralysée, seule depuis le décès de sa sœur, et sans ressources. Elle parle à Françoise de cette personne en détresse et toutes deux décident de la prendre chez elles, malgré l’exiguïté de leur logement. Cette pauvre infirme, Anne Chauvin, s’inquiète quand Jeanne l’installe dans son propre lit. Où Jeanne va-t-elle dormir, demande-t-elle ? La maison se compose de deux chambres en bas et de deux autres, créées dans le grenier. Jeanne la rassure et va s’installer dans le grenier où elle accède par une échelle. Bientôt la question de la nourriture se pose. L’argent manque. Pour Jeanne, ce n’est pas un obstacle, elle travaillera plus avant dans la nuit. Bientôt elle recueille avec joie une autre pensionnaire, Isabelle Quéru.

Avec Virginie et une nouvelle venue, Marie Jamet, elles décident de former, en 1840, une association de charité. Françoise consent à les aider mais se trouve trop âgée pour s’engager davantage. Le petit groupe s’agrandit vite.

Mais la maison est devenue trop petite pour recevoir de nouveaux malheureux et Jeanne en loue une plus grande où elle emménage le 1er octobre 1841. Un mois plus tard, le nouveau logis fait le plein avec l’arrivée de douze pauvres vieilles femmes. Une jeune ouvrière, Madeleine Bourges, que Jeanne avait recueillie et soignée rejoint le groupe qui prend, en 1842, le nom de Servantes des Pauvres, sous la direction d’un vicaire de Saint Servan, l’abbé Le Pailleur.

« Le Bon Dieu me garde pour une œuvre qui n’est pas encore fondée »

 Nouvelles demandes d’hébergement, nouveau déménagement. Mais la générosité des amis et le revenu des Sœurs qui travaillent ne suffisent plus. « Remplacez-nous, quêtez pour nous ! » conseillent à Jeanne les vieilles pensionnaires qui se rappelaient leur ancienne habitude de mendier. Un religieux de Saint Jean de Dieu, Claude-Marie Gandet, y engage Jeanne aussi. Les frères Saint-Jean de Dieu sont connus dans la région. A Dinan, ils ont créé un hôpital et s’appuient sur une communauté fervente. Le frère Gandet lui offre un panier pour sa quête. Lui-même n’hésite pas à mendier pour ses propres œuvres. Il va donc l’aider en annonçant son passage dans les familles. Mais, au début,  Jeanne est fière et se révolte. Cependant, elle doit se résigner. Il n’y a pas d’autre solution. « Puisque je n’ai plus de pain à leur donner, finit-elle par dire, eh bien j’irai leur en chercher ».

 

Contemplons le parcours de Jeanne, depuis son refus de se marier jusqu’à la Fondation des Servantes des Pauvres. Elle ressent l’appel de Dieu, gagne sa vie en travaillant sans relâche, et connaît déjà, en servant Marie Lecoq, une ébauche de vie religieuse, axée sur le souci des pauvres. Peu à peu, depuis l’accueil de sa première pensionnaire, Anne Chauvin, son œuvre prend corps, grandit, s’épanouit. Vingt-six ans se sont écoulés depuis la révélation de sa vocation jusqu’à la fondation de ce qui deviendra bientôt la Congrégation des Petites Sœurs des Pauvres. Lent travail de Dieu chez une sainte qui se laisse conduire, qui prend patience, qui montre une absolue confiance en son Créateur. Et aussi une sainte pleine d’énergie qui ne désarme jamais et qui travaille sans relâche.

Prière, patience, confiance et action pour le service de Dieu, prenons, nous aussi, exemple sur la sainte qui nous montre si bien le chemin. En invoquant la Vierge Marie qu’elle a tant priée.

Prions avec Marie en cliquant sur le bouton "je prie".

 

Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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