" Que je me perde, je Te trouve" - Maitre Eckhart

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Bonjour à tous,

Voici un poème de la fin du XIII ème siècle – Le grain de Sénevé – attribué à Maitre Eckhart, Eckhart von Hochheim, le premier des mystiques rhénans.
Ce poème évoque le détachement qui était – à l’époque médiévale - la voie pour le salut chrétien : en cultivant son intériorité, l’homme y fait de la place pour accueillir Dieu, « l'homme devenant par Grâce ce que Dieu est en nature. » 

Granum Sinapis

Le grain de sénevé

Au commencement
Au-dessus du sens
Là est le Verbe. 
Ô trésor si riche 
Là le commencement fait naître commencement
Ô poitrine du Père
avec grand plaisir
En coule le Verbe !
Et pourtant le sein
Garde le Verbe
Cela est vrai.
Des deux un fleuve,
D'Amour le feu, 
Les deux unis
Aux deux commun,
le Très-Doux Esprit
Très égal, 
Inséparable.
Les trois sont Un.
Sais-tu quoi ? Non. 
Il se sait lui-même : en entier,
Au mieux
La boucle des trois
A une profondeur terrible,
Le pourtour lui-même
Jamais sens ne saisit :
Là est une profondeur sans 
Fond.
Échec et mat
Temps, formes et état ! 
L'anneau merveilleux
Est un jaillissement, 
Tout immobile se tient son
point
Le mont pointu
Gravis-le sans agir
Intelligence
Le chemin t'emmène
En un merveilleux désert, 
Au large, au loin,
Il gît sans limite. 
Le désert n'a
Ni temps ni état, 
Sa façon lui est particulière. 
Ce désert le bien
Jamais pied n'y passe 
Sens créé
Jamais n'y vint 
Cela est ; et personne ne
Sait quoi 
Cet ici, ce là, 
Ce loin, ce près, 
Ce profond, cet haut, 
Ceci est ainsi
Que ce n'est çà
Ni ci. 
Cette lumière, cette clarté
Cette ténèbre complète, 
Cet innommé, 
Cet ignoré,
Libre du début et aussi 
De la fin. 
Cela paisiblement se tient désolé, sans vêtement.
Qui sait sa demeure ? 
Qu'il en sorte ! 
Et nous dise quelle est sa forme. 
Deviens comme un enfant, 
Deviens sourd deviens aveugle ! 
Tout ton être doit devenir néant,
Passe au-dessus de tout être, tout néant ! 
Laisse l'état laisse le temps, 
Et aussi les images !
Allant sans voie 
Par le sentier étroit, 
Ainsi arrives-tu
À la trace du
Désert
Ô mon âme,
Va dehors ! Dieu, dedans ! 
Sombre tout mon être
Dans le néant divin
Sombre en ce fleuve sans fond ! 
Que je te fuis, 
Tu viens à moi
Que je me perde 
Alors, je Te trouve,
Ô Bien suressentiel 

 

Proposition de réflexion :

Si nous n’en sommes pas encore à ce que « tout notre être devienne néant » - on peut peut-être laisser cela aux mystiques rhénans ;) -, nous pouvons peut-être essayer, à notre mesure, de faire un peu de place en nous pour permettre à Dieu de pouvoir y loger plus profondément.
Pendant ce temps de Carême, qui rappelle les 40 jours du Christ dans le désert, n’est-ce pas le bon moment de s’oublier un peu, d’effacer un peu notre « MOI », de gommer un peu les contours bien marqués de notre personne pour entrer un peu plus en communion avec ce qui nous dépasse, « cette boucle des trois (…) libre du début et aussi de la fin" ?

Prière de la communauté

Que rien ne te trouble (sainte Thérèse d'Avila)

« Que rien ne te trouble, que rien ne t’effraie. Tout passe, Dieu ne change pas. La patience obtient tout. A qui possède Dieu, rien ne manque. Dieu seul suffit. »

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10 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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