Lin Yu Chen, un exemple de persévérance en Chine
Extrait de l'homélie du père Paul Préaut lors de la messe du 23 mai 2015
Je voudrais commencer cette homélie en vous citant un exemple de vie, celui de
Lin Yu Chen (林玉忱), la catéchiste du Fujian morte en 1992.
Elle naquit en 1902 à Songxia (松下), un pauvre village de pécheurs sur la côte
du Fujian, sur la mer de Chine. Ses parents étaient des gens très simples. Lorsqu’elle
eut atteint l’âge de seize ans, ils voulurent la marier avec un Chinois vivant au
Japon, présumé plus riche ; celui-ci versa une « dot » aux parents de la jeune fille de
80 pièces d’argent. Mais Yu Chen ne voulut pas se rendre à l’avis de sa famille : elle
voulait devenir religieuse ! Elle refuse donc le mariage et encourut de graves
sévices : elle dut dormir dans la paille de l’étable pendant deux ans, et servir ses
parents dans les tâches les plus ingrates. De guerre lasse, au bout de presque trois
ans d’une guerre quotidienne, ceux-ci renoncèrent et contactèrent la famille du
jeune homme pour leur faire part de la décision de Yu Chen ; le fiancé déçu
accepta, contre un remboursement de 120 pièces d’argent que la jeune fille dut
trouver.
La vierge consacrée
Elle alla alors se former dans une communauté de sœurs dominicaines
espagnoles à Fuzhou ; elle y resta quelques années, apprenant la vie religieuse et
l’apostolat auprès des malades. Elle devient religieuse et se consacra ainsi à
l’apostolat, prenant le nom de « Rosa » (林罗撒), héritée des sœurs espagnoles, et,
pendant une vingtaine d’années, sillonna à pied le territoire montagneux de la
province du Fujian et les villages au bord de la mer, exerçant une activité de
catéchiste itinérante à partir de ses seules connaissances orales de la Bible : en effet,
elle était pratiquement illettrée et ne connaissait l’Écriture que par ce qu’on lui en
avait raconté, et par sa propre vie de foi. Elle faisait aussi office de garde-malades.
La seconde guerre mondiale et l’occupation par les Japonais du Fujian (sa maison
reçut de nombreux impacts de balles, encore visibles actuellement) ne
l’empêchèrent pas de s’acquitter de son ministère.
Finalement bloquée par la guerre, elle se réfugia dans une petite école
catholique où la révolution communiste de 1949 la trouva comme aide auprès des
maîtresses et catéchiste des enfants. En 1951, toutes les écoles religieuses durent
fermer leurs portes et Yu Chen décida de retourner vivre chez sa mère : sa
communauté religieuse avait été, entretemps, dissoute. Elle l’assista dans sa
vieillesse, venant en aide aux personnes âgées de son village natal de Song Xia.
Le rayonnement de la foi
C’est à ce moment-là que les prêtres commencèrent à disparaître du Fujian :
certains furent emprisonnés ou envoyés en camp de travail, d’autres se cachèrent
dans la clandestinité ; l’Église disparaissait. Alors, de partout, on vint trouver la
vieille catéchiste pour lui poser des questions et pour l’entendre enseigner la foi,
que personne ne transmettait plus. Yu Chen fit chez elle des séances de catéchisme,
réunissant de plus en plus de monde (parfois jusqu’à cent paroisses), baptisant, car
il n’y avait plus de ministres. On se mit à l’enregistrer pour diffuser et conserver son
enseignement ! De toute la province, on vint l’écouter enseigner la foi, expliquer
l’Évangile. Elle s’acquitta de cette activité pratiquement jusqu’à sa mort, en 1992.
Plus de six mille personnes (photos à l’appui !) suivirent ses obsèques. Son exemple
permit la transmission de la foi aux nouvelles générations après la révolution ; elle
est à l’origine de la refondation des vierges consacrées, qui sont près de 400 dans le
diocèse de Fuzhou. Lorsque les prêtres purent reprendre leur ministère à la fin des
années Mao, une femme avait été le relais de la foi …
Conclusions
Cette histoire nous stimule à la prière pour nos frères catholiques de Chine. En
effet, écoutant cette histoire, demandons à la docilité à l’Esprit Saint, laissons-
nous guider, conduire, enseigner par l’Esprit Saint. Il est la mémoire vivante de
l’Eglise. Il nous conduit à aimer « la lumière de la vérité », en laissant cette lumière
éclairer, rayonner, guérir le plus profond de notre âme.
Le deuxième enseignement, c’est la persévérance. Prions pour demander la
persévérance pour tous ces chrétiens missionnaires, ces disciples missionnaires, comme
les appelle le Pape François. Qu’ils ne se lassent pas, jamais, d’annoncer la Bonne
Nouvelle du Christ. Le nom de Dieu n’est pas le succès ! Il faut accepter d’entrer
dans le temps de Dieu, et quitter l’idéologie de l’activisme, et d’accepter le réalisme
du grain qui consent à mourir pour porter du fruit. Passer du temps des hommes, à
celui de Dieu.
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Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6