Semaine 4 : Accueillir la lumière du Christ

Image de la publication

Evangile : Jésus, lumière du monde, guérit un aveugle (Jn 9)

 

« En ce temps-là, en sortant du Temple, Jésus vit sur son passage un homme aveugle de naissance. Ses disciples l’interrogèrent : “Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ?” Jésus répondit : “Ni lui, ni ses parents n’ont péché. Mais c’était pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui. Il nous faut travailler aux œuvres de Celui qui m’a envoyé tant qu’il fait jour ; la nuit vient où personne ne pourra plus travailler. Aussi longtemps que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde.” Cela dit, il cracha a terre et, avec de la salive, il fit de la boue ; puis il appliqua la boue sur les yeux de l’aveugle, et lui dit : “Va te laver à la piscine de Siloé” – ce nom se traduit : envoyé. L’aveugle y alla donc, et il se lava ; quand il revint il voyait. […]

Jésus apprit que [les pharisiens] l’avaient jeté dehors. Il le retrouva et lui dit : “Crois-tu au Fils de l’homme ?” Il répondit : “Et qui est-il Seigneur pour que je croie en lui ?” Jésus lui dit : “Tu le vois et c’est lui qui te parle.” Il dit : “Je crois, Seigneur !” Et il se prosterna devant lui. »

1.La méditation de la semaine : « Si nous avions toujours les yeux du cœur orientés vers Lui » (L 324)

 

  • Manifester les œuvres de Dieu

Cette semaine, Jésus rencontre un aveugle-né. Selon la tradition biblique, l’infirmité était le signe du péché. Alors les disciples interrogent Jésus pour savoir qui a péché, lui ou ses parents. Jésus réfute alors l’argumentation traditionnelle et affirme que ni lui, ni ses parents n’ont péchés, mais la situation de cet homme va permettre aux œuvres de Dieu de se manifester en lui. Une gratuité totale se manifeste dans la guérison opérée par Jésus alors que l’aveugle-né ne demande quoi que ce soit.

Élisabeth a l’audace d’exposer sa misère au regard de Jésus pour qu’il se manifeste comme Sauveur. Quelques mois avant son entrée au carmel, elle écrit à une amie : « Jamais je n’ai autant senti ma misère, jamais je ne me suis vue aussi misérable, mais cette misère ne m’abat point, je m’en sers au contraire pour aller à Lui, et je pense que c’est parce que je suis si faible qu’Il m’a tant aimée, qu’Il m’a tant donné » (L 53). Quelques années plus tard, elle écrit à son confident, le chanoine Angles : « Oh, que c’est bon aux heures où l’on ne sent que sa misère d’aller se faire sauver par Lui » (L 225). Ce qu’elle vit dans le secret de son monastère, dans l’intime de son être, Élisabeth le partage volontiers à ses correspondants. Elle dévoile à leurs yeux le chemin qu’elle emprunte, le rendant accessible à tous.

Citons longuement la lettre qu’elle écrit à Madame Angles, belle-sœur du chanoine : « Lorsque le poids du corps se fait sentir et fatigue votre âme, ne vous découragez pas, mais allez par la foi et l’amour à Celui qui a dit : “Venez à moi et je vous soulagerai” (Mt 11, 28). Pour ce qui regarde le moral ne vous laissez jamais abattre par la pensée de vos misères. Le grand saint Paul dit : “Où le péché abonde, la grâce surabonde” (Rm 5, 20). Il me semble que l’âme la plus faible, même la plus coupable, est celle qui a le plus lieu d’espérer, et cet acte qu’elle fait pour s’oublier et se jeter dans les bras de Dieu le glorifie et lui donne plus de joie que tous les retours sur elle-même et tous les examens, qui la font vivre avec ses infirmités, tandis qu’elle possède au centre d’elle-même un Sauveur qui veut à toute minute la purifier » (L 249). Parlant de son secret qui consiste à penser que nous sommes le « Temple de Dieu », elle poursuit : « Ne vous dites pas que cela n’est pas pour vous, que vous êtes trop misérable, car c’est au contraire une raison de plus pour aller à Celui qui sauve. Ce n’est pas en regardant cette misère que nous serons purifiées, mais en regardant Celui qui est toute pureté et sainteté ».

Sur le même registre, elle s’adresse à son amie Germaine de Gemeaux : « Si votre nature est un sujet de combat, un champ de bataille, oh, ne vous découragez pas, ne vous attristez pas. Je dirais volontiers : aimez votre misère, car c’est sur elle que Dieu exerce sa miséricorde, et lorsque sa vue vous jette dans la tristesse qui vous replie sur vous, cela, c’est de l’amour-propre ! Aux heures de défaillance, allez vous réfugier sous la prière de votre Maître; oui, petite sœur, sur sa Croix Il vous voyait, Il priait pour vous, et cette prière est éternellement vivante et présente devant son Père; c’est elle qui vous sauvera de vos misères. Plus vous sentez votre faiblesse, plus votre confiance doit grandir, car c’est à Lui seul que vous vous appuyez » (L 324). Invitation pressante à aller vers le Sauveur, à se tenir au pied de sa Croix pour en recevoir le Salut.

 

  • Jésus, Lumière du monde

Dans l’évangile de ce dimanche, Jésus, sauveur, se manifeste comme la lumière du monde et il l’atteste d’une certaine manière en rendant la vue à l’aveugle-né. Pour Élisabeth, le Christ Jésus est bien la « vraie lumière venue dans le monde » (Jn 1, 9). Pour son premier Noël au carmel, elle le chante dans une poésie :

            « Ce doux agneau, ce Tout-Petit,

               C’est l’éternelle et vraie lumière,

               Celui qui règne au sein du Père

               Et vient nous dire tout de Lui. » (P 75).

Dans une autre poésie, elle le chante comme le « foyer de lumière / Enveloppant les siens en sa clarté ! » (P 85). Élisabeth aime tout particulièrement la fête de l’épiphanie, « fête de lumière et d’adoration » (L 150 et 151) en laquelle elle a prononcé ses vœux le 11 janvier 1903. Elle ne cesse de se recueillir sous cette grande lumière du Christ :

            « Sous ta grande lumière

               Ô Verbe, nuit et jour

               Que je sois tout entière

               La proie de ton amour » (P 88, du 23 décembre 1903).

Dans sa prière à la Trinité, du 21 novembre 1903, elle écrit : « Puis, à travers toutes les nuits, tous les vides, toutes les impuissances, je veux vous fixer toujours et demeurer sous votre grande lumière ; ô mon Astre aimé, fascinez-moi pour que je ne puisse plus sortir de votre rayonnement » (NI 15). Dans sa correspondance, elle souhaite à ceux qu’elle aime de vivre de cette lumière. À sa sœur Guite, elle écrit : « le Verbe imprimera en ton âme comme en un cristal l’image de sa propre beauté, afin que tu sois pure de sa pureté, lumineuse de sa lumière » (L 269). À une jeune fille, elle donne ce conseil : « Marchez en Jésus-Christ, enracinés en Lui, édifiés sur Lui, affermis dans la foi et croissant de plus en plus en Lui” (Col 2, 6-7). Tandis que je contemplerai l’idéale Beauté en sa grande clarté, je Lui demanderai qu’elle s’imprime en votre âme, afin que déjà sur cette terre où tout est souillé, vous soyez belle de sa beauté, lumineuse de sa lumière » (L 331)

Cette lumière est celle de l’Agneau de l’Apocalypse comme elle l’explique dans sa méditation du quatrième jour de la Dernière Retraite : « Et d’abord, me dit [saint Jean], il n’y a pas de lumière dans la ville, “parce que la clarté de Dieu l’a illuminée et que l’Agneau en est le flambeau” (Ap 21, 23)... Si je veux que ma cité intérieure ait quelque conformité et ressemblance avec celle “du Roi des siècles immortel” (1 Tm 1, 17) et reçoive la grande illumination de Dieu, il faut que j’éteigne toute autre lumière et que, comme en la ville sainte, l’Agneau en soit “le seul flambeau”. Voici la foi, la belle lumière de foi, qui m’apparaît. C’est elle seule qui doit m’éclairer pour aller au-devant de l’Époux. Le psalmiste chante qu’Il se “cache dans les ténèbres” (Ps 17, 12), puis semble d’autre part se contredire en disant que “la lumière l’environne comme d’un vêtement” (Ps 103, 2). Ce qui ressort pour moi de cette contradiction apparente, c’est que je dois me plonger dans la ténèbre sacrée en faisant la nuit et le vide dans toutes mes puissances, [mon intelligence et ma volonté]; alors je rencontrerai mon Maître, et la lumière qui l’environne comme d’un vêtement m’enveloppera aussi, car Il veut que l’épouse soit lumineuse de sa lumière, de sa seule lumière, ayant la clarté de Dieu » (DR 9-10).

Cette lumière du Christ, Élisabeth la reçoit également de la Croix. Elle écrit à sa maman : « Maman chérie, reçois à la lumière qui jaillit de la Croix toute épreuve, toute contrariété, tout procédé peu gracieux; c’est comme cela que l’on plaît à Dieu, que l’on avance dans les voies de l’amour » (L 314). Elle-même avance à grands pas sur ce chemin comme l’indique ces dernières paroles audibles : « Je vais à Lumière, à la Vie, à l’Amour ».

 

  • Croire au Fils de l’homme

À bien des reprises, Élisabeth parle de la « lumière de foi ». Dans l’évangile de ce quatrième dimanche de carême, après s’être présenté comme « la lumière du monde », Jésus invite l’aveugle-né guéri à croire en lui. Élisabeth vit de foi, et elle l’exprime magnifiquement dans le sixième jour de la retraite composée pour sa sœur Guite, que nous osons citer longuement :

« Pour s’approcher de Dieu il faut croire” (He 11, 6). C’est saint Paul qui parle ainsi. Il dit encore : “La foi est la substance des choses que l’on doit espérer et la démonstration de celles que l’on ne voit pas” (He 11, 1). C’est-à-dire que la foi nous rend tellement certains et présents les biens futurs que, par elle, ils prennent être en notre âme et qu’ils y subsistent avant que nous en jouissions. Saint Jean de la Croix dit qu’elle nous sert de pieds pour aller à Dieu ; et encore qu’elle est la possession à l’état obscur. C’est elle seule qui peut nous donner de véritables lumières sur Celui que nous aimons, et notre âme doit la choisir comme le moyen pour parvenir à l’union bienheureuse. C’est elle qui verse à flots au fond de nous tous les biens spirituels. Jésus-Christ, parlant à la Samaritaine, désignait la foi lorsqu’Il promit à tous ceux qui croiraient en Lui de leur donner “une source d’eau vive qui rejaillirait jusqu’à la vie éternelle” (Jn 4, 14). Ainsi donc la foi nous donne Dieu dès cette vie, revêtu, il est vrai, du voile dont elle le couvre, mais pourtant Dieu Lui-même. » (CF 19).

Le « trop grand amour » de Dieu dont parle saint Paul dans la lettre aux Éphésiens sera le texte biblique le plus cité par Élisabeth. Trente-cinq fois, il revient sous sa plume. Elle croit à cet amour et ne cesse d’inviter ses correspondants à « croire en l’Amour » (L 269 ; GV 11). Vers la fin de vie, elle écrit à sa maman : « Il y a un Être qui est l’Amour et qui veut que nous vivions en société avec Lui. Oh maman, c'est délicieux, Il est là qui me tient compagnie, qui m'aide à souffrir, qui me fait dépasser ma douleur pour me reposer en Lui ; fais comme moi, tu verras comme cela transforme tout » (L 327). Elle nous invite à raviver notre foi en l’amour sauveur du Christ Jésus pour nous. Lui qui se tient au plus intime de notre être et qui est prêt à tout instant à nous purifier.

 

Frère Didier-Marie Golay, ocd (couvent de Lisieux)

 

2.Les trois pistes de mise en pratique de la semaine

 

  1. Je peux aller demander le sacrement de la réconciliation : je présente ma misère, mon péché à Jésus ; je lui demande son pardon, sa miséricorde
  2. Je fais revenir à ma mémoire des moments où la lumière du Christ m’a irradié et j’en rends grâces
  3. Je rédige un acte de foi personnel en écrivant qui est Jésus pour moi, actuellement

Prière de la communauté

Prière d'Elisabeth

O mon Dieu, Trinité que j'adore, aidez-moi à m'oublier entièrement pour m'établir en vous, immobile et paisible comme si déjà mon âme était dans l'éternité. Que rien ne puisse troubler ma paix, ni me faire Sortir de vous, ô mon Immuable, mais que chaque minute m'emporte plus loin dans la profondeur de votre Mystère.

Merci ! 111 personnes ont prié

7 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

loader

Carême : rayonner Dieu avec Elisabeth de la Trinité

Je m'inscris