Saint Gilles - Chapitre 4

L’abbaye de Saint Gilles du Gard, plusieurs fois reconstruite, où se trouve le tombeau de Saint Gilles.

 

Fuyant les envahisseurs arabes, Gilles entreprend à pied, en 719, un long voyage vers le nord. Il est âgé de soixante-dix-neuf ans et, s’il redoute les fatigues du parcours, il n’en dit rien. Avec ses compagnons, il remonte la vallée du Rhône dans le but de se rendre à Paris et d’y rencontrer Charles Martel. D’étape en étape, la petite troupe, finit par arriver, épuisée, au terme de ce long périple.

La réputation du saint l’a précédé et Charles Martel, le sachant tout proche, l’envoie chercher. Le roi séjourne alors dans une luxueuse résidence bâtie au IIIe siècle sur l’actuelle Montagne Sainte-Geneviève, par un gouverneur des Gaules, Constance Chlore. Ce Palais des Thermes, ainsi nommé pour sa ressemblance avec le palais construit à Rome par Dioclétien, fut habité par plusieurs rois mérovingiens avant que Charles Martel y établisse sa demeure. 

Aux abords du palais, Gilles se prépare à la rencontre avec quelque appréhension car le roi est connu pour son manque de scrupules à piller les biens d’église. Mais une fois en présence du prince, le saint, par sa douceur et son intelligence, a vite raison de l’humeur batailleuse de son hôte. Celui-ci témoigne aux moines sa bonté et leur offre l’hospitalité. 

Ces derniers, heureux de prendre quelque repos, guettent néanmoins au fil des jours les nouvelles en provenance du sud. Elles sont mauvaises. Les Omeyyades font le siège de Narbonne, ville qui ne peut résister longtemps. Les moines reverront-ils leur monastère ? C’est la consternation. 

Gilles fait confiance. Il dit sa messe comme à l’accoutumée et le roi qui y assiste, à genoux sur son prie-Dieu, bat sa coulpe. Il ne peut communier. Il a sur la conscience un péché si grave qu’il lui est impossible de le confesser. Il pense que personne, pas même le Seigneur, ne peut le lui pardonner.   Tandis que le saint célèbre sa messe et présente le calice contenant « le Sang du Christ versé pour la rémission des péchés », un ange porte sur l’autel un parchemin où se trouve écrit le péché royal. Bouleversé, Charles Martel reconnaît sa faute et demande le pardon, que Gilles, au nom de Dieu lui accorde.

Cette expression de la miséricorde divine poserait le problème de la conception du sacrement de pénitence, le pécheur ne pouvant pas, en principe, être pardonné s’il n’a d’abord lui-même confessé sa faute. Il faut plutôt voir, dans cet épisode, le rôle prépondérant du sacerdoce dans l’expression de la miséricorde divine vis-à-vis des pécheurs.

L’invasion arabe est, pour Charles Martel, un souci majeur. En Espagne, les Wisigoths ont été balayés. Une fois les Pyrénées franchies, les sarrasins se sont portés tout naturellement sur les terres wisigothes de France, à savoir la Septimanie. Charles pense que leur ambition ne s’arrêtera pas là et que leur goût de conquête les incitera à envahir des terres plus au nord. Il doit se préparer à lever des troupes pour repousser les barbares, à conclure des alliances, notamment avec Eudes d’Aquitaine. Certes ils sont adversaires, lui-même, Charles, vient de battre Eudes près de Soissons mais des renversements d’alliance sont toujours possibles face à un ennemi commun. Sans doute, déclare-t-il à Gilles, est-ce une longue guerre qui l’attend.

Gilles l’écoute et prie. Il pense à son ami Wamba, le roi wisigoth détrôné, aux forces qui ne cessent de s’affronter sur cette terre, avec des ambitions auxquelles il se sent totalement étranger. Il est un homme de douceur, de paix, d’amour. Quand il quittera le roi, il le bénira pour que sa paix aille sur lui. A la Grâce de Dieu.

Ce retour, Gilles l’envisage chaque jour davantage. La vie monacale manque à ses compagnons et les informations qui lui parviennent l’incitent à repartir dans sa chère province même s’il est plein d’appréhension. Le chef sarrasin Zama a soumis la province, pris Narbonne. Il faudra attendre quarante ans pour que Pépin Le Bref libère définitivement la région, en commençant par reprendre Narbonne. Pour l’heure, Zama a établi un gouvernement en Septimanie, partagé les terres entre ses soldats et les habitants. Il a certes transformé en mosquée une église de Narbonne mais il autorise les chrétiens à pratiquer leur religion dès lors qu’ils payent un tribut au pouvoir omeyyade. Malgré ses craintes, son âge avancé, Gilles décide de prendre le chemin du retour. On sait que le monastère se trouvait abîmé par les pillages et que les dégâts étaient considérables mais, dès lors, les moines s’adonnent avec ferveur à sa reconstruction. Ils ont sûrement fait merveille puisque, bon an mal an, les bâtiments ont traversé les siècles en dépit des ravages du temps donnant lieu à réparations et reconstructions successives.

On imagine avec quelle joie les moines s’établissent à nouveau dans leurs murs et quelle ferveur les anime lorsque Gilles consacre la chapelle du couvent. 

Sa vie s’achève avec ce renouveau. Il s’était voulu ermite et avait renoncé à la solitude, en acceptant d’être appelé pour une œuvre beaucoup plus grande. Il sait à présent que cette oeuvre va perdurer. Il sait aussi que sa fin est proche car Dieu la lui a annoncée. Aussi demeure-t-il dans l’espérance, la paix, l’amour, attendant l’heure fixée par le Seigneur. Il rend l’âme le 1er septembre 720.

Le culte rendu à Saint Gilles fut immense, surtout à partir du Xe siècle, époque que choisirent les moines pour composer le récit fort riche de la vie de leur saint patron. Ils conservaient avec vénération ses reliques et son tombeau. Fidèles à la règle de Saint Césaire, ils n’adoptèrent qu’au XIe siècle la règle de Saint Benoît, lors de la réforme grégorienne. Mais Saint Benoît de Nursie ne s’était-il pas lui-même inspiré de la règle de Saint Césaire lorsqu’il rédigea la sienne ?

L’abbaye de Saint-Gilles du Gard, port de mer, jouissant d’une situation géographique idéale, prit un essor rapide. Elle devint un des hauts lieux de la chrétienté, étape du pèlerinage de Rome, lieu de passage obligé des pèlerins de Saint Jacques qui empruntaient le « chemin de Saint Gilles ». A partir du Xe siècle, la dévotion au culte de Saint Gilles s’est répandue dans tout l’Occident. Les nombreuses abbayes bénédictines y ont largement contribué. Mais au-delà de cette influence, le culte du saint fut aussi diffusé en Hongrie, en Pologne, dans l’Empire et en Angleterre. Le développement des pèlerinages au XIe siècle fut certes à l’origine de cette notoriété. Et le culte des reliques, si en vogue au Moyen-Age, explique que des reliques du saint aient été distribuées dans tout l’Occident, les plus importantes d’entre elles ayant été recueillies à Saint-Sernin de Toulouse.

La dévotion populaire a retenu deux épisodes de la vie du saint, celui de la biche miraculeuse (devenue avec la flèche, l’attribut du saint) et celui du péché pardonné du Roi Charles Martel. La cathédrale de Chartres a repris cet épisode sur des vitraux et au portail sud. Tout comme la châsse de Charlemagne à Aix-la-Chapelle (en effet une confusion des dates a parfois fait croire que le souverain pécheur était Charlemagne).

Les nombreux miracles attribués à Saint Gilles expliquent aussi le culte qui lui est rendu. Il est invoqué par les gens de mer, les cultivateurs et les bergers. Réputé pour apaiser la folie, la panique et les frayeurs nocturnes, il entre, au Xsiècle, dans le groupe des saints « auxiliaires ». Son nom est mentionné dans les plus anciens bréviaires manuscrits, dans les missels du XIe siècle. Même si aujourd’hui, plutôt qu’une légende, nous aurions aimé une histoire plus précise, sa popularité ne trompe pas : c’est bien d’un saint immense qu’il s’agit.

La fête de Saint Gilles est fixée au 1er septembre.

Prions avec les Litanies à Saint Gilles (extraits)

Seigneur, ayez pitié de nous, Trinité sainte qui êtes un seul Dieu, ayez pitié de nous.
 Sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous. Saint Gilles, qui avez été dès votre enfance un modèle de vertu. Saint Gilles, très humble dans les honneurs, Saint Gilles, très pauvre dans les richesses, Saint Gilles, confesseur de la vérité dans le conseil des grands, Saint Gilles, qui avez abandonné votre patrie, Saint Gilles, plein de sécurité au milieu du naufrage, Saint Gilles, fuyant dans le fond des bois, Saint Gilles, appelé dans le palais des rois à cause de votre grande sainteté, Saint Gilles, qui par votre prière, avez rendu à la terre stérile sa fécondité, Saint Gilles, qui avez chassé les maladies en faisant toucher votre manteau, Saint Gilles, qui avez passé les nuits dans la méditation, Saint Gilles, qui avez été nourri miraculeusement par les bêtes sauvages, Saint Gilles, illustre dans le monde par votre sainteté, Saint Gilles, fondateur d’un monastère très célèbre, Saint Gilles, animé d’une profonde vénération pour l’église romaine, Saint Gilles, notre modèle, Saint Gilles, notre refuge dans les calamités, Saint Gilles, notre guide, Saint Gilles, qui nous aimez Saint Gilles, notre père, Saint Gilles, qui ne cessez de prier pour vos enfants, Jésus-Christ, écoutez-nous, Jésus-Christ, exaucez-nous, Saint Gilles, priez pour nous, Afin que nous soyons rendus dignes des prières de Jésus-Christ.

Terminons notre prière en invoquant Jésus par Marie.

Je vous salue, Marie...

Prière de la communauté

Je vous salue Marie

Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.

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2 commentaires

Que vos paroles soient toujours bienveillantes, qu’elles ne manquent pas de sel, vous saurez ainsi répondre à chacun comme il faut. Col 4 : 6

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